Tout au long du forum sur la paix et la sécurité de Dakar, les critiques se sont fait entendre contre l’ONU et la Minusma. Les présidents sénégalais et mauritanien ont appelé tour à tour les Nations unies à se réformer et ont réclamé un mandat renforcé pour la mission de l’ONU au Mali. Une demande récurrente ces dernières années alors que la Minusma peut en réalité déjà avoir recours à la force si nécessaire.
Ce possible usage de la force est consacré par le chapitre 7 de la charte des Nations unies, accordée à la Minusma dès sa création en 2013. Mais face à une situation sécuritaire qui ne cesse de se dégrader, le Conseil de sécurité de l’ONU va décider de lui accorder trois ans plus tard un mandat «plus robuste» en l’autorisant à utiliser « tous les moyens nécessaires » pour accomplir sa mission. Ainsi, est-il précisé dans le texte de la résolution, la Minusma peut «anticiper et écarter les menaces » et « prendre activement des dispositions musclées pour contrer les attaques asymétriques dirigées contre des civils». De fait, le mandat de la Minusma est le plus vaste jamais confié à une mission onusienne.
Si théoriquement la mission a donc la possibilité d’intervenir, en pratique elle ne le fait guère car selon Arthur Boutellis, conseiller senior à l’International Peace Institute, elle n’est pas configurée pour le combat, en raison notamment, d’un déficit en terme de renseignement tactique.
Un mandat de contre-terrorisme pour la Minusma ?
Mais au-delà de l’aspect technique, il y a aussi et surtout, un questionnement politique. Une force de maintien de la paix comme la Minusma a-t-elle vocation à faire du contre-terrorisme ? Car c’est ce qu’on lit entre les lignes des déclarations du président sénégalais Macky Sall, et de son homologue mauritanien Mohamed Ghazouani. Mais, dans la charte de l’ONU, le contre-terrorisme n’est en aucun cas l’objet d’une mission de maintien de la paix et élargir à ce point le mandat de la Minusma serait un saut conceptuel que ne seraient pas prêtes à faire ni la Chine, ni la Russie, très soucieuses de conserver les limites du champ d’action des Nations unies, précise notre correspondante à New York, Carrie Nooten.
A l’ONU on se demande aussi s’il était utile d’aller plus loin. L’opération Barkhane et la force conjointe du G5 Sahel sont justement tout deux mandatées pour effectuer ces missions spéciales, débusquer et traquer les terroristes. Les compétences en matière de renseignement, de coordination aux frontières ne sont pas celles auxquelles les casques bleus sont formés. Les membres du Conseil de sécurité tiennent justement une réunion sur le G5 Sahel ce mercredi à New York.
La plupart partagent la position du secrétaire général Antonio Guterres, et réclament que la Force G5 Sahel prenne plus d’importance, que son dispositif prenne de l’ampleur. Près de la moitié des 414 millions d’euros promis au lancement de la force ont déjà été versés.