Coup d’État en Birmanie: «Un conflit entre la volonté du peuple et les militaires»

Les généraux birmans ont ordonné jeudi aux fournisseurs internet de bloquer l’accès à Facebook, trois jours après leur coup d’État contre le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi. Si un mouvement de désobéissance contre la dictature militaire semble prendre forme, l’armée reste une menace pour les moines.

Contacté par RFI, c’est un moine de Mandalay qui s’exprime.sur le raid des militaires dans son monastère. Il veut rester anonyme par crainte de représailles de l’armée.

« Je ne me sens pas en sécurité, je suis mal à l’aise. Et tous ici avons peu d’espoir. Le 1er février, une cinquantaine de militaires ont fait une descente dans notre monastère et sans poser de question ni discuter, ils ont emmené un de mes confrères. On a appris qu’il avait écopé d’une peine de deux ans de prison. Ce moine avait été l’un des leaders de la révolution de Safran en 2007. Il a été arrêté pour ses propos très critiques à l’encontre de la dictature et des dirigeants de la junte qui agissent contre les principes démocratiques. Notre confrère a été emmené dans un centre de détention et personne n’est autorisé à lui rendre visite. On a appris qu’il avait été torturé et très grièvement blessé par les militaires qui l’ont arrêté et emmené menottes aux poignets. Nous avons tous été malmenés sans exception. »

Depuis le coup d’État lundi dernier en Birmanie, la désobéissance civile se met en place. Concerts de casseroles tous les soirs à 20h, fermetures de certains magasins, c’est à présent au tour des médecins de lancer un appel à la grève dans de nombreuses villes à travers tout le pays. Mercredi, plusieurs médecins qui manifestaient ont été arrêtés à Mandalay, d’autres ont réussi à prendre la fuite. À Rangoun, le mouvement de désobéissance contre la dictature militaire prend forme, et ce malgré la pandémie, comme l’explique à RFI une chirurgienne qui a souhaité gardé l’anonymat.

« Plus d’une centaine d’hôpitaux publics, soit plus de mille médecins, infirmières et personnels soignants ont entamé une campagne de désobéissance civile aux militaires. Certains ont quitté leurs postes, d’autres vont continuer à soigner les patients,, mais ils ne répondront plus aux ordres du gouvernement militaire. Autrement dit, certains ont cessé le travail et d’autres porteront un bandeau rouge pour signifier qu’ils sont prêts à soigner les patients, mais qu’ils refuseront dorénavant de recevoir des instructions de l’armée. Même si certains services ont été fermés dans les hôpitaux publics, il sera toujours possible pour les patients qui en ont besoin, de se rendre dans les cliniques, où les généralistes prendront soins d’eux. Ce n’est que le tout début de la campagne de désobéissance. Enfin, beaucoup de gens à l’étranger envisagent d’ouvrir une sorte de caisse d’urgence pour recueillir des fonds et aider tout ceux qui ont quitté leur poste. Ceci n’est pas un conflit entre la LND et l’armée, c’est un conflit entre la volonté du peuple et les militaires. »

RFI