Mauritanie : l’un des jihadistes évadés est une fois passé par le Sénégal

 Quatre jihadistes, dont un condamné à mort qui s’était déjà évadé par le passé, se sont échappés dimanche soir d’une prison de Mauritanie après un échange de tirs qui a fait deux morts parmi les forces de sécurité, ont annoncé les autorités.

Cette évasion intervient dans un pays qui, dans un ouest sahélien de plus en plus touché par les violences jihadistes, fait figure d’exception car épargné par les attentats depuis 2011, et de modèle en termes de prévention de ces conflits. « A 21H00, ce 5 mars 2023, quatre terroristes ont réussi à s’évader de la prison centrale de Nouakchott après avoir agressé les gardiens, ce qui a entraîné un échange de tirs au cours duquel deux membres de la Garde nationale » sont morts et deux autres ont été légèrement blessés, a indiqué le ministère de l’Intérieur dans un communiqué. L’identité des fugitifs n’a pas été divulguée officiellement mais un haut responsable de la Garde nationale a affirmé à l’AFP que deux d’entre eux étaient condamnés à mort pour « action terroriste » et que les deux autres étaient en attente de jugement pour appartenance à une organisation terroriste.
 Selon la même source, l’un des évadés est Saleck Ould Cheikh, un jihadiste condamné à mort en 2011 après un attentat à la voiture piégée mené par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) contre le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz. M. Ould Cheikh s’était déjà échappé de la prison centrale de Nouakchott le 31 décembre 2015 avant d’être arrêté en Guinée et renvoyé en Mauritanie après trois semaines de cavale où il était passé par le Sénégal et la Guinée Bissau. Le second condamné à mort avait participé à des opérations contre l’armée dans le nord en 2005, assure le haut responsable de la garde nationale.
 Le véhicule des fugitifs a été retrouvé dans le nord-est de Nouakchott, a aussi ajouté le responsable militaire. La peine de mort n’est plus appliquée depuis 1987 en Mauritanie. Traque La Garde nationale traque les fugitifs, a aussi assuré le ministère, qui a lancé un appel à témoins auprès des citoyens pour permettre leur arrestation « au plus vite ». Lundi, les axes autour de la prison, bouclés la veille au soir, étaient à nouveau ouverts. Le quartier avait retrouvé son calme, sans renforcement policier apparent, a constaté un journaliste de l’AFP. Tandis que le Mali frontalier compte ses morts depuis qu’une insurrection jihadiste a débuté en 2012, la Mauritanie, quatre millions d’habitants, n’a pas connu d’attaque sur son sol depuis 2011.
 Elle était pourtant régulièrement ciblée par ces mouvements dans les années 2000, notamment des attentats et des enlèvements ciblés. La Mauritanie fait partie avec le Burkina Faso, le Niger et le Tchad du G5 Sahel, que le Mali a quitté en 2022, et de sa force conjointe antijihadiste soutenue par la France, les Etats-Unis et l’ONU. Paris revendique avec Nouakchott une importante coopération de sécurité et de défense, en plus du développement. La coopération des populations pour lutter contre le jihadisme permet notamment de préserver le pays du jihadisme, contrairement à ses voisins sahéliens. Les autorités mauritaniennes investissent également dans la formation et travaillent à fidéliser les soldats par des budgets renforcés, des nouveaux équipements, des salaires versés à la banque ou un accompagnement social. Repentir et réinsertion La Mauritanie prône aussi le dialogue pour gagner la bataille des esprits. Dès 2010, un dialogue a été organisé entre les principaux oulémas et environ 70 jihadistes en prison, dont une cinquantaine ont été convaincus de se repentir.
Parmi eux, certains ont été envoyés à la télévision ou dans les mosquées, pour prêcher auprès des jeunes que le jihad n’est pas la bonne voie. Plus de 500 imams ont été recrutés, et les jeunes sortis des mahadras (écoles coraniques) se voient offrir une formation professionnelle. Plus récemment, en 2022, le président mauritanien Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani a gracié huit prisonniers condamnés pour « terrorisme » dans une logique de « lutte » contre l’extrémisme par le « dialogue », selon l’agence officielle d’information. La Mauritanie a à plusieurs reprises organisé des séances de dialogue avec ses prisonniers jihadistes, depuis l’ex-président Mohamed Ould Abdel Aziz (au pouvoir 2008 à 2019), pour obtenir leur repentir et les réinsérer dans la vie sociale.

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