La suite du procès du général Jean-Marie Michel Mokoko à Brazzaville. L’ex-candidat à la présidentielle comparaît pour « atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat » et « détention illégale d’armes et munitions de guerre ». Ce mardi, le procureur a commencé à présenter les pièces sous scellés. L’accusé nie les faits qui lui sont reprochés, ses avocats ont plusieurs fois dénoncé une « parodie de justice sans preuve ». Tous refusent désormais de répondre aux questions du juge et donc de commenter les éléments soumis à la Cour. Le procureur, lui, entend démontrer que la candidature du général Mokoko à la présidentielle n’était qu’un « prétexte » et que son but était en fait de « prendre le pouvoir par la force ».
Les accusations se fondent d’abord sur une vidéo qui date de 2007, mais qui avait étrangement ressurgi en pleine campagne présidentielle en 2016. On y voit notamment le général Mokoko, face caméra, répéter un hypothétique discours à la nation en cas de prise de pouvoir. A l’époque le candidat à la présidentielle avait parlé d’un « piège ».
Le général est également accusé d’avoir en 2006-2007 noué des contacts avec des « mercenaires », en France et en Côte d’Ivoire. Plus inattendu et plus récent, une commission rogatoire au Gabon aurait révélé, selon l’accusation, qu’au moment de la présidentielle de 2016, trois Français, présentés eux aussi comme des « mercenaires », mais absents du procès, auraient été positionnés à Libreville, pour préparer un « assaut sur Brazzaville ». L’accusation évoque des conversations qui auraient été interceptées par les services secrets entre ces mercenaires et le général Mokoko, mais aussi le pasteur Ntumi. Aucune preuve en ce sens n’a encore été présentée au procès.
Il y a enfin la question des armes et munitions qui auraient été retrouvées au domicile de l’accusé, ce que des témoins présents lors des perquisitions ont nié. « Onze fusils d’assaut, treize grenades, (…) trois caisses de munition, des portes-ceinture avec grenade, et vingt chargeurs garnis » soit « plus » assure l’accusation que ce qui est autorisé même pour un général. Lorsque les gendarmes les ont apportés en salle d’audience, Jean-Marie Michel Mokoko, silencieux, a tout de même affiché un sourire incrédule.
Les avocats du Général, pour qui cette procédure est illégale et « politique », refusent désormais de commenter ces accusations aussi bien à l’audience qu’à la presse. Par ailleurs, mardi, l’expert en armement qui devait préciser le détail des armes présentées par le procureur a refusé de le faire. « J’ai reçu ordre de ma hiérarchie de ne pas intervenir à ce stade », a-t-il expliqué. L’audience a alors été suspendue et doit reprendre ce mercredi matin.
■ Des coaccusés absents du procès
Le général Mokoko comparait seul à la barre. Il y a pourtant huit accusés dans le ce dossier, inculpés pour « atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat ». Le plus connu d’entre eux, et le seul Congolais, c’est Gilbert Moudilou. Un personnage perçu à Brazzaville comme « versatile ». Il serait « libre, mais placé sous contrôle judiciaire », selon les éléments contenus dans le dossier.
Lors de l’une de ses rares interventions lundi, le général Mokoko s’est étonné de son absence. Car il est accusé d’avoir joué un rôle-clé dans l’affaire de la vidéo tournée en 2007, celui d’intermédiaire entre le général et les trois supposés mercenaires français. Ces trois Français figurent d’ailleurs sur la liste des coaccusés : Sylvain Maier, avocat, c’est dans son bureau que la vidéo a été tournée, en présence des deux autres ; Jean-Paul Ney, journaliste controversé ; et un certain Jean-François Casé. Les trois derniers coaccusés eux auraient séjourné à Libreville pendant la présidentielle congolaise de 2016, à en croire l’acte d’accusation.
C’est depuis la capitale gabonaise qu’ils auraient préparé « assaut sur Brazzaville ». Tous sont présentés comme « en fuite », mais sous le coup de mandats d’arrêt internationaux. Une version de l’histoire qu’il sera difficile de confronter au cours de ce procès en leur absence et alors que la défense du général Mokoko, qui conteste la procédure, a décidé de garder le silence.
RFI