En Turquie, après sa double victoire aux élections législatives et présidentielle du 24 juin, Recep Tayyip Erdogan prête serment ce lundi 9 juillet après-midi pour un nouveau mandat aux pouvoirs considérablement élargis. Le président turc n’a pas l’intention d’assouplir son régime et il a d’ailleurs donné le ton, ce week-end, en limogeant plus de 18 000 fonctionnaires. Le Premier ministre russe Dmitri Medvedev assistera à l’investiture.
Avec notre correspondante à Istanbul, Anne Andlauer
Le système politique que Recep Tayyip Erdogan inaugure en même temps que son nouveau mandat lui offre le soutien institutionnel et légal pour imposer sa conception du pouvoir. Autrement dit, un régime sans réels contrôles, où tout dépend de la volonté du chef désigné par les électeurs, ou du moins la moitié d’entre eux, dans le cas de Tayyip Erdogan.
A compter de ce lundi, la Turquie n’a plus de Premier ministre. Le président est à la fois le chef de l’Etat, de l’exécutif, des armées et du parti au pouvoir. Le Parlement est marginalisé, la haute juridiction dominée par le président.
Une opposition impuissante
Pour les citoyens turcs, cela veut dire, sans doute, une justice encore plus expéditive, des décrets présidentiels contre lesquelles l’opposition n’aura pas de marge de manœuvre et un contrôle sur la société – des médias aux associations – encore plus resserré.
« Les pouvoirs qui sont attribués au président Erdogan en fonction de la refonte constitutionnelle votée l’année dernière par referendum, lui permettent, au-delà d’un certain nombre d’autres articles, de gouverner par décret présidentiel. Au titre de ces décrets, il y aura toute possibilité au nom de la lutte antiterroriste de continuer des purges, des arrestations, si nécessité fait loi, sans pour cela avoir recours à l’Etat d’urgence. Donc effectivement, les libertés démocratiques qui n’était déjà pas en très bon état en Turquie, risquent d’être encore restreintes dans les semaines, les mois et les années à venir », analyse le chercheur spécialiste de la Turquie Didier Billion.
Cela fait déjà 15 ans que Recep Tayyip Erdoğan est au pouvoir et ce nouveau mandat de cinq ans l’emmène jusqu’en 2023, année du centenaire de la République. Plus que jamais, le dirigeant se pose en fondateur de ce qu’il appelle « la nouvelle Turquie », un régime où l’état d’urgence est devenu le droit commun.