Lors du sommet entre la Chine et l’Union européenne (UE), les chefs de l’UE, la chancelière allemande et le président chinois Xi Jinping vont tenter lundi 14 septembre par visioconférence de faire avancer les négociations d’un accord sur les investissements, sur fond de tensions autour de Hong Kong, de Taïwan et du Xinjiang.
Avec nos correspondant à Bruxelles et à Pékin,
Covid-19 oblige, le sommet extraordinaire entre l’Union européenne (UE) et la Chine prévu à Leipzig en Allemagne a dû être annulé. C’est donc par visioconférence ce lundi 14 septembre que les dirigeants européens auront l’occasion de s’entretenir avec le président chinois Xi Jinping.
Du côté de l’Union européenne, les échanges seront présidés par Charles Michel, à la tête du Conseil européen, la présidente de la Commission Ursula Von der Leyen et la chancelière allemande Angela Merkel, dont le pays assure en ce moment la présidence.
Coopérer et être ferme pour l’UE
L’objectif de cette rencontre est d’abord commercial. Les participants souhaitent faire avancer l’accord sur les investissements, négociés déjà depuis sept ans. Ce qui permettra pour les entreprises européennes d’accéder au marché chinois avec des règles de concurrence équitables. L’espoir est que ce sommet permette de dégager une feuille de route claire menant à un accord d’ici la fin de l’année.
Coopérer là où c’est possible, être ferme là où c’est nécessaire. Les Européens se sont trouvé une ligne de conduite en forme de slogan, rapporte notre correspondant à Bruxelles, Pierre Benazet. Ce sommet virtuel sera d’ailleurs l’occasion de graver dans le marbre une avancée conséquente puisque sera signée à Pékin avec un représentant de l’Union Européenne (UE) un accord par lequel la Chine reconnaît les appellations géographiques protégées de l’Union.
C’est pour les Européens une preuve que les intérêts de l’UE peuvent progresser sur de vrais sujets et un signe aussi qu’il existe des leviers par lesquels il est possible pour l’Europe de peser sur les négociations.
La Chine ne veut pas d’une « Guerre froide » avec l’UE
Le message de Pékin reste le même : la Chine est attachée à l’indépendance de la politique européenne rappelle l’éditorial du Global Times ce matin, rapporte notre correspondant à Pékin, Stéphane Lagarde. L’Europe ne doit pas se laisser entrainer dans la « Guerre froide » voulue par les États-Unis comme l’avait martelée le ministre des Affaires étrangères chinois, Wang Yi, lors de son passage en Europe fin août. Sauf que ce message ne suffit plus…
En attendant, les médias d’État, en Chine, donnent leur vision d’un verre à moitié plein avec des articles sur l’implantation d’un laboratoire d’un géant français de cosmétique dans le sud du pays ou encore le fait que la Chine est devenue le plus grand marché d’exportation de l’Allemagne au deuxième trimestre avec en photo, un train cargo filant les rails de la soie depuis le Xinjian à l’ouest de la Chine jusqu’en Europe.
« Je t’aime, moi non plus »
Les négociations auront lieu en pleine période de tensions entre les deux puissances. « Je t’aime, moi non plus », c’est même ainsi que le chef de la diplomatie européenne Josep Borell décrit la relation entre Bruxelles et Pékin. Car les 27 sont désillusionnés. Tant de promesses n’ont pas été tenues comme celle sur le marché chinois qui n’est toujours pas ouvert. De plus, la Chine continue d’accorder des subventions massives à ses entreprises. Au point que Bruxelles commence à s’impatienter, exaspéré par les engagements non-tenus de Pékin, analyse Antoine Bondaz chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique.
Ce qui est très clair, c’est que sur les questions économiques qui sont au cœur de ce sommet, l’UE est exaspérée par les promesses vides faites par la Chine, exaspérée par les engagements non respectés par la Chine. Et va chercher désormais à imposer une réciprocité.
Mais d’autres questions plus délicates, comme les droits de l’Homme, risquent de s’inviter aux pourparlers.
Hong Kong et le Xinjiang
Le sommet du 22 juin avait déjà été marqué par un net refroidissement. D’autant que la présidente de la Commission Ursula Von der Leyen avait osé critiquer la loi sur la sécurité nationale qui restreint les libertés des Hongkongais. Pire encore, elle avait dénoncé les cyberattaques contre des hôpitaux européens pendant la pandémie.
Ce n’est donc pas un hasard si les deux émissaires de Pékin, Wang Yi et Yang Jieche, ont contourné Bruxelles lors de leur tournée européenne, croyant les capitales nationales plus dociles. Erreur de leur part, à chaque étape, ils ont été questionnés sur Hong Kong et le Xinjiang, où un million de musulmans croupissent dans des camps de redressement.
Outre les questions économiques, Xi Jinping devrait dont s’attendre à être interrogé par l’UE sur la situation hongkongaise, la question de Taïwan ou encore le sort des Ouïghours. Car l’UE n’est plus aussi frileuse face au géant chinois qu’elle l’a été pendant longtemps, estime Antoine Bondaz, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique.
L’Union européenne a exprimé de façon répétée ses graves inquiétudes vis-à-vis de la situation et on peut faire confiance à Ursula Van der Leyen pour « mettre les pieds dans le plat » et aborder ces questions extrêmement sensibles côté chinois.
Les Chinois pourraient aussi davantage tendre l’oreille concernant les objectifs climats de l’Union : le plafonnement des émissions du dioxyde de carbone et engagement sur l’arrêt des nouvelles centrales à charbon.
rfi