«La France est intervenue militairement au Tchad pour éviter un coup d’État». C’est ce qu’a déclaré hier, mardi 12 février, Jean-Yves Le Drian. Le chef de la diplomatie française s’exprimait lors de la séance des questions d’actualité à l’Assemblée nationale. C’est la 1ère fois que les autorités françaises parlent de coup d’État à propos de l’intervention de la semaine dernière. Rappellons que des avions de l’opération française Barkhane ont bombardé, au Tchad, pendant plusieurs jours, une colonne de l’UFR, le groupe rebelle de Timane Erdimi.
Interpellé hier à l’Assemblée nationale par le député Jean-Michel Clément du groupe Libertés et Territoires, Jean-Yves Le Drian est notamment revenu sur le contexte dans lequel le gouvernement a décidé d’employer la force armée contre la rebellion de l’UFR.
Pour le ministre des Affaires étrangères, il s’agissait d’empêcher un « coup d’Etat ». « Il y a eu une attaque d’un groupe rebelle venu du Sud libyen, qui est déstabilisé, pour prendre le pouvoir par les armes à Ndjamena et le président Déby nous a demandé par écrit une intervention pour éviter ce coup d’Etat venu du Sud libyen et pour protéger son propre pays.
Ceci est tout à fait conforme au droit international et le Premier ministre en a informé le président du Sénat et de l’Assemblée nationale ».
Jean-Michel Clément dénonce un « mélange des genres »
A la sortie de cette réunion des questions au gouvernement, le député Jean-Michel Clément (du groupe Libertés et Territoires) n’était pas vraiment satisfait par la réponse du ministre. Il questionne notamment la doctrine avancée pour justifier l’intervention française. « Réponse habile, mais elle ne correspond pas, bien évidemment, à nos attentes. La vraie question, quand même, qui est posée derrière – vous l’avez compris -, c’était de connaître les vraies intentions de l’intervention de la France, nous explique Jean-Michel Clément.
Je ne comprends pas bien que l’on ait d’un côté une force G5 qui est censée coordonner les actions de défense dans cette région de l’Afrique et de l’autre côté qu’il y ait des initiatives individuelles de la part du pays qui est censé coordonner les opérations. Il y a un mélange des genres qui n’est pas très rassurant pour les pays dans lesquels nous sommes présents. J’ai presque envie de dire que ça nous rappelle un peu le passé où la France avait quelques interventions qui étaient faites au soutien de causes parfois discutables… »
Youssouf Hamid: il faut revoir les accords de coopération
Youssouf Hamid, le porte parole de l’UFR, dénonce lui plutôt « une ingérence ». Ce mercredi, Jean-Yves Le Drian doit être entendu par la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale. Youssouf Hamid espère que les parlementaires français vont jouer leur rôle. « Le fait de dire que le gouvernement tchadien a fait une demande d’intervention ne suffit pas ! Sur quelles bases elle est intervenue ?, interroge Youssouf Hamid. Le Parlement c’est le peuple… Et nous, on veut que le peuple français sache ce qui se passe ailleurs, en dehors de la France, ce que les militaires français faisaient à l’extérieur du pays. Est-ce que c’est des forces de maintien de la paix, des forces qui aident ici et là, ou bien, des forces d’ingérence dans les problèmes internes d’un pays bombardé ?
Donc il faut aller vers l’aspect juridique. Nous, ce qu’on attend des parlementaires français, c’est qu’ils revoient ces accords dits de coopération. Et puis, voir dans quelle mesure stopper toutes ces ingérences militaires. Ce qu’on leur demande c’est ça ! »
Jean-Yves Le Drian est ce mercredi en fin de journée, devant la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale, où la question de l’intervention française sera une fois de plus évoquée par les députés.
Rfi