«Gilets jaunes»: l’exécutif français veut une nouvelle loi contre «les casseurs»

Deux jours après une huitième journée de mobilisation des « gilets jaunes » marquée par de nouvelles violences, le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé ce lundi sur TF1 de nouvelles mesures d’ordre public.

« Ils n’auront pas le dernier mot », a prévenu d’emblée Edouard Philippe, en référence aux auteurs de violences lors des rassemblements de « gilets jaunes ». Le Premier ministre intervenait ce lundi sur TF1 deux jours après un « acte VIII » qui a rassemblé quelque 50 000 personnes à travers la France et donné lieu à 345 interpellations.

A Paris, des individus sont parvenus, en défonçant la porte avec un engin de chantier, à pénétrer dans l’enceinte du ministère du porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux. Un ancien boxeur professionnel, soupçonné d’avoir agressé deux gendarmes sur une passerelle enjambant la Seine, s’est présenté à la police lundi matin et a été placé en garde à vue.

Comme il l’avait fait le 8 décembre pour « l’acte IV », le gouvernement a donc prévu de mobiliser en nombre les forces de l’ordre samedi prochain. Près de 80 000 policiers et gendarmes devraient ainsi être déployés, dont 5 000 à Paris. « Nous allons faire en sorte de procéder à un grand nombre d’interpellations », a indiqué Edouard Philippe.

Sanctionner les participants à des manifestations non déclarées

Au-delà de ces mesures ponctuelles, l’exécutif souhaite l’adoption d’une nouvelle loi encadrant le droit de manifester. Le dispositif permettrait d’interdire l’accès aux manifestations de casseurs identifiés avec la création d’un fichier spécial, sur le modèle de celui qui existe pour la lutte contre le hooliganisme.

Le texte permettrait également de sanctionner plus sévèrement ceux qui participeraient à des manifestations non déclarées. « Il faut préserver la liberté de manifester en France et il faut sanctionner ceux qui veulent enfreindre ce droit à manifester », a déclaré le Premier ministre. « Ceux qui arrivent aux manifestations cagoulés, aujourd’hui c’est une contravention, demain ça doit être un délit », a-t-il ajouté, appelant aussi à « faire en sorte que la responsabilité civile des casseurs soit très sérieusement engagée de façon à ce que ce soit les casseurs qui payent et pas les contribuables pour les dommages qui sont causés ».

C’est quasiment mot pour mot ce que proposait la droite au Sénat en octobre dernier contre les « black blocs ». A l’époque, la République en marche avait voté contre et le gouvernement avait donné un avis défavorable. Aujourd’hui, les « gilets jaunes » forcent l’exécutif à faire volte-face et à piocher dans les idées des Républicains.

Ce projet de loi pourrait être déposé devant l’Assemblée nationale « dès le début du mois de février », a précisé le chef du gouvernement.

Sur Twitter, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner s’est dit « pleinement engagé » derrière le Premier ministre Edouard Philippe « pour moderniser nos outils de maintien de l’ordre, renforcer nos effectifs de forces mobiles et adapter notre dispositif face à cette ultraviolence qui dévoie la liberté de manifesté et souille notre pacte républicain ». Mais dans l’opposition, les annonces du chef du gouvernement sont largement décriées.

« Les annonces d’@EPhilippePM sont sans efficacité immédiate. C’est tout de suite qu’il faut rétablir l’ordre. Il y a plus d’un mois, Les Républicains ont proposé l’état d’urgence. Pourquoi ne pas nous écouter, au risque de voir samedi après samedi la situation dégénérer ? », s’est étonné le président du parti Les Républicains Laurent Wauquiez.

De son côté, le syndicat de police Alliance estime que ces mesures ne vont pas assez loin. Sur le versant judiciaire, « le ministre a été beaucoup trop timoré », a réagi Frédéric Lagache, le secrétaire général adjoint du syndicat. « On aurait aimé entendre l’abrogation des lois Taubira. Cela aurait été un message fort vis-à-vis de ceux qui cassent dans Paris et dans toutes les villes de France ».

Depuis le début de la mobilisation des « gilets jaunes », le 17 novembre 2018, 5 600 personnes ont été placées en garde à vue et quelque 1 000 condamnations ont été prononcées par la justice, a indiqué ce lundi soir Edouard Philippe.

Rfi