Un référendum pour clore le grand débat

« Un big-bang électoral pour sortir de la crise sociale et politique provoquée par la révolte des « gilets jaunes » ? », s’interroge Libération. En effet, pointe le journal, « Emmanuel Macron envisage de frapper fort en fixant au dimanche 26 mai le rendez-vous crucial où se jouera la suite de son quinquennat. Il a confié jeudi dernier qu’il n’écartait pas l’idée de faire coïncider le renouvellement du Parlement européen avec une consultation où les électeurs seraient invités à trancher sur plusieurs questions soulevées par le grand débat. Un référendum fin mai, donc, en même temps que les européennes ? ‘Cela fait partie des sujets sur lesquels il faut cogiter’, a-t-il répondu. Pas question, a-t-il ajouté, de ‘se défausser’ avec l’une ou l’autre des ‘réponses traditionnelles’ aux crises majeures qui ébranlent la République : réponse politique avec la dissolution de l’Assemblée nationale ou réponse sociale avec l’organisation d’un grand et coûteux Grenelle négocié avec les syndicats. »

Quelles questions ?

Alors, un référendum pour clore le grand débat : est-ce une bonne idée ?

« Il n’est pas sûr qu’un référendum soit la meilleure réponse à ce besoin de dialogue, estime La République des Pyrénées. D’autant que l’expérience des référendums montre que, puisqu’il n’y a que deux réponses possibles, oui ou non, le référendum est l’occasion, quel qu’en soit le sujet, de s’opposer au pouvoir en place. »

Justement, ce référendum pourrait d’être d’un genre nouveau…

En effet, pointe La Voix du Nord, « pour que cet exercice ne tourne pas au vote pour ou contre sa personne, Emmanuel Macron a peut-être la solution. Faire voter les Français sur plusieurs questions, sur lesquelles leur avis est déjà tranché, si on en croit les revendications des Gilets jaunes comme les premières contributions au grand débat : la réduction du nombre de parlementaires, la limitation des mandats dans le temps, voire la fusion du Sénat avec le CESE (le Conseil économique, social et environnemental). La réforme étant aujourd’hui gelée au Parlement, en appeler au ‘peuple souverain’ serait bien dans l’air du temps. »

Oui, mais, s’interroge Le Figaro, « qui choisirait la, ou plutôt les questions, puisque l’idée d’en poser plusieurs à la fois fait son chemin ? Le président de la République accepterait-il de retenir, parmi les priorités émanant du grand débat national, celles qui remettraient en cause sa politique, comme la suppression d’une partie de l’ISF ? Malheureusement, on voit mal comment il pourrait y échapper, soupire Le Figaro. La colère des « Gilets jaunes » porte tout autant sur le pouvoir d’achat et la fiscalité que sur le fonctionnement de nos institutions: introduction du mode de scrutin proportionnel, reconnaissance du vote blanc, réduction du nombre de parlementaires… L’arme du référendum pourrait donc se révéler dangereuse, estime le quotidien de droite, et ouvrir la porte aux réponses les plus démagogiques. La France, qui croule sous les dettes, peine à rendre ses entreprises compétitives et traîne un chômage de masse endémique, peut-elle se permettre de jouer avec le feu de solutions irréalistes ? »

Les européennes cannibalisées ?

Autre interrogation : est-ce pertinent d’organiser un référendum, quelle que soit sa forme, au même moment que les élections européennes ?

Attention, prévient Sud-Ouest, « il est à craindre que pendant la campagne, on parle beaucoup des questions qui seront posées au référendum et fort peu d’Europe. »

C’est vrai, renchérit Le Républicain Lorrain, « en couplant élection européenne et référendum à questions multiples, comme il semble l’envisager sérieusement, le pouvoir ferait le pari de gagner au moins sur un des deux tableaux. Quitte à sacrifier l’enjeu européen. Mais que ne ferait-on pas là-haut pour faire retomber la fièvre jaune ? »

En effet, estiment Les Echos, « il y a plus urgent pour Macron l’européen que l’Europe aujourd’hui : il doit se sauver nationalement. Tant pis, donc, si l’initiative qu’il prendra après le grand débat – un référendum sur les institutions ? – vient parasiter sa campagne européenne. »

Bref, conclut Le Journal de la Haute Marne, « le pari est risqué, mais le chef de l’Etat ne peut pas sortir de la crise actuelle sans prendre de risques. Les premières réactions, y compris dans la majorité, lui fournissent déjà une indication sur ce à quoi il doit s’attendre. Le référendum escamoterait l’enjeu européen et, surtout, la poussée du souverainisme et du nationalisme dans notre pays. Ou bien il aboutirait à un mélange des genres. Ou bien les questions posées dans le référendum ne correspondraient pas aux préoccupations premières des Français, à commencer par le pouvoir d’achat. »

Les problèmes de fond ne seront pas posés…

A la Une de Libération, comment faire du neuf avec du vieux…

Avec ce débat, initié par le journal, entre deux grands penseurs : les sociologues Edgar Morin, 97 ans, et Alain Touraine, 93 ans. Deux grands penseurs nonagénaires, certes, mais qui affichent leur jeunesse d’esprit sur les grands thèmes du moment : migrants, Europe, nationalismes, écologie, « gilets jaunes »… Impossible ici de résumer cet entretien croisé. A retenir peut-être, cette phrase d’Edgar Morin sur le référendum qui pourrait donc avoir lieu fin mai : « si les doléances exprimées dans le désordre le plus total par les représentants autoproclamés des gilets jaunes sont écrites dans les mairies et promulguées dans cette grande consultation nationale, il peut y avoir un réveil. Mais les problèmes de fond ne seront pas posés, je le crains : (à savoir) le pouvoir devenu sans frein des puissances d’argent sur la société et la politique ; corrélativement, les dommages sur la santé des produits de l’agriculture industrialisée ; et la nécessité d’une nouvelle voie pour la politique française. »

Les secteurs qui embauchent

Enfin, une note positive à la Une du Parisien : « comment se faire embaucher cette année », ça n’est pas une question mais une affirmation…

En effet, affirme Le Parisien, « malgré des prévisions économiques prudentes, le rythme des créations d’emplois devrait rester soutenu encore cette année. » Exemple, poursuit le journal, « l’Hexagone manque, dans toutes les régions, de magasiniers, de chauffeurs, mais aussi de coiffeurs, de serveurs, d’ingénieurs, de développeurs informatiques, de Web designers. Certains secteurs, comme celui du bâtiment et des travaux publics, manquent aussi cruellement de recrues. »

Le Parisien propose une carte des régions qui recrutent le plus : l’Ile-de-France arrive en tête avec une offre de 288.000 emplois, suivie de la région Auvergne Rhône-Alpes, avec 219.000 emplois.

Rfi