Trois ans après le retentissant scandale qui a secoué l’Elysée, Alexandre Benalla est jugé à partir de lundi à Paris pour avoir brutalisé un couple lors des manifestations du 1er mai 2018 et pour l’utilisation de passeports diplomatiques, aux côtés de trois autres prévenus.
A l’origine d’une tentaculaire affaire qui a éclaté à l’été 2018, l’ancien chargé de mission au cabinet d’Emmanuel Macron doit comparaître jusqu’au 1er octobre, à sept mois du premier tour de la présidentielle.
Aujourd’hui âgé de 30 ans et reconverti dans le privé, il est attendu à 13h30 au tribunal correctionnel pour une première audience consacrée aux questions de procédures et à un résumé des investigations.
En juillet 2018, Alexandre Benalla avait été identifié par le journal Le Monde sur une vidéo où il apparaissait avec un casque des forces de l’ordre, brutalisant une femme et un homme, place de la Contrescarpe à Paris, à l’issue d’une journée de manifestation émaillée de heurts.
Alors au cœur du dispositif de sécurité du président, il devait ce jour-là n’avoir qu’un rôle d’observateur. Sanctionné d’une suspension de 15 jours, il avait gardé un bureau à l’Elysée, révélait le quotidien.
Dès le lendemain, l’opposition dénonçait une « affaire d’Etat » et une enquête judiciaire était ouverte. L’affaire a empoisonné l’exécutif pendant des mois, à la faveur de révélations dans la presse et des auditions de commissions d’enquête parlementaires.
Visé par six enquêtes judiciaires, dont une classée sans suite, Alexandre Benalla répondra notamment à partir de lundi de « violences volontaires en réunion » et « immixtion sans titre dans l’exercice d’une fonction publique » notamment.
Il devra s’expliquer, comme son coprévenu l’ex-employé d’En Marche Vincent Crase, 48 ans, sur ses agissements place de la Contrescarpe et au Jardin des plantes contre trois manifestants.
Des « gestes nécessaires » et non un « tabassage », a toujours affirmé Alexandre Benalla, qui soutient avoir eu un « réflexe citoyen » en « interpellant » des « agresseurs de policiers ».
– « Folle journée » –
« Des erreurs ont été commises évidemment, par moi, c’est certain, mais il semble malgré tout que j’aie le dos bien large. Et je suis loin d’être le seul responsable de ce naufrage. Je suis le fusible utile du pouvoir », écrivait-il dans un livre paru fin 2019.
Sa défense – comme celle de Vincent Crase – invoque une disposition du code de procédure pénale autorisant, dans certaines circonstances, un citoyen à appréhender l’auteur d’un « délit flagrant ».
Alexandre Benalla devra par ailleurs répondre de l’utilisation de deux passeports diplomatiques après son limogeage de l’Elysée, lors de voyages en Afrique et en Israël. Il est aussi soupçonné d’avoir obtenu un passeport de service en produisant un faux – ce qu’il conteste.
Il comparaîtra en outre pour « port d’arme » non autorisé, en avril 2017 à Poitiers, pendant la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron. Probablement un « pistolet à eau », selon l’intéressé.
Il encourt jusqu’à sept ans de prison et 100.000 euros d’amende.
Deux fonctionnaires de la préfecture de police de Paris seront quant à eux jugés pour avoir transmis, juste après l’explosion de l’affaire, des images de vidéosurveillance à Alexandre Benalla.
Le jeune couple de la Contrescarpe, qui avait expliqué avoir été pris par hasard dans les heurts, a été condamné en février 2019 à une amende de 500 euros pour avoir lancé des projectiles sur les forces de l’ordre. Un « acte irréfléchi » après une charge de CRS, ont-ils alors regretté.
Ils seront présents au procès, comme les manifestants du Jardin des plantes.
« Ma cliente souhaite comprendre comment Alexandre Benalla et Vincent Crase ont pu commettre autant de délits (…) dans une folle journée, sans aucune intervention policière (ni) sanction hiérarchique, alors même que tous ont eu connaissance des infractions commises », a déclaré à l’AFP Me Grégory Saint-Michel, qui défend l’un d’eux.
Deux syndicats policiers, l’ancien chef de cabinet de l’Élysée François-Xavier Lauch et l’auteur de la vidéo du 1er mai, le journaliste Taha Bouhafs, sont aussi parties civiles.
Frace 24