Eminent membre de la société civile africaine, Alioune Tine a joué un rôle non négligeable dans la décrispation de la situation actuelle. Le leader de la plateforme Afrika Jom Center revient sur les différentes péripéties de l’affaire.
Médiation. «Nous avons suivi cette crise avec beaucoup d’intensité. Dès le début, j’ai vu les signes avant-coureurs d’une grave crise du fait de la personnalité de Sonko et du Président Macky Sall, du contexte de la pandémie et de la radicalité de la jeunesse qui soutient Sonko. A cela, il faut ajouter le contexte lié à la crise Casamançaise. Les violences inouïes consécutives aux manifestations, inédites dans notre histoire politique. Alors, j’ai eu vraiment peur. J’ai été saisi par Cheikh Tidiane Dièye qui est passé me voir à titre personnel, du fait de nos vieilles relations, qui me dit : «Alioune, il faut que tu bouges.» J’ai appelé une relation proche du Président, qui nous a trouvé une audience avec le chef de l’Etat. J’avoue aussi la contribution majeure de Moustapha Diakhaté, qui a été très efficace et son entregent a beaucoup servi. J’ai été voir après, Thierno Madani avec Cheikhou Oumar Sy, j’ai appelé Cheikh Tidiane Sy Al Amine, discuté avec Abdou Aziz Kébé et Serigne Mansour Sy Jamil pour mobiliser la famille Tidiane et toutes les familles maraboutiques. J’ai appelé Dr Cheikh Guèye et Serigne Mbacké Sakho pour sensibiliser la famille mouride et les Khalifes. Je me suis rendu à Kaolack pour voir le Khalife général des Niassènes. Et nous avons eu une réunion avec toutes les familles religieuses avec Cheikh Tidiane Dièye et Moustapha Diakhaté, avant leur conférence de presse à la mosquée. J’ai appelé les responsables de l’opposition aussi, à commencer par les gens de Pastef, le maire de Dakar, Khalifa Sall, Mamadou Lamine Diallo, Bougane Guèye Dany, Bouba Diop, Doudou Wade… pour inviter à l’apaisement. Dans la majorité présidentielle, j’ai parlé à Mahmoud Saleh, Idrissa Seck, Serigne Mbaye Thiam, Souleymane Jules Diop qui m’a appelé depuis Paris. J’ai aussi alerté les Nations Unies. J’ai eu les encouragements de certains diplomates. J’ai tout fait dans le cadre de la plateforme Jammi Rewmi avec Safiétou Diop, Cheikh Oumar Sy.»
Discours Sonko et Macky. «Ce que j’ai le plus apprécié dans le discours de Sonko, c’est le rejet clair et net de toute prise du pouvoir par l’Armée et tout renversement d’un pouvoir par la rue. Son souci de préserver l’unité nationale et le vivre-ensemble. Son registre est celui d’un opposant avec son lexique polémique. Son souci d’apaisement sans ambiguïté. Je trouve que c’est le meilleur discours de Macky, en dehors de son discours d’investiture de 2012. C’est un Macky qui a pris de la hauteur, qui a fait preuve d’humilité et de compassion. Une insistance particulière sur le vivre-ensemble, l’unité nationale, la consolidation de la démocratie. Une conscience aiguë du mal vivre et de la misère de la jeunesse et de la nécessité de trouver des solutions.»
Attentes. «Nous attendons des actes forts de réconciliation et un nouveau départ pour l’Etat de droit, la démocratie, pas seulement celle réduite à la démocratie électorale, mais aussi la démocratie participative. L’Etat de droit sans l’Etat social est une menace pour le vivre-ensemble. Les émeutes de la faim montrent que l’État social est absent. la question du 3e mandat. S’appuyer sur les conclusions des Assises. Repenser l’État et la démocratie. Dissoudre le Gouvernement actuel serait un bon signe pour dire que je change de Cap. L’urgence aussi, c’est la libération de tous les détenus politiques.»
Igfm