Durant trois décennies, il a dirigé la prestigieuse NBA, en faisant une marque unique et extrêmement prospère. David Stern est mort mercredi à l’âge de 77 ans, des suites d’une hémorragie cérébrale.
« Sans David Stern, la NBA ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui. […] Sans lui, je ne serais pas arrivé là où je suis. J’adresse mes plus sincères condoléances à Dianne (sa femme) et sa famille. » Ces mots sont de Michael Jordan, le plus grand basketteur de tous les temps et l’une des plus immenses stars du sport.
Depuis le 1er janvier 2020, jour de sa mort à l’âge de 77 ans, les hommages se multiplient envers celui qui a dirigé la prestigieuse Ligue nord-américaine de 1984 à 2014. Tous ou presque saluent « un homme d’affaires et un visionnaire » (Magic Johnson), « le meilleur commissioner [« patron », Ndlr] » de la NBA (Shaquille O’Neal)…
De fils d’épicier à maître du ballon orange
Rien ne semblait pourtant prédestiner David Stern à devenir l’un des dirigeants les plus marquants de l’histoire du sport. Fils d’un épicier, ce New-Yorkais s’est lancé dans des études de droits. Devenu conseiller juridique, il travaille entre autre avec la NBA, à partir de 1966. C’est en 1978 qu’il s’engage pleinement avec une ligue alors loin d’être le mastodonte qu’on connaît.
En effet, la NBA a certes déjà vu passer de nombreux champions (Wilt Chamberlain, Bill Russell, Oscar Robertson, Kareem Abdul-Jabbar, etc.) dans ses rangs. Mais elle souffre d’une très mauvaise image (problèmes de racisme et de drogues) et les audiences TV comme les affluences dans les salles ne sont pas toujours au rendez-vous.
En 1984, David Stern accède au poste le plus élevé de l’institution, celui de « Commissaire ». Quelques mois plus tard, il dirige la draft, cette session annuelle durant laquelle les équipes recrutent à tour de rôle les jeunes basketteurs souhaitant intégrer la NBA. Un certain Michael Jordan fait partie du lot.
Le roi du marketing
David Stern comprend vite le potentiel de ce prodige au style spectaculaire et obsédé par la victoire. Avec d’autres artistes comme Larry Bird et Magic Johnson, il dispose d’icônes capables de rendre la NBA incroyablement prospère. Les résultats sont d’ailleurs rapidement au rendez-vous. Mais le Commissioner voit déjà plus loin.
En 1992, David Stern pousse pour que les meilleurs éléments de sa ligue participent aux Jeux olympiques de Barcelone. Résultat : le Team USA, habituellement composé de joueurs universitaires ou de seconds couteaux, se transforme en une Dream Team qui marque à jamais l’histoire des JO. Ces Jeux offrent en retour une incroyable publicité à la NBA et à ses vedettes, hors des États-Unis.
Durant les années 1990, elle devient une marque mondiale. Les fans de basket suivent en direct les exploits de Michael Jordan, partout sur la planète, souvent malgré le décalage horaire. Mais David Stern veut encore passer à l’étape suivante. Après avoir internationalisé le public de la NBA, il veut l’ouvrir bien davantage à des joueurs étrangers. La fin de l’ère Jordan et le début des années 2000 sont ainsi marquées par un afflux de talents européens (Dirk Nowitzki, Paul Gasol, Tony Parker, etc.), des Amériques (Steve Nash, Manu Ginobili, etc.) ou d’Asie (Yao Ming, etc.).
Un homme autoritaire…
Malgré son immense travail, largement salué, David Stern n’était toutefois pas exempt de tous reproches et de toutes critiques. L’homme n’aimait pas la contradiction et s’était montré particulièrement dur et intransigeant lors de négociations avec le syndicat des joueurs NBA, pour la renégociation des conventions collectives. Des négociations qui débouchèrent sur quatre mouvements sociaux (lock-out), dont deux entraînèrent des annulations de matches (saisons 1998-1999 et 2011-2012).
David Stern a aussi grandement contribué à l’aseptisation de la NBA et de ses joueurs. Le « boss » aimait le joueur qu’était Dennis Rodman. Mais il appréciait beaucoup moins le personnage : ses écarts de conduite, ses coups de folie, ses tatouages, ses piercings… Grâce à un strict système de (lourdes) amendes, Stern a réussi à faire rentrer bien des générations de basketteurs dans le rang, les rendant polis et policés parfois à l’extrême.
… et progressiste à la fois
Mais David Stern n’était pas qu’un père fouettard. Il savait aussi se montrer à la pointe sur certaines problématiques comme le racisme ou l’exclusion. Il apporta notamment tout son soutien à Magic Johsnon, lorsque celui-ci révéla sa séropositivité. « Il a tellement fait l’histoire, lâche, ému, l’ex-meneur de jeu des Lakers de Los Angeles. Quand j’ai annoncé en 1991 que j’avais contracté le HIV, les gens pensaient qu’ils auraient le sida en me serrant la main. Quand David m’a permis de jouer le All-Star Game en 1992 puis de participer aux JO de Barcelone avec la Dream Team, on a pu changer le monde ».
LeBron James, l’actuel meilleur basketteur au monde, conclut sur Instagram : « Votre vision pour faire en sorte que notre jeu devienne PLANETAIRE, vous seul pouviez la réaliser. C’est ce que vous avez fait. Faire de notre sport le plus grand sport du monde ! C’était un honneur de vous connaître personnellement. »
RFI