Covid-19 : quand le confinement fait flamber la cyberviolence

Covid-19 : quand le confinement fait flamber la cyberviolence
Coronavirus (COVID-19) Outbreak Laboratory Research & Quality Control on a high technology equipment.

L’Association e-Enfance a enregistré une hausse de 57 % des cyberviolences sur sa ligne d’assistance Net Ecoute en 2020 par rapport 2019. Le phénomène a été démultiplié par les mesures de confinement et l’explosion de l’utilisation des réseaux sociaux que cela a entraîné.

À quelques jours du Safer Internet day [programme de prévention et d’éducation aux bons usages d’Internet], organisé le 9 février, l’association e-Enfance alerte sur les cas de cyberviolences subies par des adolescents. Sa ligne d’assistance Net Écoute a enregistré une hausse de 57 % des violences numériques en 2020, par rapport à 2019. Les 15-17 ans sont principalement concernés.

Pour Justine Altan, directrice générale de e-Enfance contactée par France 24, il ne fait aucun doute que les confinements ont eu un impact sur la cyberviolence chez les adolescents. Elle explique que les différentes formes de violence numérique « ne sont pas des phénomènes nouveaux ». « Ce qui est nouveau c’est leur quantité et le moment de l’année », souligne-t-elle.

« [La crise du Covid-19] a accéléré beaucoup d’usages dans tous les domaines et notamment sur le numérique. Ça a d’ailleurs touché aussi les adultes avec le télétravail, par exemple. L’effet a été le même pour les ados. Ça les a rapidement fait basculé dans des usages qu’ils auraient peut-être eu plus tard. »

Les mesures de confinement ont effectivement réduit les espaces de socialisation de toute la population et les échanges des Français se sont, d’une manière générale, déportés sur les réseaux sociaux et messageries en ligne.

« Les adolescents se sont retrouvés enfermés chez leurs parents, ce qui est un peu l’enfer pour eux. Ils ont eu besoin de se retrouver entre paires sur ces plateformes », explique Justine Altan.

« Humiliation à grande échelle »

Mais le cyberharcèlement en lui-même est devenu inquiétant avant le confinement. Selon un sondage réalisé par l’ONU en 2019 auprès d’adolescents de 30 pays, un jeune sur trois déclarait avoir été victime de cyberharcèlement, et un sur cinq avoir manqué l’école à cause de ce phénomène.

Le 5 novembre 2020, à l’initiative de la France, l’Unesco avait lancé la première journée internationale de lutte contre les violences scolaires – dont le cyberharcèlement fait aujourd’hui largement partie.

L’enquête réalisée du 4 au 14 février 2020, auprès de 1 000 parents et leurs enfants (500 collégiens âgés de 10 à 15 ans et 500 lycéens âgés de 15 à 19 ans) par e-Enfance permet de prendre la mesure de ce phénomène.

Il ressort du bilan de l’association des chiffres alarmants. « Un adolescent sur dix déclare avoir été déjà victime de cyber-harcèlement ». Parmi les causes de ces violences, la « jalousie ou l’envie » arrivent en tête des réponses (39 %), suivies du « physique » (33 %) et de la « vengeance » (22 %).

Généralement exercée sur les réseaux sociaux et messageries, ces violences peuvent prendre la forme « d’insultes et d’injures écrites », de « divulgation d’images personnelles sans consentement » ou encore de « groupes créés, dont on vous fait savoir que vous êtes exclus », énumère Justine Altan.

Parmi ces violences, certaines, comme le « revenge porn » [« vengeance » sous forme de diffusion de contenu sexuellement explicite rendu public sans le consentement de la personne impliquée], concernent plus particulièrement les jeunes filles alors que les garçons sont plus souvent la cible de chantage à la webcam, précise Justine Altan. Deux pratiques qui ont « explosé » en 2020, selon e-Enfance.

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Autre chiffre inquiétant révélé par l’association : « 15 % des adolescents estiment que ‘liker’ un commentaire insultant n’est pas considéré comme du cyber-harcèlement ». Or, les violences numériques chez les adolescents reposent en bonne partie sur l’effet de masse. Dans le cas de diffusion d’images personnelles sans consentement de la victime, Justine Altan parle « d’humiliation à grande échelle, avec toute la violence des autres qui vont partager ».

Informer

La responsable déplore le peu de moyen permettant d’identifier un mineur dans la sphère numérique afin de lui interdire certains usages. Alors, pour elle, la solution aux cyberviolences passe avant tout par l’information des parents. Selon l’enquête menée par e-Enfance, 51 % des parents interrogés ont d’ailleurs plébiscité une formation sur les usages du numérique par les adolescents et la violence en ligne.

« Les parents sont une tranche de la population qui n’est pas facile à toucher », avance Justine Altan. « Nous avons constaté que cela ne marchait pas très bien de les sensibiliser via l’école, car ils n’ont pas tant de lien que ça avec. Depuis quelques années, nous sommes plus favorables à les toucher sur leur lieu de travail […]. C’est un lieu où l’on peut les sensibiliser à la sécurité en ligne en général. »

C’est aussi le but du Safer Internet day. Organisée en février depuis 2004, cette journée d’information et de prévention sur les risques du numériques aura une portée particulièrement importante en cette période de pandémie, de couvre-feu et de confinement.