Enjeu d’un retour d’exil : Karim Wade, cheval de Troie du Qatar en Afrique

Affectant de repositionner Karim Wade en pion d’interconnexion de ses réseaux africains, le Qatar ne ménagerait aucun effort pour voir l’ex-leader de la Génération du Concret accéder au plus haut destin politique. Déjà, lors de la visite effectuée par l’émir en Afrique au mois de décembre passé, le fils du Pape du Sopi a, en binôme avec Nicolas Sarkozy, joué un rôle décisif pour aider à ouvrir les portes de plusieurs capitales de la sous-région. C’est ainsi que les prochains jours dévoileront la stratégie concoctée à Doha pour permettre le retour au bercail de l’ex-ministre d’Etat, qui a fini de gagner la bataille juridique au plan international.

Notre confrère Libération a bien fait de relater que le sort de Karim Wade a été au menu des échanges lors du dernier séjour effectué au Sénégal par le procureur spécial du Qatar.

Presque quatre mois après, aucune information n’a fuité des pourparlers entre Macky Sall et le Cheikh Hamad bin Khalifa Al Thani, alors que toutes les autres étapes de ce périple ouest-africain ont été marbrées par écrit grâce à des communiqués signés conjointement et publiquement avec Doha.

Ainsi, tout porte à croire que l’émir était au Sénégal uniquement pour plaider la cause de Karim Wade, à l’effet de permettre à ce dernier d’être candidat à la présidentielle de 2019, conformément à une clause non-écrite du fameux Protocole de Doha. A cet égard, ce n’est pas pour rien qu’en septembre 2017, à la faveur d’un entretien accordé à la Sen Tv, l’ambassadeur d’Arabie Saoudite au Sénégal, Abdallah Ahmed Al Abdal, a révélé que le Qatar a, en vain, manœuvré en sous-sol pour obtenir le retour d’exil de Karim Wade durant le mois de Ramadan. Pourquoi ce mois béni du calendrier musulman ? Parce que rappellent nos sources, lorsque le candidat désigné du Pds à la présidentielle de 2019 était libéré un an plus tôt en 2016, l’idée était d’éloigner, pendant douze mois, de la scène politique sénégalaise, un acteur encombrant, histoire d’attendre pour savoir comment les juridictions hors du Sénégal allaient trancher la pomme de discorde.  En clair, si le camp présidentiel soutient que Wade-fils a quitté la prison de Rebeuss les mains liées, pour la partie adverse, cette libération s’est faite à la demande de Macky Sall, sous les auspices de Cheikh Hamad bin Khalifa Al Thani, qui aurait préalablement reçu des gages quant à la faisabilité d’un come-back de Karim sur la scène politique sénégalaise un an plus tard. C’est dire que l’étape de Dakar ne faisait pas partie de l’agenda officiel de ce périple pour mériter le moindre communiqué, que le contenu des échanges entre le chef de l’État et son hôte se résumerait au dossier Karim Wade. Pour cacher le jeu, des accords sans enjeux majeurs et dont on a cessé de parler depuis lors, devaient être signés entre les deux parties.

Sous ce rapport, il n’est pas exclu que Doha soit le parrain omniprésent et bailleur super-liquide d’une candidature de Karim Wade. La programmation du retour au bercail de Wade-fils, réclamé par un concurrent aussi entêté qu’Idrissa Seck, loin d’être un fantasme d’enfant gâté, obéit à une stratégie bien coordonnée qui sera dévoilée dans les prochains jours. Le deal postulerait de laisser au candidat du Pds le temps de remporter définitivement la bataille juridique sur le plan international avant de défendre son dossier de candidature là où il est possible d’exercer une pression diplomatique. C’est en quoi le projet de modification du Code électoral, agité juste après le dénouement de ce bras de fer juridique, intrigue plus d’un. Si le but est encore d’écarter Karim de la course, cela voudrait dire que malgré sa condamnation par la CREI, le libéral garde encore intactes ses chances de se présenter. Autrement, on ne recourrait pas à ce énième subterfuge pour lui porter ombrage.

En définitive, en signant ses lettres par le slogan « Vive l’Afrique », l’ancien président du Conseil de surveillance de l’ANOCI se voudrait l’exécutant d’une volonté arabe de faire de Dakar une brèche par laquelle Doha irait à la conquête de l’Afrique. Partant, l’émirat pourrait user de son influence pour convaincre son monde de la validité de la candidature de Karim, que seule la modification en vue du Code électoral pourrait empêcher.

 

 

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