La journée du mardi 25 mai, a été celle des enfants disparus. Cependant rares sont ceux qui connaissent l’existence de cette journée destinée aux enfants disparus. Dans la ville de Dakar, les personnes interrogées sur ce phénomène devenu même une banalité pointent du doigt les parents et déplorent la situation des enfants talibés. Elles fustigent également l’attitude démissionnaire des parents et de l’Etat, car pour elles, aucun enfant n’a demandé à venir au monde.
Le 25 mai, un jour comme les autres. Sauf que cette date symbolise la journée des enfants disparus. Un phénomène devenu récurrent et qui ne semble émouvoir personne. Si dans les pays Européens, un enfant disparu crée une véritable onde médiatique, au Sénégal, ca semble être une banalité. Et pourtant, chaque jour, certaines chaines de télévision locale nous présente le visage de jeunes disparus sans que cela ne créée un raffut médiatique ou que les forces de l’ordre ne font de battues a la recherche des disparus.
Un épiphénomène.
Le mardi 25 mai, il fait sept heures. La journée débute par un vent frais. A l’entrée de la commune de Keur Massar, de jeunes talibés, pieds nus, occupent le trottoir. Ils ont chacun une boite de conserve destinée à recueillir l’aumône. Subitement, on les voit traverser la rue, courant dans tous les sens sans prêter attention aux voitures.
Une jeune dame distribuait des sachets de lait et du sucre. Interpellée sur la journée internationale des enfants disparus, une étudiante avoue son ignorance, mais déplore la situation des enfants de la rue.
« Dans ce pays, il n’y a aucune mesure de protection pour les enfants. Evidemment, la journée ne me dit rien, mais combien d’enfants disparaissent sans que rien ne soit entrepris pour les retrouver. Les seuls responsables sont les parents car aucun enfant n’a demandé sa venue sur terre. Donc les parents ont l’obligation de veiller sur les enfants ≫ confie la jeune étudiante en formation banque et finance.
L’Etat interpellé
Dans un car « Ndiaga Ndiaye » à destination de Grand Yoff, les échanges sont beaucoup plus vifs à l’évocation du sujet. Ahmed Tine est un étudiant en master 1. Juriste de formation, il aborde la notion de la responsabilité parentale.
Pour ce jeune étudiant, certes les parents sont responsables, mais également l’Etat qui est le garant de la sécurité des citoyens et qui a failli a sa mission.
Contrairement à l’étudiant, un vieil homme offre une ligne de lecture différente.
« Les enfants talibés font partie de notre culture. Si nous avons des sacrifices dictés par nos marabouts. C’est en ce moment que nous voyons leur importance. Ce qu’il faut déplorer, c’est la récurrence des disparitions à la veille des élections. Des forces occultes qui font la magie noire, promettent des merveilles aux hommes politiques et autres personnes » laisse entendre le vieil homme.
Le professeur de sociologie, Ousmane Ba, a une lecture plus large de la situation. Pour lui, ces disparitions renseignent sur les limites sécuritaires. A l’en croire, c’est l’Etat qui a le devoir régalien de protéger les habitants qui se trouvent dans son territoire surtout les enfants.
Le sociologue évoque également la société sénégalaise qui a connu une profonde mutation. Ce qui fait que les défis éducatifs sont énormes.
« Ce phénomène n’est pas nouveau dans le pays. Depuis les années soixante, un homme très célèbre et hyper riche avait la mauvaise réputation d’être membre d’un réseau. Très suspecté dans la disparition des enfants. Je ne confirme pas cette opinion, mais cela renseigne sur la mentalité et le comportement des gens », renseigne le professeur de sociologie.
Dans son approche sociologique, il met également l’accent sur la démission des parents. Pour ce professeur, les enfants qui disparaissent ne sont pas forcement des enfants talibés.
« Cette journée doit pousser les autorités et tous les responsables à protéger davantage les enfants, mais surtout les albinos. Car à l’approche des élections, ces enfants deviennent des cibles » dit il, appelant les parents a davantage se préoccuper de leurs enfants et ne pas les laisser dans la rue. Et ce même, si, déplore notre interlocuteur, les parents sont de plus en plus préoccupes par des questions existentielles.
Le Témoin