En Irak, les médias tombent sous les coups du pouvoir

Accusés par le pouvoir d’alimenter le mouvement de protestation, une dizaine de médias ont été contraints de mettre la clé sous la porte. La décision, prise par la Commission irakienne des médias et des communications, attise la colère des journalistes de ce pays, parmi les moins libres selon Reporters sans frontières
Le pouvoir en Irak les accuse d’alimenter la révolte populaire débutée le 1er octobre dernier. À la suite d’une décision de la Commission irakienne des médias et des communications, une dizaine de médias irakiens ont été contraints de fermer leurs portes. Dans le pays, 156e (sur 180) du classement mondial de la liberté de la presse 2019, les journalistes sont furieux.

Le gouvernement les accuse notamment d’inciter la population à descendre dans la rue pour manifester contre le pouvoir.

« Museler et empêcher les médias de jouer leur rôle montre qu’il y a un déséquilibre dans le processus démocratique », lance Bassem al-Sheikh, journaliste pour le quotidien Al-Dustour. « Ils tentent de cacher des faits à la société et à l’opinion publique ».

Pour Imad Abbadi, l’un de ses confrères, « c’est même devenu un problème en Irak, ce n’est pas qu’un problème interne à l’Irak ». En effet, celui-ci explique que la fermeture des médias n’implique pas uniquement la fermeture de chaînes satellite, mais aussi « l’interruption d’Internet ».

Attaqués par des milices progouvernementales

Les manifestations en Irak ont commencé le 1er octobre dernier. Les Irakiens, présents en nombre dans les rues depuis, reprochent au gouvernement de ne pas avoir pu baisser le taux de chômage, mais dénoncent aussi la défaillance des services publics et la corruption endémique dans le pays.
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Plusieurs centaines de manifestants y ont laissé leur vie, tués dans des affrontements avec les forces de sécurité. Des milliers d’autres protestataires ont été blessés.

« Certains partis qui se disent inquiets pour la liberté de la presse ou le statut des syndicats au sein de la presse ont été assez laxistes pour ouvrir la voie à la répression dans les médias existants, que ce soit dans les médias locaux ou étrangers », explique Hashem Hassans, doyen de la faculté de communication de l’Université de Bagdad.
En Irak, que l’organisation internationale Reporters sans frontières considère comme dangereux pour les journalistes, les reporters sont souvent attaqués par des milices progouvernementales. Les meurtres de journalistes, eux, restent très souvent impunis.