Les prises de parole fusent, le statu quo demeure. Bousculée lundi par un nouvel appel à « renoncer » à la saison de football interrompue par la pandémie, la Ligue française (LFP) a dit « travailler » sur « les meilleures conditions de la reprise », malgré l’ombre persistante du coronavirus.
Redémarrer la saison 2019/20, vraiment ? Plusieurs présidents de club, à l’image du Lyonnais Jean-Michel Aulas ou du Brestois Denis Le Saint, ont déjà affiché leur scepticisme face à une reprise de la Ligue 1, suspendue depuis le 13 mars.
Mais lundi, la flèche est venue du camp des joueurs, avec une tribune signée Sylvain Kastendeuch, le co-président du syndicat des footballeurs français (UNFP), dans le quotidien Le Monde.
« L’urgence économique ne doit pas prendre le pas sur l’impératif de santé publique. Renonçons à une reprise du championnat dans ces conditions (…) qui serait précipitée et dangereuse », a écrit l’ancien défenseur emblématique du FC Metz.
Et l’ex-international français d’ajouter: « Rassemblons dès aujourd’hui les conditions d’une prochaine saison réussie et exemplaire de ce football que l’on aime tant. Acceptons l’idée d’une forme de destruction créatrice, engendrée par cette crise. »
– « Protocole sanitaire » en préparation –
Ce dirigeant de l’UNFP redoute que les conditions de sécurité sanitaire et physique pour protéger les joueurs ne soient pas réunies alors que la Ligue de football (LFP) espère achever avant fin juillet la saison 2019/20 de L1 et L2.
La LFP planche activement sur cette hypothèse, avec comme épée de Damoclès l’épineuse question des droits télévisuels, dont les copieuses recettes sont pour l’heure suspendues par les diffuseurs beIN Sports et Canal+. Mais elle reste dépendante des mesures sanitaires imposées en France, où le Covid-19 a fait près de 20.000 morts selon un dernier bilan.
La Ligue est « en attente des modalités de déconfinement que le gouvernement annoncera à la fin du mois d’avril, et en particulier les conditions dans lesquelles les matches pourraient se jouer à huis clos », a-t-elle rappelé lundi, réagissant dans un communiqué aux « nombreuses prises de parole » faites sur le sujet.
Sa direction, ajoute-t-elle, « travaille » avec les ministères des Sports et de l’Intérieur « pour étudier les meilleures conditions de la reprise garantissant d’abord la santé de tous les acteurs ainsi que l’équité sportive et la pérennité économique du football professionnel ».
Un « protocole sanitaire et médical de reprise des entraînements » est actuellement à l’étude, est-il par ailleurs précisé.
– Inquiétudes –
Ce discours rassurant suffira-t-il à éteindre les inquiétudes et interrogations des joueurs, entraîneurs et salariés des clubs ? A écouter Philippe Piat, l’autre co-président de l’UNFP, ce n’est pas gagné.
En cas de reprise, « est-ce qu’on peut jouer tous les trois jours les matches les plus importants de la fin de saison ? Est-ce que les moyens de locomotion vont marcher ? Est-ce que les hôtels seront ouverts ? », s’interroge auprès de l’AFP le représentant des joueurs.
Autre question: « Si on trouve trois cas d’infection dans une équipe, on fait quoi ? On met les autres en quatorzaine ? On joue avec trois joueurs en moins ? ». Un club luttant contre la relégation pourrait être contraint de jouer « avec une équipe décimée », relève-t-il.
Pour Piat, en somme, il est urgent d’attendre. Et l’UNFP, contrairement à ce que les propos de Kastendeuch « laissent supposer », ne veut pas tirer un trait sur la saison en cours.
« Non. On milite pour l’arrêt si les conditions de reprise ne sont pas suffisantes pour respecter la santé des joueurs », nuance-t-il, renvoyant la balle aux têtes pensantes de la LFP.
Les dirigeants doivent « nous dire comment ils vont faire et on verra si les planètes sont alignées pour une reprise », conclut Piat.