La Tunisie face au défi de former un gouvernement sans majorité parlementaire

Désormais investi président, Kaïs Saïed doit charger le parti ayant le plus de sièges à l’Assemblée de former un gouvernement dans un délai d’une semaine après la proclamation des résultats définitifs des législatives.

Alors que l’annonce des résultats définitifs devrait avoir lieu mi-novembre, les négociations sont déjà entamées au sein des partis. La tâche n’est pas aisée, car il n’y a pas de majorité parlementaire.

Ennahdha, le premier parti au Parlement, doit atteindre la majorité de 109 députés, pour assurer un vote favorable à son gouvernement. Le parti n’a que 52 sièges, et doit donc trouver des alliés. Il gère pour le moment les refus de plusieurs partis à participer à son futur gouvernement.

L’autre problème repose sur le choix du chef du gouvernement. L’organe décisionnel du parti, le Conseil de la Choura a décidé de proposer comme candidat une personnalité issue d’Ennahda qui pourrait être le leader actuel du parti, Rached Ghannouchi. Mais il était question qu’il brigue plutôt la présidence de l’Assemblée.

Pour des partis de l’opposition comme le Courant démocrate, un chef du gouvernement nahdaoui sera automatiquement refusé par la majorité des députés. Le torchon brûle d’ailleurs entre les deux partis qui avaient entamé des négociations. Elles sont au point mort depuis que le Courant démocrate a revendiqué des ministères clefs tels que celui de la Justice et de l’Intérieur.

L’opposition de Qalb Tounes

Ennahda met aujourd’hui en avant l’importance de trouver un accord sur un programme au-delà des personnes. Mais avec ce paysage politique très fragmenté et plusieurs oppositions tenaces comme celle du parti Qalb Tounès (Au cœur de la Tunisie), qui dispose de 38 sièges, Ennahda risque de faire face à un Parlement ingouvernable.

Alors que les tractations et les rumeurs sur de possibles alliances se multiplient, cette jeune formation politique, créée en juin dernier par l’homme d’affaires controversé Nabil Karoui, tente de se placer au-dessus de la mêlée.

« On se positionne dans l’opposition », indique un collaborateur de Karoui, écartant l’idée de faire de la « politique politicienne ». « L’urgence pour nous, poursuit ce responsable, est de trouver une solution pour le pays, former un gouvernement d’union nationale, autour d’un programme qui donne la priorité à la lutte contre la pauvreté et à la crise sociale ». Deux thèmes de campagne, que Nabil Karoui entend imposer dans l’hémicycle.

Mais depuis sa défaite à la présidentielle, Nabil Karoui se fait discret. Au lendemain du scrutin, cet homme d’affaires avait annoncé sa disponibilité à travailler avec le nouveau président, sans donner plus de détails. Sur le plan judiciaire, l’enquête pour évasion fiscale et blanchiment n’est pas close: Nabil Karoui doit être en mesure de répondre à toute convocation de la justice.

Rfi