Le remaniement tant attendu, et qui a vu un changement en profondeur de l’attelage gouvernemental aura eu le mérite de permettre une meilleure lisibilité de la stratégie du président pour gouverner durant ces cinq prochaines années.
En effet à part les cadors Abdoulaye Daouda Diallo, Ali Ngouille Ndiaye, Me Sidiki Kaba et Amadou Ba, tous ceux qui étaient considérés comme intouchables ont été dégommés : Ismaela Madior Fall, Mary Teuw Niane, Souleymane Jules Diop, Seydou Gueye et la liste est loin d’être exhaustive.
Le président Macky Sall avait annoncé la couleur lors de sa prestation de serment pour son second mandat,en annonçant qu’il s’attèlerait à mettre en place une équipe choc qui aura la lourde mission de résoudre le problème de l’emploi (les jeunes lui ont envoyé un signal fort lors de la présidentielle passée), qui est une épine sous son pied, il a aussi promis de mettre fin à la lourdeur des procédures administratives qui a toujours été un écueil pour le bon fonctionnement de l’administration, et en même temps il s’est montré résolu à attaquer l’incivisme et le manque de discipline qui freinent l’émergence de ses actions.
Le remaniement aura tenu toutes ses promesses avec la nomination de technocrates ayant fait leurs preuves ailleurs, un attelage plus resserré pour l’instant, et la nomination au poste de ministre du pétrole et de l’énergie de l’efficace DG de la SENELEC Mouhamadou Mactar Cissé, qui il faut le dire bénéficie d’un aura particulier auprès des citoyens sénégalais de par son effacement et son efficacité qui ne s’embarrasse pas de considérations politiciennes. Sauf bémol lors de ce remaniement, la nomination de Cheikh Oumar Hanne ex dg du coud qui a été épinglé par les services de l’OFNAC, une nomination au poste de ministre de l’enseignement supérieur qui passe mal aux yeux de l’opinion publique qui s’attendait à voir Mary Teuw Niane rempiler à nouveau à cause de ses résultats. Mais comme le chef d’état reste la personne la plus informée du pays, peut-être qu’il agit en connaissance de cause.
L’autre fait de ce remaniement reste la volonté du président de brider les ambitions présidentielles de ses principaux lieutenants en décidant purement et simplement de supprimer le poste de premier ministre.En filigrane la suppression de la primature permettra au chef de l’état de reporter la guerre de sa succession afin que les ministres se concentrent sur les priorités du moment à savoir bâtir un Sénégal nouveau. Mais il n’est pas exclu qu’il ressuscite ce poste à la fin de son mandat afin de positionner son dauphin, qui pour le moment semble être Boun Abdallah Dionne, et peut être qu’on assistera à un scénario a la russe (à la fin de ses deux mandats, Poutine avait laissé la place à son premier ministre Medvedev, qui est devenu président et avait nommé Poutine premier ministre avant de s’effacer pour lui rendre son poste de président).
Le président Macky Sall est un génie politique et rare sont ceux qui voient venir ses coups, il a carrément plié le jeu. Il sait que ses opposants ont un contentieux avec lui et que si par malheur, il est remplacé par l’un d’entre eux, son frère et certains de ses ministres feront l’objet d’une chasse aux sorcières. Alors prendra-t-il le risque de laisser le pouvoir à ses opposants ? Non. La présidentielle de 2024 sera assurément la mère de toutes les batailles.
Toumany Etienne Camara : Actuvision