Syrie: l’exode des populations face à l’avancée de l’armée d’Assad

L’armée syrienne est en passe de reprendre le contrôle de la Ghouta orientale, l’un des plus importants bastions rebelles du pays, à l’issue d’une violente offensive, lancée le 18 février. Les habitants sont les premières victimes de cette bataille, qui a fait 1600 morts civils et poussé à l’exode quelque 200 000 personnes.

Avec notre correspondant à Beyrouth,Paul Khalifeh

A mesure que l’armée syrienne avance dans la Ghouta orientale de Damas, les villes et les villages de ce bastion rebelle, situé à l’est de la capitale, se vident progressivement de leurs habitants.

Selon les Nations unies, 393 000 personnes vivaient dans cette enclave de 100 mètres carrés, avant le 18 février. Depuis, quelque 200 000 civils ont quitté la Ghouta. 45 000 personnes, dont 5000 combattants, ont choisi de partir vers la province d’Idleb, contrôlée par des groupes rebelles et jihadistes. La majorité est logée dans des camps d’accueil, à Idleb ou à l’ouest de la province d’Alep.

Près de 150 000 autres civils se sont réfugiés dans les zones gouvernementales, en empruntant des couloirs sécurisés ouverts par l’armée syrienne. La plupart ont été installés dans des centres d’accueil et des camps, dans la banlieue de Adra, au nord de Damas.

Il resterait, dans la dernière enclave rebelle de Douma, plus de 130 000 civils, dont beaucoup de réfugiés d’autres régions. Dans l’accord conclu avec les rebelles de Jaïch al-Islam, près de 50 000 combattants et membres de leurs familles seront évacués vers la ville de Jarablous. Les autres civils resteront sur place. Des sources proches de Damas affirment que 150 000 habitants de la Ghouta pourront regagner leurs villes et villages après la fin des opérations de ratissage et le rétablissement des services de base.

Les prochains objectifs stratégiques du régime

La chute de la Ghouta, à la suite de bombardements intenses et de combats au sol qui ont dévasté la zone, marquerait une des pires défaites pour les rebelles dans la guerre qui ravage la Syrie depuis plus de sept ans.

Le régime est donc en passe de reprendre le contrôle de la quasi totalité du territoire. Mais il reste différentes poches de résistance et notamment Idleb, proche de la Turquie. Vladimir Poutine arrive ce mardi 3 avril à Ankara, à la veille d’un sommet consacré à la Syrie qui réunira Russes, Iraniens et Turcs, principaux acteurs du conflit désormais.

Quelles seront les prochaines étapes après la chute – imminente – de la Ghouta ? Les explications de Thomas Pierret, chargé de recherche à Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans. « D’un point de vue militaire, il reste essentiellement trois poches de territoires. Il y a ce qu’on pourrait appeler une sorte de croissant. Il y a, sous contrôle direct de la Turquie, la campagne au nord d’Alep, la région d’Afrin, et son extension vers le sud, Idleb, sous influence turque mais pas encore directement contrôlé par la Turquie; au sud, la région de Deraa, que le régime semble désireux de reprendre dans des délais assez brefs, notamment pour rouvrir le commerce avec la Jordanie ; et encore une petite poche tenue par les rebelles, au nord de la ville de Homs, qui pourrait tomber assez facilement du côté du régime.

Diplomatiquement, on n’est plus du tout aujourd’hui dans la perspective d’un règlement négocié au sens d’un compromis, qui n’a jamais été l’intention du régime ni de ses alliés iraniens et russes, mais aujourd’hui encore moins qu’hier. S’il y a des réunions avec la Turquie, c’est simplement pour diviser des zones d’influence et notamment pour discuter de ce qu’il convient de faire de la région d’Idleb, que la Turquie voudrait préserver comme une sorte de zone refuge. »

rfi