Le « Sommet sur la protection des mineurs dans l’Eglise », une rencontre très attendue, s’ouvre ce matin, jeudi 21 février, au Vatican. Quelque190 participants du monde entier vont se réunir pendant trois jours à Rome. Il s’agit d’un sommet international crucial pour l’Eglise, minée par les scandales d’agressions sexuelles sur mineurs.
Avec notre envoyée spéciale à Rome, Geneviève Delrue
C’est à la fin de l’été dernier, après les révélations d’un nouveau scandale de prêtres pédophiles aux Etats-Unis, que le pape François et son conseil des cardinaux ont décidé de convoquer une réunion internationale .
Ils sont 114 présidents des conférences épiscopales : 36 en provenance d’Afrique, 32 d’Europe, 24 des Amériques et 18 d’Asie. Ce sommet a été préparé en amont par un comité organisateur.
En décembre, les participants ont reçu un questionnaire pour évaluer leur prise de conscience sur cette question et il leur avait été demandé de rencontrer des victimes. Car après des décennies de déni et de silence, c’est bien d’une prise de conscience collective du drame des abus sexuels et de la responsabilité de chaque évêque dont il s’agit.
Chacun repartira avec une feuille de route pour mettre fin aux errances du passé, et savoir comment régler le cas d’un prêtre abuseur. Harmoniser cette prise de conscience au niveau mondial est un vrai défi. Mais il en va de l’avenir de l’Eglise.
France: plusieurs affaires de pédophilie dans l’Eglise ces dernières années
Depuis une vingtaine d’années, trois cas de pédophilie dans l’Eglise ont été particulièrement exposés médiatiquement en France. Il y a d’abord l’abbé Bissey à Lisieux, condamné en 2000 à dix-huit ans de réclusion pour pédophilie. Plus récemment, l’année dernière, c’est le père Pierre de Castelet, à Orléans, qui a été condamné à deux ans de prison ferme. Enfin, dernière grande affaire de pédophilie en date, celle du prêtre Bernard Preynat, du diocèse de Lyon. Il est accusé d’avoir violé des dizaines de jeunes scouts dans les années 1980.
Certains de ces agissements auraient même été couverts par le cardinal Barbarin dont le procès a eu lieu il y a quelques semaines, la décision est mise en délibéré.
Mais le dossier Preynat marque une rupture en France. Trente ans après les faits, des victimes du prêtres se sont retrouvées pour créer une association, « La parole libérée ». Et c’est justement la libération de cette parole des victimes de pédophilie depuis quelques années qui permet de dresser un tableau plus précis à l’échelle du pays. Aujourd’hui, le journaliste spécialiste du Vatican, Bernard Lecompte, estime à 8 ou 9 cas par an de prêtres pédophiles dans l’Eglise catholique.
RFI
«Les victimes ne vont plus se taire, personne ne pourra nous arrêter»
Un groupe de victimes d’agressions sexuelles s’est réuni mercredi 21 février avec les organisateurs du sommet de Rome pour exiger que justice soit faite. Parmi eux, un Chilien, Juan Carlos Cruz, une des principales victimes de l’ex-prêtre catholique Fernando Karadima. Il a confié ses attentes à RFI.
Propos recueillis par Paula Estañol
« On ne peut plus attendre. Soit les choses avancent maintenant, soit rien ne change. Car, en réalité, tout cela aurait dû être mis sur la table il y a bien longtemps. Je ne rejette pas la faute sur le pape mais sur les évêques. Car le pape dit une chose, et les évêques font autre chose, et veulent autre chose.
Désormais, la pression est sur les évêques et c’est à eux de faire ce qu’il faut. Je pense que le Chili est un modèle pour l’Eglise, c’est-à-dire avec des evêques qui ont couvert des agissements, des évêques qui ont abusé sexuellement de personnes, et enfin des évêques qui ont quitté l’Eglise. Pour moi, c’est très important. Je pense que le modèle chilien va être utile pour que ça fasse boule de neige, que ça grossisse tellement que personne ne pourra l’arrêter. Car les survivants, les victimes, ne vont plus se taire, personne ne pourra nous arrêter. »
Rfi