En Afrique du Sud, le procès de l’ex-président Jacob Zuma a été reporté. L’ancien chef de l’Etat sud-africain comparaissait, ce vendredi matin, devant un tribunal de Durban pour répondre d’accusations de corruption, fraude et blanchiment d’argent. Une première comparution dans une vieille affaire de vente d’armes qui remonte aux années 90. Mais à peine l’audience a-t-elle commencé, que le procès a été reporté au 8 juin.
L’audience a duré à peine douze minutes et le procès a été reporté. Jacob Zuma est accusé d’avoir touché des pots-de-vin du groupe français Thales, ex-Thomson CSF, à la fin des années 90.
A l’époque, il était vice-président du pays. L’Afrique du Sud souhaitait moderniser son armée. Plusieurs groupes étaient en lice, dont le Français. Jacob Zuma aurait perçu l’équivalent de 280 000 euros de Thalès en échange, de son soutien.
A l’époque, Andrew Feinstein était député pour le parti au pouvoir, ANC. Il a fait partie d’une commission parlementaire qui a enquêté sur ses accusations. Il est d’ailleurs appelé à témoigner lors de ce procès et pour lui, les preuves sont indiscutables : « Il y a énormément de preuves à charge, notamment une série de conversation entre Zuma son conseiller financier, Shabir Sheik, et des représentants du groupe français, dont un dirigeant qui s’appelle Alain Tétard. Mais l’élément du dossier le plus incriminant est un fax codé envoyé par Têtard au conseillé financier de Zuma confirmant que la somme que le groupe avait accepté de payer à Zuma serait déposée dans tel compte, à tel date en échange des services rendus par Jacob Zuma ». En 2005, Shabir Sheik a été reconnu coupable et condamné à 15 ans de prison.
Pression du parti
Il a déjà été inquiété dans cette affaire, mais en 2009, les chefs d’inculpation avaient été abandonnés pour vice de procédure juste avant son élection à la présidence. Depuis l’opposition se bat pour obtenir la réouverture du dossier. C’est chose faite d’autant plus que Zuma n’est plus chef de l’Etat. Il a démissionné, il y a deux mois, sous la pression de son parti.
Ce vendredi matin, Jacob Zuma comparaissait au côté d’un représentant de Thales, qui est coaccusé. Et dès le début, ses avocats ont fait savoir qu’ils faisaient appel de la décision du procureur général de rétablir les charges. C’est donc parti pour une nouvelle procédure judiciaire qui risque de durer des mois, des années, avant qu’il n’y ait réellement un procès.
Mais le militant anticorruption et auteur de livre sur les ventes d’armes à l’Afrique du Sud, Hennie Van Vuuren, Jacob Zuma pourrait tout de même finir par être condamné : « Son équipe d’avocat s’est battu jusqu’au bout pour ralentir toutes les procédures en justice. Ils ont même appelé cela la stratégie Stalingrad. Et pendant ce temps, ils essayent de le présenter comme une victime. Mais la différente avec tous les autres scandales autour de Jacob Zuma, c’est que dans cette affaire, il est directement et personnellement impliqué. Et il pourrait être condamné à de la prison ».
Les soutiens en force
Le nouveau rendez-vous judiciaire est donc prévu pour le 8 juin, en attendant les soutien de Jacob Zuma ne désarment pas. Après un petit peu plus d’une demi-heure à l’intérieur du tribunal, Jacob Zuma est sorti en héros devant environ 2 000 de ses soutiens réunis sur le port de Durban. Il a pris rapidement la parole, le temps de remercier ses soutiens, de se dire victime d’un procès politique et d’annoncer qu’il fera appel.
Selon l’évêque Ncobo, c’est une démonstration de force de sa région du Kwazulu-Natal : « Les gens sont venus en nombre pour soutenir leur ancien président Jacob Zuma. Car il croit encore en lui. Et maintenant, nous allons demander à toutes les provinces sud-africaines de se mobiliser derrière lui ».
La décision de reporter le procès est une semi-victoire pour ses partisans comme Sibusiso, qui continueront de le soutenir : « Tant que Jacob Zuma est en procès, nous serons là, nous viendrons le soutenir, même s’il faut aller à la Cour suprême de Bloemfontein, nous irons à Bloemfontein, car nous le soutenons ».
Quelques opposants se sont cependant glissés dans la foule, comme Melwa, du parti Inkhata, rival historique de l’ANC : « Nous sommes présents pour apporter notre soutien à la justice et au peuple sud-africain. Car si Zuma a volé de l’argent public, il doit faire face à la justice et rembourser cet argent ».
La promesse est faite par les soutiens de Zuma, ils occuperont le port de Durban de nouveau le 8 juin.
rfi