Covid-19: en Chine: à Yiwu, le streaming pour se reconnecter aux acheteurs à l’étranger

Covid-19: en Chine: à Yiwu, le streaming pour se reconnecter aux acheteurs à l'étranger
Covid-19: en Chine: à Yiwu, le streaming pour se reconnecter aux acheteurs à l'étranger

Comment redémarrer les économies plombées par le Covid-19 ? À Yiwu, le grand marché du sud de la Chine, les usines ont redémarré à la fin du printemps dernier, comme dans l’ensemble du pays. Problème : avec les restrictions aériennes et la fermeture des frontières, les acheteurs ne peuvent plus venir. Pour continuer à exporter, les marchands de Yiwu se sont donc lancés dans le live streaming, les vidéos en direct de vente en ligne.

De notre envoyé spécial à Yiwu,

Changement de bureau pour Abacar Niang. Un espace plus grand au centre de Yiwu, malgré la pandémie qui continue de freiner les voyages et les échanges. La petite entreprise de ce Dakarois installé en Chine ne connaît pas la crise. Le patron du groupe TGS connaît par cœur les allées du plus grand marché de détail de la planète, mais aujourd’hui, ce n’est plus dans les boutiques que l’on passe commande.

« Il y a toujours des boutiques fermées, quand même, nous explique Abacar. Il y a moins de visiteurs. Ça commence à ouvrir, mais le reste des commerçants et les autres, pour l’instant, ne sont pas autorisés à revenir. »

Pour s’adapter à l’absence d’acheteurs coincés hors des frontières chinoises, les ventes se font sur Internet. L’une des pièces du nouveau bureau d’Abacar est réservée au live streaming. Une caméra ou un smartphone sur un pied, une lampe et ça suffit.

« Je reçois des commandes pendant le live »
« Moi, j’aime beaucoup cette nouvelle idée du live streaming parce que ça aide à vendre plus, souligne-t-il. Avant, les gens montraient des produits sur des photos. Mais maintenant, tu fais des démonstrations, c’est très pratique, et les gens, ils ont confiance. »Ce qui, pendant le Covid, donne un moyen de communiquer toujours avec les clients.« Ça coûte moins de 20 euros, ajoute Abacar. Au moment même où je fais le live, je reçois des commandes. »

Abacar vend ses produits chez lui, au Sénégal, et dans d’autres pays de l’Afrique francophone notamment. Il n’est pas seul. À Yiwu, tous les marchands ou presque se sont mis à ces diffusions en direct sur internet pour vendre leurs produits. Près du marché se trouve un grand bâtiment blanc : « On est devant un immeuble qui fait du livestreaming, explique Abacar. C’est à peu près 20 étages. Dans tout le building, ils font du live streaming pour vendre en ligne. »

Le troisième étage est peuplé de petites cabines vitrées où des jeunes femmes le plus souvent font des démonstrations en direct face caméra. Sun, 30 ans, dirige une startup qui aide les marchands chinois à s’adapter à cette nouvelle façon d’exporter. « Nous faisons essentiellement la promotion des produits fabriqués à Yiwu : des jouets, des cosmétiques, des produits textiles ou des articles de décoration. Les ventes en directe via le Net existent depuis longtemps à l’intérieur de la Chine. En revanche, pour les ventes à l’étranger, c’est tout nouveau. La plateforme internationale d’Alibaba a démarré il y a un peu plus de trois mois. »

Marché de 14 milliards d’euros
L’industrie chinoise de la diffusion en direct a été multipliée par 16 entre 2015 et 2019 pour atteindre près de 14 milliards d’euros. Une utilisation jusqu’à présent essentiellement réservée au marché intérieur. Mais avec la fermeture des frontières, la suspension des visas, les plateformes de vente en live streaming s’attaquent désormais aux marchés étrangers. Au tribunal des litiges de Yiwu, on s’est aussi très vite adapté.

« Nous avons reçu récemment une plainte d’un client malaisien, confie Lily, l’une des employées du tribunal. Il avait passé commande sur une plateforme de vente en ligne après une démonstration en streaming. Pour régler son différend avec le vendeur chinois, nous les avons mis en lien via la messagerie WeChat. Au final, le vendeur a accepté de payer 250 euros d’indemnités. Ce n’était pas un gros achat et c’est plus économique de régler les choses ainsi que de devoir prendre l’avion. »

Mais pour l’instant, de toute façon, il n’y a pas, ou peu, d’avions. Les plateformes de vente en ligne ont donc de beaux jours devant elles en Chine, où l’on devrait compter dans les quatre ans plus de 640 millions d’utilisateurs.

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