L’idée a été agitée de décider la prorogation du mandat des députés de deux ans, par consensus et par concertation avec le cumul de l’élection présidentielle et des élections législatives.
Il se susurre que cette prorogation fera l’objet de débat lors des concertations nationales qui seront organisées incessamment.
Il s’agit, grosso modo, de trouver un consensus politique autour de la prorogation des élections législatives que la loi électorale fixe à 2022.
Nous pensons en effet que ce débat est malsain. Nous sommes de ceux qui soutiennent que le calendrier républicain est sacré, notamment pour ce qui concerne des élections aussi importantes que celles des députés.
J’ai profité de l’occasion de cette chronique pour jeter un coup d’œil sur la Constitution pour ce qui concerne l’Assemblée nationale. Et nous n’avons vu nulle part mentionné que l’Assemblée peut, elle-même, par le vote d’une loi, proroger le mandat des députés qui la composent.
La Constitution stipule en son article 49 que ‘’Les députés à l’Assemblée nationale sont élus au suffrage universel et direct. Leur mandat est de cinq ans’’.
C’est dire que la Constitution ne prévoit, à ce niveau, aucune possibilité de proroger le mandat des députés. Le texte fondamental a verrouillé, à ce niveau.
Et si ce n’est pas possible par une loi, ça ne le sera pas par un décret. Il est impensable que le Président de la République, puisse, un seul instant, provoquer cette prorogation par décret.
En conséquence, il n’y a pas un quelconque consensus sur la question qui tienne. Le débat ne devrait même pas être posé. Et pour cause !
Dans notre architecture institutionnelle, nous avons consacré le principe sacro-saint de la séparation des pouvoirs. L’Assemblée nationale étant un pilier important de cette architecture, l’Exécutif, qui ne pense à aucun moment proroger le mandat de son Chef, ne saurait décider de le faire pour les députés sur lesquels il n’a, en principe, aucune emprise.
Toute prorogation du mandat serait une violation flagrante de l’article 49 de la Constitution.
La démocratie a un prix. Mettre en avant le coût des élections pour débattre sur une violation possible de la Constitution est anti-démocratique. Le calendrier républicain doit être respecté par tous, parce qu’il s’impose à tous.
On comprend maintenant que le Président de la République n’ait pas envie de devoir se soumettre au diktat d’une opposition parlementaire hostile qui bloquerait le vote des lois, notamment budgétaires pouvant l’empêcher de gouverner en cas de renversement de majorité au Parlement.
La situation de blocage institutionnel qui sévit depuis deux ans en Guinée Bissau donne des frayeurs quand, dans un pays, le Président de l’Assemblée nationale sait qu’il peut empêcher le Président de la République de gouverner.
La crainte d’une forme de cohabitation peut habiter certains partisans du pouvoir soucieux de réserver leurs ‘’munitions’’ pour la présidentielle de 2024.
Mais, ce n’est pas là une raison. Si on se mettait à discuter de tout pour trouver des consensus sur tout, on en arriverait à une situation où lois et institutions seraient mises en veilleuse au profit des desideratas de certains.
Qui plus est, ce serait une façon de trahir la volonté populaire, étant entendu que le peuple n’avait élu les députés que pour un mandat de cinq ans et non de sept.
Cela dit, on peut réduire son mandat, ne serait-ce que par démission, mais, pas l’augmenter. Ce ne serait pas acceptable, même si, par ailleurs, dans l’histoire récente du Sénégal, cela avait déjà été fait. C’était en 2005 sous le régime de Abdoulaye Wade. Et pourtant, même à cette époque, l’opposition avait rejeté fortement le projet et avait même décidé, finalement, de quitter la salle.
Voici, pour rappel, les arguments avancés par certains leaders de l’opposition de l’époque qui sont aujourd’hui, dans le régime de Macky Sall : ‘’ Amath Dansokho y voyait les signes d’un pays qui s’embrase et estime que « nous payerons très cher ce que nous sommes en train de faire ». Le Premier Secrétaire du Ps, Ousmane Tanor Dieng, semblait lui donner raison en soulignant que ce projet de loi est une forfaiture, fruit de la manipulation qui fait appel à des arguments fallacieux pour justifier l’injustifiable. Madieyna Diouf de l’Afp y voyait les intérêts égoïstes d’un parti traversé par une crise profonde et qui veut sauver sa peau’’.