Avec plus de 38 points par match, James Harden affole les compteurs comme personne. Même Michael Jordan en 1987 ne marquait pas autant de points (37,1). Sauf que le virtuose des Rockets n’a toujours pas gagné le moindre titre malgré ses performances impressionnantes au scoring.
Ça n’arrête pas de tomber. Nouveau match et nouveau carton offensif de premier plan pour James Harden, auteur de 55 points contre les Cavaliers la nuit dernière (victoire 116-110 des Rockets). Ses adversaires ne savent plus quoi faire pour essayer de ralentir le MVP 2018. Ils ont déjà tout entrepris. En vain. La superstar de Houston crée un sentiment d’impuissance auprès des défenseurs qui encaissent mécaniquement ses paniers les uns après les autres, soir après soir Harden répète les exploits sur un rythme plus vu depuis le grand Michael Jordan. Il affiche désormais une moyenne hallucinante de 38,7 points par rencontre depuis le coup d’envoi de la saison. Un an seulement après avoir plafonné à 36,1, une marque déjà historique. Seuls trois joueurs ont fini l’ensemble d’un exercice avec 35 pions ou plus depuis la fusion de la NBA et de l’ABA en 1976 : Kobe Bryant en 2006 (35,4), MJ par deux fois (35 en 1988 et 37,1 en 1987) et donc le barbu qui bouclera probablement une deuxième année de suite au-dessus du seuil référence. Son pourcentage est moins bon que celui de Jordan en apparence : 43% aux tirs contre 48% pour le géant de Chicago. Mais une fois pondéré avec les trois-points et les lancers – un baromètre qui donne plus de valeur aux tentatives de loin – Harden est plus adroit. Il passe moins de temps sur le parquet mais joue plus de possessions car le rythme des matches s’est accéléré les années 90 avant de prendre un sérieux tournant depuis quatre ou cinq ans. Il marque un peu plus une fois les chiffres ramenés sur 36 minutes (36 contre 33) mais tout autant sur 100 possessions (46 chacun). Pas facile de déterminer laquelle des deux saisons est la plus fantasques au scoring. C’est une question de sensibilité.
Il a rendu la performance banale mais c’est en réalité assez ahurissant. Sa saison est la plus impressionnante au scoring depuis celle de Jordan en 87. La comparaison est tentante. Le futur sextuple champion NBA avait seulement 23 ans quand il s’est mis à marcher sur toutes les défenses de la ligue. Il était encore jeune, fougueux mais déjà déterminé. Sans avoir l’expérience pour doser son énergie. Doug Collins le faisait jouer 40 minutes par soir. Le numéro 23 des Bulls prenait plus de 27 tirs sans jamais s’aventurer au-delà de la ligne à trois-points (12 sur 66 derrière l’arc sur l’intégralité de la saison). Toujours dans l’agression. Il a tiré 972 lancers-francs en 1987. Même Harden, pourtant critiqué pour sa manière de provoquer des fautes et pour le traitement que lui accordent les arbitres, n’a jamais été autant envoyé sur la ligne. Jojo était plus fort et plus aérien que les autres. Il fonçait vers le cercle pour finir au panier ou s’arrêtait à mi-distance pour dégainer en suspension. C’était une autre époque.
James Harden évolue dans un registre différent. Il est moins athlétique que son aîné mais il est aussi très robuste. Les deux joueurs font sensiblement la même taille. Ils sont tous les deux très forts sur leurs appuis. Quasiment impossible à bouger. Sauf que le maestro des Rockets est beaucoup plus porté vers le tir extérieur. Il est aussi bien plus âgé. 30 ans. Au sommet de son art après 11 saisons passées chez les professionnels. Il ne découvre pas ses supers-pouvoirs, il les maîtrise. Ça donne donc presque 39 points par match en 24 tentatives, dont presque 14 derrière la ligne à trois-points !
Mais l’ancien sixième homme du Thunder a de nombreux arguments en sa faveur. Plusieurs statistiques analytiques tendent à prouver qu’il n’y a jamais eu un joueur aussi fort – ou plutôt aussi efficace – que lui en un-contre-un. Il est bien parti pour décrocher un troisième titre de meilleur scoreur de la saison, ce que seuls MJ et Kevin Durant ont fait avant lui, tout en devenant l’un des trois mastodontes à finir au-dessus des 38 (avec l’inévitable Wilt Chamberlain et Elgin Baylor).
N’empêche qu’il n’y aurait probablement jamais eu de James Harden sans un Michael Jordan avant lui. Le G.O.A.T. a donné le pouvoir aux arrières avec ses performances et le prolongement s’est fait jusqu’aux meneurs, ou à tous ceux qui portent la balle, avec le temps. Ils sont chacun les parfaits représentants de leur génération au scoring. Jordan celui du temps où le tir à mi-distance était l’art noble au milieu des mammouths. Harden celui de la révolution du ‘money ball’, du jeu rapide et du trois-points à outrance.