Libération révélait que Babacar Ndiaye (chef de l’agence Banque islamique des Almadies), Algassoum Ndiaye (chef de l’agence Banque islamique de Pikine), Amadou Moctar Fall (chef de l’agence Uba Port) et AbabacarThiam, chargé de clientèle au niveau de l’agence Uba du Port sont écroués, en même temps que plus hommes d’affaires et des cambistes, dans une affaire rocambolesque de virements frauduleux sur l’axe Abidjan-Dakar. Les banques ont, à la suite de nos révélations, sorti des « précisions » pour se couvrir et couvrir leurs agents incriminés. Libération révèle des enregistrements audios explosifs, versés au dossier ainsi que des dépositions qui fragilisent la ligne de défense des banques, notamment Uba et Banque islamique.
Libération révélait qu’à la suite de l’information judiciaire ouverte par le parquet de Dakar dans le cadre de l’affaire de tentative de blanchiment de capitaux portant sur 7,5 milliards de Fcfa, avec 1,7 milliard déjà volé à la Versus bank de Côte d’Ivoire suite à un piratage, tous les mis en cause présumés avaient été inculpés et placés sous mandat de dépôt. Parmi eux, Babacar Ndiaye (Chef de l’agence Banque islamique des Almadies), Algassoum Ndiaye (Chef de l’agence Banque islamique de Pikine), Amadou Moctar Fall (Chef de l’agence Uba Port) et AbabacarThiam, chargé de clientèle au niveau de l’agence Uba du Port. L’homme d’affaires Meïssa Ndiaye Séne , le patron d’Egim Sa qui a été le principal bénéficiaire de la fraude a été aussi écroué en même temps que son associé Abdou Aziz Gning et Lamine Camara, directeur général Atlantique South Africa Sarl. Ce dernier a reçu 467 millions de Fcfa dans son compte ouvert à la Uba Port. Quant à MeissaNiayeSène il a reçu un premier virement qui ‘élève à trois cent cinquante millions sept cent cinquante mille (350 750 000) FCFA et un second de quatre cent millions deux cent cinquante mille (400 250 000) FCFA, soit un total de sept cent cinquante et un millions (751 000 000) Fcfa. Ces deux virements ont été reçus à la date du 22 février 2019. Une fois les virements effectués, il a procédé à quatre (04) opérations de retraits de huit millions (8 000 000) FCFA au niveau de l’agence BIS Almadies, dix millions (10 000 000) FCFA à l’agence BIS VDN, quarante millions (40 000 000) l’agence VDN et cinquante millions. Dans la foulée, son associé, Abdoul Aziz Gning a effectué deux (02) opérations de retrait de quarante-cinq millions cinq cents (45 500 000) et de cinquante millions (50 000 000) FCFA à l’agence de Pikine. C’est par la suite que le département juridique de la banque a été informé que le virement a été effectué sur la base d’un Swift frauduleux depuis la Côte d’Ivoire. Au total, MeissaSène aura quand même pu retirer cent huit millions (108 000 000) FCFA et a restitué la somme de cent millions (100.000.000) CFA en tranches de quarante-neuf millions (49 000 000) FCFA et cinquante et un millions (51 000 0000) FCFA à l’agence Indépendance.
Premier à être arrêté dans le cadre de cette rocambolesque affaire, Meissa Ndiaye Sène a été intercepté par une équipe en civil au niveau de l’agence Banque Islamique du Sénégal de roume. Sur les faits, il a soutenu avoir signé un accord de financement pour le compte de sa société et une autre de droit ivoirien dénommée » Sandy Négoce et Prestations Côte d’Ivoire (SNP-CI) « , représenté par le sieur Ange Isaac Korez lui aussi sous mandat de dépôt à l’instar de Oumar Niane Diop, Mamadou Bassirou Siallo et Aliou Barry, un cambiste au rôle trouble.
Lamine Camara : « Le chef de l’agence Uba du port m’a dit… »
À la suite de nos révélations, la Direction générale d’Uba est montée au créneau, pour laver Amadou Moctar Fall, Chef d’agence du Port et le chargé du clientèle Ababacar Thiam. Pourtant, si le parquet a demandé la conduite des banquiers, en pleine procédure, c’est parce que l’enquête de la Division spéciale de lutte contre la cybercriminalité a révélé des indices graves et concordants. Le témoignage d’un des mis en cause, Lamine Camara, directeur général d’Atlantique South Africa se passe de commentaires. Lors de son deuxième interrogatoire, sous le régime de la garde à vue, Lamine Camara lâche aux policiers : « Je suis disposé à vous fournir plus d’informations pouvant intéresser votre enquête ».
Ensuite, la grande confession : « Je tiens à préciser que j’ai eu au courant du mois de novembre 2018 un entretien avec le sieur Mokhtar Fall, Chef d’agence de la banque Uba Port dans son bureau et sur sa demande. Le sieur Mokhtar Fall m’a demandé de discuter avec mes partenaires espagnols pour qu’ils puissent m’envoyer un virement d’un million d’euros dans le compte ouvert à Uba. Selon ses déclarations, il a laissé entendre que ce virement lui permettrait d’atteindre ses objectifs annuels. Selon lui, en sa qualité de chef d’agence, il lui manquait cet somme pour atteindre l’objectif que sa banque lui demandait. En réponse, je lui ai fait savoir que j’allais en discuter avec mes partenaires pour pouvoir acheter du poisson. Lorsque j’en ai parlé à mon partenaire espagnol du nom de José Maria Acero, il m’a dit que la somme était trop élevée et qu’il ne pouvait pas satisfaire ma demande. Par la suite j’ai recontacté Mokhtar Fall pour lui dire que c’était impossible ». Mais, dit-il, « seulement, quelques semaines plus tard, le sieur Mokhtar Fall m’a appelé pour me demander si j’étais intéressé pour un projet auquel il pourrait me présenter le bailleur et m’a garanti que le projet était fiable et serait d’un coût d’un milliard. Je lui ai demandé de me présenter les documents du projet avant que je ne puisse l’accepter. Au début du mois de février 2019, le sieur Fall m’a demandé que je lui envoie une copie de mon passeport sans pour autant me donner des explications ce que j’ai fait en l’envoyait par mail. Je précise que c’est lui-même qui m’a contacté pour me dire que mon compte avait un virement de 467 millions de Fcfa mais je n’ai jamais retiré l’argent ». Lamine Camara fait une dernière révélation aux enquêteurs : « Je tiens à préciser qu’au cours de la rencontre tenue avec les responsables d’Uba, le chef d’agence Mokhtar Fall et le gestionnaire M.Thiam étaient en désaccord. Mokhtar Fall a déclaré qu’il n’a jamais instruit au gestionnaire de confirmer le virement de 467 millions de Fcfa sur mon compte alors que M.Thiam de son côté prétendait avoir reçu des ordres venant de lui ».
Les aveux dévastateurs de Meissa Sène
L’autre mis en cause, l’homme d’affaires Meissa Ndiaye Sène a accablé le chef de l’agence de la Banque islamique des Almadies. « Je me suis transporté auprès de mon gestionnaire en l’occurrence Babacar Ndiaye. Il m’a fait savoir qu’il fallait attendre 72 heures pour que je puisse effectuer des retraits. Je lui ai demandé de m’aider à retirer 265 millions de Fcfa moyennant commission. Il m’a demandé de patienter. Une heure après, il m’a appelé pour me demander de vérifier. J’avais 750 millions de Fcfa dans mon compte ». Sène affirme avoir retiré sur place 8 millions de Fcfa, parce que la banque n’avait pas beaucoup de liquidités, avant de remettre trois millions de Fcfa à Babacar Ndiaye qui va ensuite appelé ses collègues de la Vdn et de la Place de l’indépendance pour « mobiliser » les fonds. C’est ainsi que Meissa Sène a pu, après le virement frauduleux, retiré 50 millions de Fcfa à l’agence Vdn de la Bis et 50 autres millions à l’agence sise à la Place de l’indépendance. Interrogé sur ces « recommandations », Babacar Ndiaye a tenté de s’expliquer face aux enquêteurs qui ont découvert une autre anomalie : il a ouvert un compte pour Abdou Aziz Gning, associé de Meissa Sène, arrêté aussi, sur la base d’une carte d’identité caduque. « L’ouverture du compte n’était pas définitive », jure Babacar Ndiaye. « C’était juste une ouverture en attente de régularisation et, en aucun cas, il a été question de commander les moyens de paiement ou de scanner sa signature » dit-il.
Des notes vocales explosives
La conviction des enquêteurs est que ces banquiers étaient liés au réseau et recevaient des commissions après les virements frauduleux. Cette conviction des enquêteurs est renforcée par un message audio « extrait » du téléphone d’un autre mis en cause, Abdou Aziz Gning, lors d’un échange avec l’associé de Meissa Sène. Gning y affirme : « Zé (ndlr, Zézé Fulbert Koré, pilier du réseau arrêté aussi) a récupéré l’argent, ça fait deux cent soixante-quinze millions ». Il fait suivre sa note vocale d’un message écrit reçu de « Zé » peu avant qu’il ne procède à la remise des fonds : « Il y a deux cent soixante-quinze millions déjà, apportez les après on va libérer les banquiers ». Commentaire vocal d’Abdou Aziz Gning : « banquiers yii je les connais nagnoulène libérer nioudéme. Parce que ma dieul engagement, Khaliss bii meunoultok si compte ». Dans une autre note vocale, « Zé », qui parlait avec un certain « Théo » qui n’a pas été identifié affirme : « Le banquier m’a donné un autre compte spécialement pour les transferts « arqueurs », c’est-à-dire ce que tu sais. Mais sur ce compte ils prennent 60% car ils prennent tous les risques et payent cash et ferment le compte qui a reçu l’argent. Sur ce compte, ils n’ont pas besoin de contrat ni de rien d’autres mais quand l’argent arrive, le même jour il est sorti et le compte est fermé » (A suivre).