La pandémie de coronavirus continue ses ravages mardi sur une planète pourtant largement confinée: les Etats-Unis, où l’épidémie s’accélère, sonnent la mobilisation générale tandis que l’Europe, qui concentre la majorité des décès, attend avec anxiété le pic de la crise.
Le bilan de l’épidémie s’est de nouveau alourdi lundi, avec près de 37.000 morts dans le monde, le cap des 11.000 morts franchi en Italie, celui des 3.000 dépassé aux Etats-Unis, encore 812 nouveaux décès en 24 heures en Espagne et 418 en France, un record pour le pays
Les ministres des Finances du G20 doivent se réunir mardi par visio-conférence pour apporter une réponse à cette crise mondiale, qui met les ressources des Etats sous tension.
Aux Etats-Unis, qui recensent de loin le plus grand nombre de cas confirmés (163.000 et plus de 3.000 morts), c’est la mobilisation générale: près des trois-quart des Américains vivent désormais confinés, d’une manière plus ou moins stricte.
Un navire-hôpital de mille lits est arrivé à New York, épicentre de l’épidémie. Des hôpitaux provisoires ont aussi été érigés dans un centre de conférences ou sous des tentes montées en plein Central Park.
Des médecins new-yorkais s’inquiètent d’une possible pénurie en respirateurs artificiels. « S’il y a un afflux et que vous n’avez qu’un nombre limité de respirateurs, vous ne pouvez pas ventiler tout le monde », redoute Shamit Patel, 46 ans. « Et à partir de là, vous devez choisir ».
L’inquiétude grandit aussi dans le Maryland, au nord de la capitale fédérale Washington, où habitent de nombreux hauts fonctionnaires: 67 pensionnaires d’une maison de retraite y ont été testés positifs, et le gouverneur de l’Etat, Larry Hogan, a évoqué « un scénario du pire ».
Pour protéger sa population, son homologue de Floride refuse pour l’heure de laisser débarquer un paquebot, le Zaandam, qui se trouve en mer des Caraïbes avec plus d’un millier de passagers – ainsi que quatre morts et des dizaines de malades.
– Décrue espérée –
Et des salariés de l’emblématique magasin bio américain Whole Foods vont se mettre en grève mardi, pour de meilleures conditions financières et des mesures d’hygiène et de sécurité renforcées. La veille, des salariés d’un entrepôt new-yorkais d’Amazon et de la plateforme de livraison de courses Instacart avaient déjà cessé le travail.
Le Mexique, qui recense 28 morts, a décrété l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 30 avril. Les activités non-essentielles ont suspendues dans le public comme le privé, et les Mexicains exhortés à rester chez eux, en particulier les plus de 60 ans, les femmes enceintes et les personnes souffrant de maladies les rendant plus vulnérables au virus.
Partout où sévit la maladie, on guette fébrilement le pic du taux de mortalité, annonciateur d’un reflux et d’un désengorgement des services de réanimation.
En Italie, pays qui enregistre le plus grand nombre de décès (11.500, pour près de 98.000 cas), le confinement commence à produire des résultats encourageants, après trois semaines.
« Nous pouvons espérer atteindre le pic dans sept ou dix jours, puis, raisonnablement, une décrue de la contagion », a déclaré le vice-ministre de la Santé, Pierpaolo Sileri. Pour autant, les 60 millions d’Italiens devront patienter « au moins jusqu’à Pâques », le 12 avril, date jusqu’à laquelle le confinement a été prolongé.
Le pays endeuillé a prévu d’observer une minute de silence mardi, à la mémoire de ses victimes.
Deuxième pays le plus touché au monde avec 7.340 décès, l’Espagne connaît un ralentissement continu du nombre de morts, laissant là aussi penser que le pic de l’épidémie approche.
En attendant, la vigilance prévaut et les autorités ont interdit les cérémonies funéraires, limitant à trois le nombre de participants à un enterrement.
En France, où plus de 3.000 personnes ont succombé au virus à l’hôpital, dont un pic de 418 en 24 heures, les soignants sont au bout du rouleau.
« Ce matin, en me réveillant, je pleure. En déjeunant, je pleure. En me préparant, je pleure (…) Là, dans les vestiaires de l’hôpital, je sèche mes larmes. J’inspire. J’expire. Les gens dans les lits pleurent aussi et c’est à moi qu’il incombe de sécher leurs larmes », témoignait sur Facebook, Elise, infirmière à Besançon (est).
Applaudis tous les soirs aux fenêtres, certains soignants ont témoigné des pressions dont ils font l’objet. « Les gens s’écartent quand ils me croisent, ils ne se tiennent plus à un mètre de moi, mais à quatre mètres », confie Negete Bensaïd, infirmière libérale à Paris.
– « Enfants à nourrir » –
Plus de 3,4 milliards de personnes sont astreintes à rester chez elles, soit 44% de la population mondiale, un confinement pas toujours simple à faire respecter.
En Russie, Vladimir Poutine a appelé les quelque 12,5 millions de Moscovites à « prendre au sérieux » le confinement. Le centre-ville était quasi déserté par lundi par les piétons, mais dans un autre quartier de nombreux passants déambulaient.
« Si on reste à la maison avec nos parents, on va mourir beaucoup plus vite que du coronavirus », ont dit à l’AFP trois jeunes.
Le gouvernement du Panama a durci lundi ses mesures de quarantaine: pour réduire de moitié le nombre de personnes dans la rue, il a décidé qu’hommes et femmes ne pourront quitter leur domicile qu’à tour de rôle, différents jours de la semaine.
En Inde, les autorités tentent de juguler l’exode de centaines de milliers de travailleurs migrants, privés d’emploi par le confinement, qui tentent de regagner à pied leur village.
Dans les pays les plus pauvres, notamment en Afrique, l’application des restrictions vire parfois au casse-tête.
« On s’en fout de ce virus, on a des enfants et des petits-enfants à nourrir! », s’indigne une vieille femme qui fait la queue pour obtenir les aides sociales dans un township de Port Elizabeth (Afrique du sud).