La situation de Dakar, devenue le foyer de l’épidémie du coronavirus avec plus de 2600 cas enregistrés, appelle aujourd’hui au retour des règles comme la fermeture de certains lieux de culte, des marchés et des écoles, selon Dr Babacar Niang de la clinique Suma Assistance. D’après ce clinicien, « il n’y a plus de lits disponibles à Dakar » surtout que « les chiffres sont biaisés ». Des chiffres qui, prédit-il, atteindront bientôt la barre des 15 000 cas testés positifs ! Le débat est posé sur le cas de la région de Dakar qui représente 2525 cas sur les 3429 dépistés positifs à travers le territoire national. Le ministre de la Santé a déploré la situation dramatique prévalant dans la capitale et sa région. « Si on perd la main à Dakar, la lutte sera âpre au niveau national » a indiqué le ministre de la Santé.
Au Sénégal, depuis le début de la pandémie le 02 mars dernier, il y a eu 3739 cas déclarés positifs au coronavirus dont 1858 guérisons et 1838 patients encore sous traitement dans les différentes structures sanitaires du pays. notre pays a aussi enregistré 42 décès liés à la Covid-19. Samedi dernier, en faisant le point sur la situation du jour, le ministre de la Santé et de l’Action sociale (Msas) était largement revenu sur le cas de la région de Dakar devenue l’épicentre de la maladie.
A la date du 29 mai, elle comptait à elle seule 2525 cas sur les 3429 dépistés positifs. soit un taux record de 73,6% des cas confirmés. autrement dit, les trois quart (3/4) des cas sont issus de la capitale. La courbe ascendante des cas positifs dans la région de Dakar ne retombe pas depuis plusieurs semaines. par conséquent, cette situation alarmante et critique fait de Dakar l’épicentre de la maladie, et appelle à un renforcement des mesures de restrictions et à l’obligation de leur respect plus strict. Selon le ministre Abdoulaye Diouf Sarr, « la transmission locale est clairement établie et se traduit par une augmentation des cas issus de la transmission communautaire et des décès communautaires. Dès lors, l’endiguement de l’épidémie doit mobiliser toutes nos énergies. Cela passe par le renforcement de nos stratégies à l’échelle locale et particulièrement dans la région de Dakar. Ce renforcement stratégique devient un impératif urgent. C’est pourquoi j’ai demandé au comité national de gestion des épidémies, en rapport avec le comité régional de gestion des épidémies de Dakar de se réunir, toutes affaires cessantes, pour nous proposer une stratégie spécifique de renforcement de la lutte contre la covid-19 à Dakar. Pour vaincre la maladie, nous devons nous mobiliser au sein de nos communautés », a dit Diouf Sarr qui appelle à se mobiliser au niveau communautaire pour vaincre cette maladie.
En attendant que la population générale réponde à son appel, le Comité national et le comité régional de gestion des épidémies à Dakar sont invités à faire des propositions, dès aujourd’hui mardi, pour une lutte efficace dans Dakar et sa banlieue. a en croire le ministre, en effet, il n’y a pas d’autre choix que de durcir les restrictions car « si on perd la main à Dakar », la lutte sera âpre au niveau national.
« Les enfants sont les plus grands porteurs de cette épidémie »
un discours au ton menaçant qui fait craindre un retour aux mesures prévalant avant les mesures d’assouplissement annoncées le 11 mai dernier.
Des mesures concernant la fermeture des établissements scolaires, des lieux de culte et des marchés, entre autres. En tout cas, Dr Babacar Niang de Suma Assistance dit ne pas comprendre pourquoi on veut coûte que coûte rouvrir les écoles dans ce contexte à risque surtout chez les élèves. « Il faut dire que les enfants sont les plus grands porteurs de cette maladie. Ce sont des asymptomatiques, ils ne vont pas développer des signes et vont faire la guérison spontanée. En revanche pour leur famille, on craint une contamination massive », souligne ce médecin urgentiste.
Selon lui, les autorités auraient dû, dès le début, montrer une vraie riposte en y associant le privé. Malheureusement, dit-il, elles ont voulu adopter la stratégie de la pyramide sanitaire dans le public lorsqu’elles ont reçu le soutien financier de la communauté internationale. Ce qui est « mal pensé. Déjà le Samu national dispose de moins de 100 ambulances pour intervenir dans tout le Sénégal », se désole ce praticien de la santé d’après qui « les décideurs ne sont pas logiques dans ce combat de guerre qui nécessite l’implication de tous ».
« A Dakar, tous les lits sont occupés »
Aujourd’hui, cette stratégie combinée à la réquisition des hôtels ne semble pas donner grand-chose
C’est à la limite, et selon les dires de Dr Babacar Niang, une surcharge qui a failli faire de nos établissements hospitaliers des hôpitaux covid-19. Or « nous ne voulons pas que nos hôpitaux soient des hôpitaux pour covid », a justement soutenu le directeur du Centre des opérations et des urgences sanitaires (Cous), Dr abdoulaye Bousso. On ne sait pas si cette façon de gérer la pandémie a fait de nos hôpitaux des « hôpitaux Covid » ou pas. Mais une chose serait sûre, d’après le patron de Suma Assistance, « à Dakar, tous les lits sont présentement occupés ».
A preuve, dit-il, le cas d’un de « ses » infirmiers testés positif, et à qui on a demandé d’attendre le lendemain pour venir à l’entrée de Rufisque pour faire un test et attendre 48 heures pour avoir les résultats. « J’ai fait 30 heures d’attente. Encore que j’ai dû passer par des voies parallèles parce qu’on a des relations dans le milieu, pour qu’il soit prélevé », s’indigne Dr Niang qui dit être préoccupé surtout pour nos compatriotes qui n’ont pas les moyens de se soigner.
Ceux-là qui sont aujourd’hui appelés à vivre avec « leurs mots et leurs maux » et n’ont que ces trois préoccupations : « comment rester en vie, comment manger et comment se protéger » ! Et c’est aussi le souci de Dr niang qui lève un coin du voile sur ce qu’il appelle la « fausseté » des chiffres.
« Les chiffres sont biaisés, on sera bientôt à 15 000 cas »
Selon ce médecin-urgentiste dont la réputation n’est plus à faire, dans quelques jours, il faut s’attendre au doublement voire au triplement des cas confirmés. « On sera bientôt à 15 000 cas au bas mots, par défaut car la situation est loin d’être maîtrisée surtout avec les cas communautaires que j’appelle les cas incontrôlables ». A en croire Dr Babacar Niang, les chiffres donnés par les autorités sont à prendre avec des pincettes. « Si on tient compte de ce que j’appelle les déserts médicaux, la stigmatisation et pour ceux-là qui n’ont pas les moyens d’aller se faire soigner, le cas des établissements de santé qui font leurs tests sans bruit, les ressortissants français qui le font au niveau de la marine française et les Etats-Unis qui le font au niveau de leur Ambassade, … je me dis que sur les chiffres, il y a problème ».
Au-delà de ces « chiffres biaisés », dit-il, au niveau local et particulièrement pour le cas de Dakar qui hante aujourd’hui le sommeil des autorités, « on doit isoler certaines villes en créant des zones rouges, des zones oranges et des zones vertes ». Des mesures adaptées à la situation de l’heure comme cela se fait ailleurs comme en Chine qui a réussi l’expérience… Et c’est toujours Dr Niang qui a fait ce… test positif !
Le Témoin