L’ancien avocat du président américain témoigne ce mercredi 27 février devant la commission de contrôle de la Chambre des représentants. Condamné à trois ans de prison, notamment pour avoir menti devant le Congrès, Michael Cohen a fourni à la commission plusieurs documents dont la copie de deux chèques signés par Donald Trump après son élection pour rembourser les sommes versées à deux femmes afin d’acheter leur silence sur leurs supposées liaisons avec lui.
Dans sa déclaration préliminaire, l’ancien avocat du président livre un portrait au vitriol de l’homme qu’il a servi pendant plus d’une décennie et exprime le regret de l’avoir servi. « Je regrette le jour où j’ai dit oui à M. Trump », a expliqué Michael Cohen.
« Je regrette toute l’aide et le soutien que je lui ai apportés en cours de route. J’ai honte de mes propres manquements et j’en ai publiquement accepté la responsabilité en plaidant coupable dans le district sud de New York. J’ai honte de ma faiblesse et de ma loyauté déplacée – des choses que j’ai faites pour M. Trump afin de le protéger et de le promouvoir. J’ai honte d’avoir choisi de participer à la dissimulation des actes illicites de M. Trump plutôt que d’écouter ma propre conscience. J’ai honte, parce que je sais qui est M. Trump. C’est un raciste. C’est un escroc. C’est un tricheur. »
Mais celui qui se disait autrefois prêt à prendre une balle pour Donald Trump ne s’arrête pas là. Michael Cohen brosse le portrait d’un homme sans scrupule : « Monsieur Trump est une énigme. Il est compliqué, tout comme moi. Il est à la fois bon et mauvais, comme nous tous. Mais le mal l’emporte de loin sur le bien. Et depuis qu’il a pris ses fonctions, il est devenu la pire version de lui-même. Il est capable d’être aimable, mais il n’est pas aimable. Il est capable de commettre des actes de générosité, mais il n’est pas généreux. Il est capable d’être loyal, mais il est fondamentalement déloyal. »
« Il s’est présenté aux élections pour faire de sa marque une grande marque, pas pour faire de notre pays un grand pays, poursuit son ancien avocat. Il n’avait ni le désir ni l’intention de diriger cette nation – seulement de se vendre lui-même et de bâtir sa richesse et son pouvoir. Monsieur Trump disait souvent : « Cette campagne sera la plus grande opération marketing de notre histoire ». Il ne s’attendait pas à gagner les primaires. Il ne s’attendait pas à gagner les élections. La campagne, pour lui, a toujours été une opportunité de faire de la publicité. »
Documents à charge
Michael Cohen n’est pas venu les mains vides devant la commission, commente notre correspondante à Washington, Anne Corpet : il apporte notamment la copie des chèques que le président a rédigés après son accession à la Maison Blanche pour le rembourser des sommes versées à deux femmes qui assuraient avoir eu une liaison avec lui.
Michael Cohen assure par ailleurs que Donald Trump savait que WikiLeaks allait sortir les courriels piratés d’Hillary Clinton et qu’il s’en était réjoui.
Sous le feu des accusations des républicains qui ne cessent de rappeler qu’il a menti sous serment par le passé, et qu’il s’apprête à purger une peine de trois ans de prison, l’ancien avocat lève les yeux au ciel et répond : « J’ai menti pour protéger Donald Trump, ceux qui aujourd’hui le suivent aveuglément souffriront comme moi des conséquences. J’ai tout perdu. Le prix à payer est énorme. »
« Soupçons » sur une collusion avec la Russie
L’ex-avocat personnel de Donald Trump a également expliqué qu’il n’avait pas de preuves sur une éventuelle collaboration entre l’équipe de campagne du candidat républicain et la Russie en 2016, mais qu’il suspectait l’existence d’une collusion. « On s’est demandé si j’avais connaissance de preuves directes démontrant que M. Trump, ou son équipe de campagne, avaient comploté avec la Russie. Je n’en ai pas. Je veux être clair. Mais j’ai des soupçons », a-t-il déclaré.
A l’issue des débats, le président de la commission, le représentant démocrate Elijah Cummings, a parlé d’une journée cruciale pour les Etats Unis : « Aujourd’hui était une journée très importante. Nous nous sommes tellement éloignés de la norme dans ce pays, nous devons nous recentrer, et je pense qu’aujourd’hui c’était l’occasion de tenter de faire cela. C’est un combat pour l’âme de notre démocratie. Nous avons eu beaucoup de critiques comme vous l’avez entendu sur le fait que Michael Cohen se présente devant notre commission, mais regardez ce à quoi nous sommes confrontés : depuis deux ans, personne ne rend des comptes. Et tout ce que nous essayons de faire, c’est notre travail. Nous devons assurer l’équilibre des pouvoirs avec l’exécutif. C’est de cela dont il s’agit. Monsieur Cohen est venu et ce qu’il a fait en gros, c’est présenter au peuple américain l’homme qu’il connaît depuis dix ans. Et je pense qu’il a dit la vérité. »
Rfi