Ndiaté Diamé et sa mère Amy Collé Gaye ont été attraites à la barre de la Chambre criminelle du tribunal de grande instance de Dakar. Résidentes à Diamniadio, elles répondaient respectivement des crimes d’infanticide, d’homicide volontaire et d’inhumation sans aucune autorisation administrative. Elles seront fixées sur leur sort le 02 mars prochain.
Une affaire d’infanticide a été appelée, hier, à la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar. Engrossée par son petit ami, Ndaté Diamé a accouché d’un garçon dans la nuit du 09 au 10 octobre 201. À l’époque, la jeune fille avait 20 ans. Ayant senti des contractions, elle a accouché dans la chambre de sa maman en dehors de toute assistance médicale. C’est après l’accouchement que sa mère Amy Collé Gaye a appelé le père de l’enfant, Mamady Baldé pour l’informer de la naissance de son fils. Naturellement, Mamady lui demande comment allaient l’enfant et sa mère. À cette question, la réponse de la mère était positive.
Mais, après une trentaine de minutes, elle rappelle le papa pour changer de discours, lui disant que l’enfant est mort-né. Le lendemain, Amy Collé Gaye et Mamady Baldé ont enterré l’enfant dans la maison, à l’insu de tout le monde. Même le mari de la mère de Ndaté, en l’occurrence Birame Sarr, n’était au courant de rien. Ni la grossesse, ni l’accouchement. C’est suite à une dénonciation anonyme que Ndaté, sa mère et Mamady ont été interpellés. Une enquête a été ouverte et les policiers ont réussi à trouver l’endroit où le nouveau-né a été enterré. Durant toute la grossesse, Ndaté n’a jamais fait de visite prénatale et ne disposait pas de carnet de santé. Personne, à part Ndaté, sa mère et son amant, n’était au courant de la grossesse.
Aux enquêteurs, Mamady avait révélé qu’il voulait que sa petite amie fît des visites mais c’est sa mère Amy Collé qui l’en a dissuadée. Après l’accouchement, il affirme que c’est encore elle qui lui a remis l’enfant et lui a indiqué l’endroit où il l’a enterré. Regroupant ces signes, les enquêteurs en ont déduit qu’il s’agissait d’un homicide qui a été programmé depuis le début. Ndaté a d’abord cherché à duper les enquêteurs. Avant d’être conduite chez une sage-femme qui a confirmé l’accouchement, elle a tenté de faire croire qu’elle n’a jamais été enceinte et qu’elle était vierge.
Ndaté Diamé, accusée : «J’ai su que le bébé est mort parce qu’il n’a pas bougé ni pleuré. C’est quand les policiers l’on déterré que j’ai su qu’on l’avait inhumé dans la maison»
Interrogé sur le mobile de son acte, hier, jour de leur jugement, la jeune Ndaté a tenté de se laver à grande eau. À l’en croire, l’enfant est né sans vie et elle n’a jamais essayé de dissimuler sa grossesse. «Ma mère a su que j’étais enceinte quand j’étais à mon troisième mois de grossesse. Je ne l’ai pas caché parce que j’allais à l’école avec. Je suis parti une fois à l’hôpital, c’est le jour où on m’a appris que je suis enceinte. J’ai accouché dans la chambre de ma mère sans l’assistance de personne. Il n’y avait que nos colocataires à la maison», raconte-t-elle. Pourtant à l’enquête préliminaire, elle avait déclaré avoir accouché en la présence de sa maman. Poursuivant, elle confirme que c’est Mamady qui a enterré mais ne savait pas où. Pour se blanchir, elle dira : «J’ai su que le bébé est mort parce qu’il n’a pas bougé ni pleuré. C’est quand les policiers l’on déterré que j’ai su qu’on l’avait inhumé dans la maison».
Ami Collé Gaye, accusée : «C’est moi qui ai donné l’enfant à Mamady mais je ne lui ai pas ordonné de l’enterrer à la maison»
Sa mère Ami Collé Gaye, née en 1974, a aussi livré sa version. Outre l’homicide volontaire dont elle et sa fille sont poursuivies, elle répondait aussi du crime d’inhumation d’un nouveau-né contrevenant à la loi. « J’ai appris que Ndaté était enceinte quand elle était à son 7ème mois de grossesse. Je n’étais pas à la maison quand elle accouchait. C’est moi qui ai donné l’enfant à Mamady mais je ne lui ai pas ordonné de l’enterrer à la maison. Je lui ai juste demandé de l’argent pour que ma fille aille se faire consulter », dit-elle. Pour le cas de son mari qui n’était au courant de rien, elle explique : « Le jour de l’accouchement mon mari était de tour chez son autre épouse ».
Yaye Mané Ndiaye, sage-femme : «Quand elle était venue se faire consulter, Ndaté a demandé à me voir en aparté avant que les policiers entrent dans la salle. Ainsi, elle m’a suppliée de leur dire, avant de la consulter, qu’elle était vierge»
Venue apporter son témoignage, la sage-femme Témoin Yaye Mané Ndiaye a enfoncé Ndaté. « Ndaté est venue un jour avec deux gendarmes pour consultation. Elle a demandé à me voir en aparté avant que les policiers entrent dans la salle. Ainsi, elle m’a suppliée de leur dire, avant de la consulter, qu’elle était vierge. Elle m’a dit qu’elle était en classe d’examen et était l’espoir de sa mère. Méfiante, j’ai appelé la matrone pour qu’elle nous tienne en témoin en assistant à la consultation. J’ai vu qu’elle venait à peine d’accoucher », confie-t-elle. Ayant déclaré à la barre qu’elle n’a pas coupé le cordon ombilical car il était sorti en même temps que l’enfant, la sage-femme rétorque : « Elle ne peut ne pas couper le cordon ombilical à moins que la grossesse ne soit pas à terme ».
De l’avis du ministère public, l’affaire a été préméditée pour effacer l’enfant. D’autant plus que durant toute la procédure, elles nagent dans la contradiction. Pour lui, les révélations faites sur cette affaire sont une somme d’éléments qui montrent à suffisance la mauvaise foi des accusés. «J’ai l’intime conviction qu’ils ont eu ce projet de tuer l’enfant sans laisser de trace. On ne peut pas connaître la cause qui a engendré la mort car l’enfant a été inhumé !», peste le procureur de la République. À cet effet, il a demandé au tribunal de les reconnaître coupables et de les retenir dans les liens de la prévention. Il a requis 5 ans de réclusion criminelle contre le duo mère-fille et 2 mois d’emprisonnement ferme pour Mamady Baldé, poursuivi pour inhumation sans aucune autorisation administrative.
Les quatre avocats qui étaient constitués pour la défense des accusées ont tous plaidé pour l’acquittement de leurs clientes. Selon eux, l’infanticide doit être démontré techniquement alors que cela n’a pas été fait.
Les débats clos, l’affaire est mise en délibéré au 02 mars prochain