Les premières auditions publiques ont commencé au Congrès américain dans le cadre de la procédure de destitution du président Donald Trump. Deux diplomates de haut rang ont témoigné des pressions exercées sur l’Ukraine.
La procédure de destitution de Donald Trump est désormais retransmise en direct à la télévision. Et le spectacle est au rendez-vous. Premiers à être entendus par le Congrès américain, pendant six heures, les hauts diplomates William Taylor et George Kent ont témoigné des pressions exercées sur l’Ukraine pour qu’elle fournisse des informations susceptibles d’aider le président dans sa campagne pour sa réélection, et ce via un réseau parallèle monté par l’avocat personnel du président, Rudolf Giuliani.
William Taylor, le plus haut diplomate de l’ambassade des États-Unis à Kiev, a ainsi rapporté une conversation à laquelle l’un de ses collaborateurs a assisté le 26 juillet dernier entre l’ambassadeur américain Gordon Sondland et Donald Trump. « Mon collaborateur pouvait entendre le président au téléphone poser des questions à Sondland au sujet des enquêtes. L’ambassadeur Sondland a dit au président que les Ukrainiens étaient prêts à aller de l’avant. Après ce coup de téléphone, mon collaborateur a demandé à Gordon Sondland ce que le président pensait de l’Ukraine. L’ambassadeur Sondland a répondu que le président Trump s’intéressait surtout à l’enquête sur Biden que Giuliani voulait obtenir. Quand j’ai déposé ici le 22 octobre je n’étais pas au courant de cette conversation. »
« Un abus de pouvoir ? »
La veille, le président américain avait demandé à son homologue ukrainien Volodymyr Zelenskiy de « se pencher » sur le démocrate Joe Biden, bien placé pour l’affronter lors de la présidentielle de 2020. La révélation de cet échange, à la mi-septembre, a décidé les démocrates à ouvrir une enquête dans le cadre de l’explosive procédure de destitution. Les démocrates soupçonnent Donald Trump d’avoir abusé de ses pouvoirs à des fins personnelles, en conditionnant une aide militaire à l’Ukraine et une visite à la Maison Blanche de Volodymyr Zelensky à l’ouverture d’une enquête sur Joe Biden.
Le président républicain « a-t-il invité l’Ukraine à s’ingérer dans nos élections ? » « A-t-il commis un abus de pouvoir ? », s’est interrogé le parlementaire démocrate Adam Schiff, en ouvrant les premières auditions publiques. « L’affaire est aussi simple et terrible que cela », a ajouté l’élu de la Chambre des représentants qui supervise l’enquête, en promettant d’avancer « sans rancoeur » ni « délai ».
Donald Trump a affirmé ne pas avoir suivi les auditions. Il travaille dans le Bureau ovale, il ne regarde pas la télévision, a assuré dans la matinée sa porte-parole. Dans l’après-midi, le président américain recevait son homologue turc à la Maison Blanche. Il a une nouvelle fois qualifié la procédure de chasse aux sorcières.
Vous voulez parler de la chasse aux sorcière ? C’est une blague. Je ne l’ai même pas regardée. Même pas une minute parce que j’étais avec le président Erdogan ce qui me semble beaucoup plus important. C’est une comédie. Ça ne devrait pas être permis. Tout cela a été causé par des gens qui n’auraient pas dû avoir le droit de le faire.
Un témoignage potentiellement explosif
Mais les républicains ne se sont pas laissé abattre. Ils ont tenté de focaliser l’attention sur le fils de Joe Biden, ils ont dénoncé des témoignages de seconde main. Et c’est vrai qu’aucun des deux diplomates n’a pu directement mettre en cause le président. Bien que très précis et clairs dans leurs propos, ils n’ont fait que détailler un faisceau de présomptions, fondées sur les déclarations de personnalités, qui elles refusent de témoigner, conformément à l’ordre du président.
Les élus républicains ont eux dénoncé « une campagne de calomnie orchestrée avec minutie dans les médias », reprenant la ligne de défense du président Trump qui se dit victime d’une « chasse aux sorcières ». Une dénonciation que le locataire de la Maison Blanche a encore répétée ce mercredi, évoquant un « canular ».
Reste que cet échange téléphonique rapporté par William Taylor n’avait encore jamais été évoqué. Il est potentiellement explosif. Gordon Sondland, un important donateur de la campagne du président nommé ambassadeur auprès de l’Union européenne, doit témoigner à son tour la semaine prochaine. S’il confirme cette conversation, la défense du locataire de la Maison Blanche, qui dément toute pression sur l’Ukraine, sera sérieusement mise à mal.
Rfi