Le président français Emmanuel Macron est en Egypte jusqu’au mardi 29 janvier 2019. Une visite officielle qui doit permettre de renforcer les liens entre les deux pays, signer une trentaine de contrats économiques mais aussi d’évoquer la question sensible des Droits de l’homme.
La question est récurrente quand on parle de l’Egypte. Depuis l’accession au pouvoir d’Abdel Fatah al Sissi en 2014, la situation des droits de l’Homme dans le pays ne cesse de se dégrader, selon plusieurs organisations non gouvernementales. Human Rights Watchnotamment dénonce des arrestations sommaires et l’emploi systématique de la torture. « Au moins 60 000 personnes depuis l’arrivée de Sissi ont été soit arrêtées soit poursuivies uniquement pour avoir exprimé leur opinion de manière pacifique, selon Ahmed Benchemsi, responsable du Moyen-Orient au sein de l’organisation, 19 prisons ont été construites uniquement sous ce régime car l’afflux de prisonniers politiques était tel qu’il fallait construire 19 prisons pour les accueillir ! ».
Emmanuel Macron a promis de parler de cette question des Droits de l’homme lors de son entretien avec le président Sissi ce lundi, de manière « plus ouverte » que lors de leur rencontre à Paris en octobre 2017, car «les choses se sont empirées», selon Emmanuel Macron. A l’époque, le président français avait refusé de « donner des leçons à son homologue égyptien », ce qui avait particulièrement hérissé les défenseurs des droits de l’homme.
Un allié stratégique pour relever les défis sécuritaires
Mais la visite d’Emmanuel Macron sera surtout un moyen de renforcer le partenariat stratégique entre la France et l’Egypte, en matière de stabilité et de sécurité dans la région. L’Egypte est considérée comme un allié « essentiel », un rempart au terrorisme, pour la France. Paris vend des armes au régime d’Abdel Fatah al-Sissi et l’Egypte a besoin de cette aide militaire car les défis à relever sont multiples.
Selon Tewfik Acclimandos, politologue et enseignant à l’Université du Caire, « il y a un terrible défi interne au niveau islamiste et aussi tous les défis extérieurs : l’Egypte doit sécuriser la mer Rouge, la zone économique où il y a du gaz dans le nord-est. Il y a une catastrophe devant l’Etat failli en Libye, le Sinaï et le Hamas sont problématiques (…), il faut aussi faire un peu peur à l’Ethiopie, ça peut être utile, et le Soudan si ça continue pourrait se joindre à la liste des Etats faillis… il y a donc énormément de problèmes ».
La France a livré récemment 24 avions de combats Rafales à l’Egypte. D’autres commandes pourraient suivre, même si aucune annonce n’est prévue lors de cette visite d’Emmanuel Macron. Ce qui pose problème, pour les organisations de défense de Droits de l’homme, c’est l’utilisation de ces armes. Certaines auraient été détournées de leur usage premier -la lutte contre le terrorisme- pour réprimer l’opposition égyptienne lors de manifestations.
Détournement de ventes d’armes pour réprimer les manifestations d’opposants
« Les armes vendues par la France sont vendues sous couvert d’opération militaire mais un rapport d’Amnesty international et d’une autre organisation a démontré clairement que des blindés français prétendument vendus pour des opérations militaires ont en fait été vues dans des dispersions violentes de manifestants, rappelle Ahmed Benchemsi. Il s’agit de violations claires de Droits humains. Où est le suivi étatique de ces ventes d’armes ? »
L’utilisation de véhicules blindés français lors de la répression de manifestations en Egypte embarrasse Paris, même si le contrat de ventes de ces blindés remonte à plusieurs années. La France dit avoir renforcé depuis, ses contrôles pour éviter que ce type de situation se reproduise à l’avenir.
Rfi