Dans sa livraison de ce mardi, 09 octobre 2019, le quotidien français L’Equipe, revient sur quelques confidences tirées de l’audition par le juge français Renaud Van Ruymbeke, de l’ancien président de l’IAAF, le Sénégalais Lamine Diack. On y apprend que l’ex maire de Dakar (de 1978 à 1980), aujourd’hui âgé de 83 ans, y révèle ses regrets d’avoir laissé son « fils et d’autres » agir sans contrôle.
Lamine Diack, l’ancien président de l’IAAF, entendu en juin par le juge Van Ruymbeke, a affirmé découvrir, à la lecture du dossier, les pratiques supposées de son fils Papa Massata, consultant en marketing auprès de la Fédération internationale.
Il n’avait plus répondu à la justice française depuis près de trois ans et sa mise en examen dans la première affaire de corruption mise au jour au sein de la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF), en lien avec la dissimulation de cas de dopage d’athlètes russes. Lamine Diack, 86 ans, ex-patron de l’IAAF (jusqu’à l’été 2015), a été interrogé, le 19 juin dernier, par le juge d’instruction parisien Renaud Van Ruymbeke.
D’emblée, le magistrat rappelle que Papa Massata Diack (PMD), fils de Lamine Diack, avait reçu d’importantes sommes d’argent à l’occasion de votes du CIO pour les Jeux Olympiques et de l’IAAF pour les Championnats du monde, « sans réaliser la moindre prestation », au titre de consultant de l’IAAF. Selon un décompte du magistrat instructeur, PMD a ainsi perçu « entre 2009 et 2013, via ses sociétés près de 11 M$ (environ 6,5 milliards F CFA) ». Pour l’ancien président de l’IAAF, cette somme correspond à du « lobbying ».
MON FILS FAISAIT DU LOBBYING
« Je savais qu’il faisait du lobbying, comme Sebastian Coe, explique Lamine Diack. Mon fils était un des meilleurs au monde en matière de marketing. » Un consultant dont l’attitude a « choqué » dès 2004 Helmut Digel, alors vice-président de l’IAAF, en charge des commissions du marketing et des droits télévisés. Entendu comme témoin, en mars dernier, par le juge Van Ruymbeke, ce professeur de sociologie à la retraite lui raconte un épisode lié à la candidature de Stuttgart (Allemagne) pour l’organisation de la Coupe du monde des nations d’athlétisme en 2006 (attribuée à Athènes, Stuttgart se contentant de feue la finale mondiale).
A l’époque, PMD demande une « série de paiements », pour un total de 370 000 euros (environ 243 millions F CFA), pour soutenir la candidature de la ville allemande. Face à ces demandes, le maire de la ville avait répondu que c’était « de la folie ». Helmut Digel a remis à la justice française des documents dans lesquels le fils de Lamine Diack détaille ses demandes financières. L’ancien vice-président de l’IAAF alerte alors Diack père sur le « comportement » de son fils. Il évoque la tenue d’une réunion, en février ou mars 2005, dans un hôtel de Monaco afin de mettre un terme à ces agissements.
« Le président Lamine Diack était choqué et énervé et a dit à son fils que si un tel documnt était rendu public, c’en serait fini de lui comme président, relate Digel dans son audition devant Renaud Van Ruymbeke. Il lui a interdit à l’avenir d’entreprendre une telle action tout seul. Nous avons convenu que l’agence Pamodzi (une des sociétés de Papa Massata Diack) ne pourrait intervenir que si elle était missionnée pour cela. »
« J’AURAIS DÛ SURVEILLER MON FILS ET D’AUTRES… »
Pour autant, Papa Massata va poursuivre son travail pour le compte de l’IAAF. Interrogé sur cette demande d’argent ardressée par son fils à la ville de Stuttgart, son père prendre sa défense en arguant que « M. Digel raconte des histoires ». « C’est lui qui avait tout pouvoir, détaille-t-il. On a eu cette réunion. Cela m’a choqué, mais c’était Digel qui était entièrement responsable. […] Mon fils dépendait de M. Digel. […] Digel aurait pu mettre fin à toute collaboration avec lui, il ne l’a pas fait […] J’ai dit à mon fils que c’était une connerie […] Après coup, je me dis que j’aurais dû plus surveiller mon fils et d’autres. En lisant le dossier, je découvre certaines choses, je tombe des nues. »
Renaud Van Ruymbeke questionne Diack sur l’attribution des Mondiaux 2017 et 2019. « Le Qatar disait qu’il apporterait un sponsor, la Qatar National Bank, qu’il allait faire des pistes d’athlétisme dans plusieurs pays et payer des primes aux athlètes à la place de l’IAAF, détaille Lamine Diack. Moi, j’étais pour Londres. J’ai donc demandé à Sebastian Coe d’appeler le ministre britannique pour qu’ils prennent en charge les primes des athlètes pour gagner. […] Doha était persuadé qu’ils allaient gagner puisqu’ils apportaient la Qatar National Bank, 30 millions d’euros (environ 20 milliards F CFA), payaient les athlètes 7,5 millions (environ 5 milliards F CFA) et créaient 12 pistes. Avant le vote, le Qatar ne s’est pas proposé pour 2019, ils voulaient 2017. J’aurais pu dire au moment du vote qu’on réservait 2019 au perdant, mais le Qatar n’en voulait pas. »