A peine rentré de Paris, où il a célébré la paix avec les autres dirigeants du monde, Donald Trump s’est vivement attaqué mardi à la France et à Emmanuel Macron, dont il a raillé la « très faible cote de popularité ».
Dans une série de tweets particulièrement énervés, le président des Etats-Unis est revenu sur la proposition de son homologue français de créer une armée européenne, déjà jugée « très insultante » au début du weekend de commémorations du centenaire de la fin de la Première Guerre mondiale.
« Emmanuel Macron a suggéré la création de leur propre armée pour protéger l’Europe contre les Etats-Unis, la Chine et la Russie. Mais c’était l’Allemagne dans la Première et la Seconde Guerre mondiale », a-t-il écrit sur Twitter.
Les Français « commençaient à apprendre l’allemand à Paris avant que les Etats-Unis n’arrivent », a-t-il ironisé, dans une référence très peu diplomatique à l’occupation par l’Allemagne nazie à partir de 1940 jusqu’à la Libération par les Alliés, encore vécue comme un traumatisme dans l’Hexagone.
« Paie pour l’Otan ou non », a-t-il poursuivi, reprenant sa supplique aux pays européens membres de l’Alliance atlantique pour qu’ils dépendent moins des dépenses militaires américaines pour leur défense.
Peu importe si le président français assure que c’est justement dans cette optique qu’il plaide pour « une vrai armée européenne ». Le locataire de la Maison Blanche n’a pas digéré que celui de l’Elysée évoque, dans le même temps, la nécessité de « protéger » le Vieux Continent « de la Chine, de la Russie et même des Etats-Unis d’Amérique » dans le domaine du cyberespace — créant une « confusion » de l’aveu même de la présidence française.
« MAKE FRANCE GREAT AGAIN »
Malgré les propos de plusieurs parlementaires français d’opposition qui appellent à « taper du poing sur la table », l’Elysée est resté discret, savourant en silence le renfort de la chancelière allemande Angela Merkel sur ce projet d’armée européenne.
Mais Donald Trump, qui avait chaleureusement remercié Emmanuel Macron au terme de son déplacement français, a enchaîné avec d’autres tweets polémiques au moment où la France commémorait le troisième anniversaire des attentats jihadistes qui ont fait 130 morts en 2015.
Visiblement agacé par les commentaires dans les médias américains, il a assumé son annulation, pour cause de mauvais temps, d’un hommage dans un cimetière américain du nord de la France samedi.
Et il a réagi à la dénonciation solennelle du « nationalisme » par le président français, qui a résonné comme une critique de son homologue américain, principal pourfendeur du multilatéralisme.
Le milliardaire républicain, qui se revendique comme nationaliste, est passé à la contre-offensive depuis Washington. « Il n’y a aucun pays plus nationaliste que la France, des personnes très fières — à juste titre », a-t-il lancé.
L’attaque a ensuite visé personnellement Emmanuel Macron et son bilan à la tête de la France.
« Le problème est qu’Emmanuel Macron souffre d’une très faible cote de popularité en France, 26%, et d’un taux de chômage à près de 10% », a relevé Donald Trump.
« MAKE FRANCE GREAT AGAIN », l’a-t-il exhorté en écho à son propre slogan, « Rendre à l’Amérique sa grandeur ». Cette formule fait l’objet d’échanges acerbes entre les deux hommes: le Français l’avait lui-même détournée pour dénoncer la décision de l’Américain de se retirer de l’accord de Paris sur le climat, en martelant « Make our planet great again ».
Au passage, l’homme d’affaires a aussi foulé le terrain commercial, s’en prenant au vin, produit emblématique s’il en est en France, pour déplorer que les vignerons français puissent plus facilement exporter leurs bouteilles aux Etats-Unis que l’inverse.
L’ex-secrétaire d’Etat démocrate John Kerry a regretté l’attitude du président républicain, qui « a déclaré son amour pour Kim Jong Un », le dirigeant nord-coréen, « mais insulte notre plus vieil allié ». « Arrêtez de tweeter! L’Amérique a besoin d’amis », a-t-il ajouté.
Mais la porte-parole de la diplomatie américaine a balayé la polémique. « Beaucoup de bruit pour rien », a estimé Heather Nauert, réaffirmant la relation « étroite » avec la France, « un de nos plus anciens et importants alliés ».
Pour Marie-Cécile Naves, spécialiste des Etats-Unis à l’Institut de relations internationales et stratégiques, Donald Trump « instrumentalise sa relation avec le président Macron pour faire passer des messages de politique intérieure » et donner « une image des Etats-Unis combatifs, seuls contre tous qui ne se laissent pas dicter d’agenda par des pays étrangers ».
Jusqu’ici relativement épargné, Emmanuel Macron découvre, comme l’Allemande Angela Merkel ou la Britannique Theresa May avant lui, les foudres du 45e président des Etats-Unis, souvent soupçonné de mieux s’entendre avec les hommes forts de pays adversaires qu’avec ses propres alliés.
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