AÉROPORT INTERNATIONAL BLAISE DIAGNE (AIBD) : Un gros scandale secoue la Police nationale

Rebondissement ! Il s’agit d’une affaire révélée par le journal en ligne «Diasporaenligne». Ce journal a parlé d’une mafia qui existe au niveau des procédures d’embarquement supposées clandestines à l’Aéroport International Blaise Diagne de Diass (Aibd). «Diasporaenligne» a révélé l’arrestation d’un ressortissant Sri-Lankais et de plusieurs agents en service à l’Aibd, par la Section de Recherches de la Gendarmerie nationale. Selon nos sources, des agents de Police ont été mouillés dans cette affaire. Et des affectations en cours pourraient servir à protéger certains agents cités dans ce scandale. Le ministre de l’Intérieur devrait tout faire pour que la loi soit appliquée contre les agents concernés.

Au niveau de la Direction de l’Air et des Frontières, de la Direction de la Sécurité publique, de la Direction des Aéroports, de la Police des Étrangers et des Titres de Voyages, à la Commission Interministérielle de Coordination des Opérations de Lutte antiterroriste (Cico), mais aussi au niveau de la Direction de la Police de l’Aéroport de l’AIBD, tous les agents concernés doivent être extirpés de la liste des affections. Le ministre de l’Intérieur ne doit pas proposer au chef de l’Etat des fonctionnaires impliqués dans ce scandale, avant que le dossier ne soit totalement vidé.

D’ailleurs, les 21 et 22 octobre 2019, les commissaires de Police, officiers et agents de la Direction de la Police aux Frontières (DPAF) ont été entendus par le Doyen des Juges. Et, au regard des charges qui pèsent sur eux, on se demande s’ils ne risquent pas une inculpation. Il semblerait que le ministre de l’Intérieur aurait donné l’ordre de poursuites. Si cela est avéré, il faudra impérativement suspendre les affectations pour sauvegarder la belle image de la Police sénégalaise, qui fait la fierté de tous les citoyens. Nous détenons la liste de l’ensemble des commissaires de Police impliqués dans cette affaire que nous suivons de très près.

Moustapha SECK

SÉCURITÉ DANS LES AÉROPORTS DU SÉNÉGAL
Le rapport du DEA qui évoquait la question

Le rapport 2013 sur le terrorisme avait largement traité cette question de la sécurité dans nos aéroports. Et ce scandale qui secoue la politique est un bon prétexte pour se rappeler les termes de ce rapport intitulé : «Législation, Application de la loi et Sécurité des frontières».

En 2007, le Gouvernement du Sénégal a amendé son Code pénal pour criminaliser les actes terroristes, tels que définis par la Convention de l’Organisation de l’Unité africaine sur la Prévention et la Lutte contre le Terrorisme. De plus, 12 articles séparés du Code pénal permettent au gouvernement du Sénégal de poursuivre en justice les activités terroristes.
Le ministère de la Justice du Sénégal a fait des améliorations positives au niveau de l’efficacité du système judiciaire, en 2013, notamment en rétablissant la Cour de Répression contre l’Enrichissement illicite (Crei), chargée de juger les affaires de corruption. Les efforts de renforcement des systèmes de justice pénale, au Sénégal, ont notamment pris la forme de sessions de formation pour le personnel chargé de l’application de la loi et les hauts fonctionnaires, axées sur les enquêtes criminelles, la sécurité aux frontières, la cybercriminalité et les enlèvements contre rançon. Plusieurs agents sénégalais ont bénéficié d’une formation aux Etats-Unis auprès du FBI et du Federal Law Enforcement Training Center, notamment.
La gendarmerie, la police nationale et la police judiciaire du Sénégal n’ont pas suffisamment de capacités et de ressources pour détecter, empêcher et prévenir les actes de terrorisme sur le territoire sénégalais. Le Sénégal a œuvré au renforcement de ses capacités en matière d’application de la loi en participant à des sessions de formation multilatérales organisées par le Forum de Lutte contre le Terrorisme mondial (GCTF), l’Union Africaine (UA) et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).
Le programme d’aide à la lutte contre le terrorisme (ATA) du département d’Etat américain a offert des formations et des équipements permettant de renforcer les capacités d’enquête et de sécurisation des frontières du Sénégal. A travers l’Initiative stratégique régionale (RSI), ATA a contribué à la création d’une Unité d’enquête sur la cybercriminalité avec la Division des enquêtes criminelles (DIC) de la Police nationale sénégalaise. Les agents chargés de l’application de la loi au Sénégal ont régulièrement suivi des sessions à l’«International Law Enforcement Academy» de Gaborone, au Botswana, et ont activement participé à la formation du département d’Etat américain dispensée dans son Centre de formation régionale d’Accra, au Ghana.

Les agents sénégalais des services compétents ont identifié l’insuffisance des ressources aux frontières et le manque de coopération régionale comme des vulnérabilités en matière de sécurité. En juillet, le Sénégal a commencé à exiger des visas biométriques pour tous les non-ressortissants de la Cedeao entrant dans le pays. Le Sénégal met en œuvre un Système d’Identification automatisé des empreintes digitales (Afis) avec l’appui des États-Unis et collecte des cartes individuelles d’information aux frontières. Les Etats-Unis ont formé les agents sénégalais chargés du contrôle des frontières et les représentants des compagnies aériennes à l’identification des documents de voyage contrefaits et falsifiés.

Si le Sénégal a renforcé les critères d’entrée dans le principal aéroport du pays – à Dakar – le passage des frontières dans le reste du territoire, par voie terrestre et maritime, est très peu, voire pas surveillé. Les Etats-Unis ont dispensé des sessions de formation relatives à la sécurité des frontières, notamment des cours sur l’interdiction et la sécurité aux frontières qui se sont déroulés aux Etats-Unis et en Afrique de l’Ouest, et une formation pour lutter contre  les voies de la prolifération, afin d’aider à identifier les éventuelles voies illicites utilisées par les personnes ou les groupes pour déplacer des marchandises illégales à travers les frontières internationales.

Extrait du rapport du Département d’Etat américain

SCANDALE À L’AIBD
De hauts gradés de la Police éclaboussés dans une affaire de trafic de migrants

On en sait un peu plus sur la mafia relativement aux embarquements clandestins à l’Aéroport International Blaise Diagne de Diass (Aibd). L’arrestation d’un ressortissant Sri Lankais et plusieurs agents en service à l’Aibd, par la Section de Recherches de la gendarmerie nationale, n’est en réalité que l’arbre qui cache la forêt. L’enquête que nous avons menée a permis de cerner une véritable organisation criminelle dont le mode opératoire était bien huilé.

Un grand coup de balai ! Un coup de pied dans la fourmilière ! Tels sont les qualificatifs qui peuvent être donnés à l’opération savamment menée par les pandores de la Section de Recherches de la gendarmerie nationale. Tout est parti de l’exploitation d’un renseignement faisant état d’activités douteuses d’un Sri Lankais basé à Dakar. En rapport avec des compatriotes restés au pays, Geneska Taxan faisait venir au Sénégal des Indiens et des Sri Lankais. Ces derniers entraient frauduleusement au Sénégal avec des complicités à l’aéroport. Une fois à Dakar, Taxan mettait en place tout un stratagème pour envoyer ses clients en Europe (espace Schengen).

Confection des documents 
Elle était faite grâce à la complicité d’un Congolais nommé Xavier, un ingénieur informaticien installé à Dakar depuis quelques années. Expert en falsification de documents administratifs, c’est lui qui confectionnait les faux passeports et les faux visas, moyennant deux millions de francs. En outre, il confectionnait aussi des cachets « Départ » et « Arrivée » qu’il apposait sur les passeports comme si leurs propriétaires avaient traversé des frontières aériennes alors qu’il n’en est rien. Cette étape passée, Taxan se chargeait de la coordination avec l’aéroport de Diass pour faire voyager ses clients.

Une première ligne à franchir
C’est celle des contrôleurs de documents de la compagnie Teranga Sûreté Aéroportuaire (TSA). Taxan leur payait entre huit cent mille et un million de francs par candidat au voyage. Quatre d’entre eux ont été arrêtés. Il s’agit des nommés Fall, Mboup, Kâ et Sow. Ils sont tombés dans les filets des gendarmes de la Section de Recherches qui suivaient les traces de Taxan. Récemment, ces derniers s’étaient partagés cinq millions de francs pour fermer les yeux et laisser des clandestins embarquer à destination du Portugal.

Une deuxième ligne à franchir
C’est celle des policiers de la Direction de la Police de l’Air et des Frontières (DPAF). Aussi incroyable que cela puisse paraitre, certains d’entre eux entretenaient un réseau pour faire voyager des clandestins contre espèces sonnantes et trébuchantes. A ce niveau, Taxan donnait entre deux millions et trois millions pour acheter le silence des policiers. Des Commissaires de police, des officiers et agents sont même cités dans cette affaire. D’ailleurs, selon nos sources, deux d’entre eux ont été nommés à des postes de direction lors du Conseil des Ministres du 2 octobre 2019. Taxan âgé seulement d’une trentaine d’années, avait réussi à se mettre dans la poche, de hauts cadres de la police chargés de veiller à la sécurité de nos frontières.

Ces agissements constituent une menace supplémentaire sur la sécurité du pays. Quand des commissaires et des officiers de police se rendent complices de tels actes pour de l’argent, il y a de quoi s’inquiéter. Cela veut dire en claire que criminels internationaux et terroristes peuvent se voir dérouler le tapis rouge à l’Aibd grâce à la cupidité irréfléchie, insensée et irresponsable des contrôleurs de TSA et des policiers de la DPAF. La haute Autorité des Aéroports du Sénégal est interpelée, tout comme la tutelle à la présidence. Le ministre de l’intérieur qui est également interpelé en sa qualité de responsable de la sécurité du pays et de tutelle de ces Commissaires et Officiers de police qui bafouent leur serment,  mettant en péril le pays.

Civils arrêtés, policiers laissés libres, voire promus
Déférés au parquet le mardi 1er octobre 2019, les agents de TSA ont été placés sous mandat de dépôt par le doyen des juges après trois retour de parquet au commissariat central de Dakar, selon des membres de leur famille. B. Kâ et K. Mboup, respectivement oncle et frère de deux des agents ont émis de sérieuses inquiétudes. «Ils risquent d’être sacrifiés pour protéger les policiers qui n’ont pas été inquiétés et qui sont tout aussi responsables», ont-ils dit.

Un des civils a apostrophé un Commissaire très haut placé dans  l’architecture de la police, qui a eu à faire un laissez-passer à deux Indiens et trois Sri Lankais pour les faire embarquer dans un avion moyennant dix millions de francs. Il a pourtant été promu à un poste stratégique, l’une des directions les plus importantes de la Police nationale. Pour faire semblant d’avoir pris des mesures, il semblerait qu’un lieutenant féminin nommé N. Ndiaye, a été relevé de l’aéroport. C’est sur elle que la police veut tout rejeter pour épargner ses supérieurs hiérarchiques qui ont été promus. Cela s’appelle amuser la galerie.

Enseignement à tirer
Des têtes doivent absolument tomber. A l’heure où le trafic d’êtres humains et le terrorisme hantent le sommeil de la population mondiale, il est inadmissible que des policiers à ce niveau de responsabilité, puissent mettre tout un pays en danger pour leurs propres intérêts. Si de telles pratiques perdurent depuis l’aéroport de Yoff, il y a de quoi se poser des questions sur le niveau de sécurité de nos frontières aériennes. Selon les agents de TSA interrogés, beaucoup de parents des Sénégalais de la diaspora ont voyagé dans ces circonstances, en plus des clients de Taxan. Ceux qui sont en Europe envoient leur carte de séjour que leur frère ou neveu utilise pour passer ces lignes  composés de contrôleurs de TSA et de policiers de la DPAF.

Vivement que l’instruction ouverte par le doyen des juges n’épargne aucun membre de cette bande, quel que soit leur niveau de responsabilité. La sécurité du pays ne s’en portera que mieux.