La COVID-19 est une maladie respiratoire infectieuse causée par le dernier Coronavirus du nom de (SRAS-CoV2) pour ’’Syndrome Respiratoire Aigu Sévère du Coronavirus 2’’ qui a été découvert à Wuhan, en Chine, en décembre 2019 ou bien avant cette date. Comme nous le savons, il existe plusieurs types de Coronavirus et que seulement 7 sont connus pour provoquer des maladies chez l’homme.
Parmi eux, 4 ont des effets moins graves sur l’espèce humaine ne provoquant que des rhumes et rarement des infections graves des voies respiratoires. Les 3 autres, connus pour avoir provoqué des épidémies (du latin epidemia qui signifie « à la maison ») voir des pandémies (du grec pan qui signifie « tout » et demos qui signifie « peuple ») majeures au 21ième siècle, ont un effet plus grave chez l’être humain car ils peuvent causer des infections graves des voies respiratoires pouvant causer tout simplement la mort. Il s’agit du SRMO pour ’’Syndrome Respiratoire du Moyen-Orient’’ subvenu en 2012 et des virus SRAS-CoV 1 et 2 qui ont été identifiés en 2019.
À la date du 18 octobre 2020, le SRAS-CoV2 a atteint plus de 39 600 000 individus à travers le monde et a fait plus de 1 100 000 morts. Nous sommes conscients que cette pandémie est inédite dans l’histoire de l’humanité si nous le jugeons par rapport au niveau de développement de la science au 21ième siècle. Cela dit, il ne faut pas oublier que ce n’est ni la première pandémie de l’histoire et ni la plus mortelle. Le constat est le même pour les épidémies. Entre l’an 166 et l’an 189, la peste antonine ou « peste galénique » frappa l’empire romain à la fin de la dynastie « antonine ». Ce type de peste était possiblement liée à la variole ou à une maladie infectieuse semblable et elle aurait considérablement réduit la population romaine, en faisant près de 10 000 000 de morts. Entre le 6ième et le 7ième siècle survint la peste Justinien du nom de l’empereur byzantin romain d’Orient qui aurait fait entre 25 et 100 000 000 de morts avec une vingtaine de vagues successives qui se sont succédées à cause des échanges commerciaux. De 1347 à 1352 sévit la pandémie de la peste noire causée par la bactérie Yersinia pestis. Cette peste avait décimé la moitié de la population Européenne en y faisant près de 25 000 000 victimes et 25 000 000 morts supplémentaires dans le reste du monde. Il y a eu également la grippe espagnole, une maladie causée par une souche de type A (H1N1) particulièrement violente entre 1918 et 1919 causant la mort de plus de 50 000 000 de personnes dans le monde, soit 5 fois plus que lors des batailles de la Première Guerre mondiale. Enfin, on peut en citer encore avec le choléra, la variole, et tant bien d’autres. Depuis 1981, le sida, causé par le virus du VIH, a provoqué 32 millions de morts à travers le monde, précise le programme commun des Nations Unies sur le VIH/Sida (Onusida). Le paludisme lui pourrait dépasser les 700 000 victimes en Afrique Sub-saharienne en 2020 alors que le cancer a fait près de 9,6 millions de victimes en 2018 selon le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC). Pour dire qu’il ne faut pas oublier que de nos jours, il y a encore des maladies qui font des centaines de milliers de victimes par année à travers le monde. Cela dit, il faut reconnaître que le virus du SRAS-CoV2 est venu chambouler nos habitudes, nos comportements et même nos croyances dans un monde moderne qui est constamment en crise. Le Coronavirus peut être considéré comme un révélateur qui est venu mettre en évidence nos problèmes sanitaires, environnementaux, économiques, sociaux-spirituels, éducatifs, politiques, etc. Citons quelques exemples concrets pour illustrer ceci.
Un premier indice évident est que le jour du dépassement mondial de cette année est survenu 3 semaines plus tard qu’en 2019, soit le 22 août 2020. Pour rappel, ce jour est calculé en faisant une comparaison entre les ressources utilisées par l’humanité et la capacité de la planète à régénérer ces mêmes ressources (biocapacité). Si nous considérons la pollution, dans la ville de Milan, avant le confinement en janvier 2020, les concentrations moyennes de NO₂ ’’ dioxyde d’azote’’ étaient d’environ 65 µg.m-3. Cette valeur est passée à 45 µg.m-3 en février et environ 35 µg.m-3 pour la première moitié de mars en pleine confinement. Ce qui veut dire que le niveau de pollution a diminué de la moitié entre le mois de janvier (avant confinement) et le mois de mars (en plein confinement). Ceci prouve que l’homme est entrain de participer à sa propre destruction car ce type de polluant est issu du trafic automobile et marin. La pollution participe au réchauffement climatique qui, en plus de la déforestation, causerait de plus en plus des feux de forêt comme ce fut le cas en Australie en début d’année 2020 ainsi qu’en Amazonie en été 2019. Imaginez, 20% des forêts australiennes sont parties en fumée emportant avec elles près de 3 milliards d’animaux et pas moins de 2.3 millions d’animaux sont morts dans les feux de forêt amazonienne. Donc en plus d’être en parfaite contradiction avec la nature, l’homme est aussi entrain de la détruire en oubliant qu’il est une partie intégrante de cette même nature. Bref, nous pouvons continuer à citer des exemples à n’en plus finir mais la pollution terrestre et maritime, les guerres, le réchauffement climatique, les inégalités sociales, la famine, les crises sanitaires, économiques, migratoires, la corruption et autres sont autant de signes qui nous rappellent que notre planète va très mal. Parmi ces multitudes de secteurs impactés par le Coronavirus, il y en a un qui a attiré notre attention, à savoir la spiritualité, tant son importance est primordiale pour l’épanouissement de l’homme.
Au fait, qu’entendons-nous par spiritualité dans le sens de la religion musulmane? Elle consiste à rechercher la proximité et la satisfaction d’Allah (swt), non seulement à travers les actes cultuels, mais aussi à travers nos occupations et engagements de tous les jours ainsi que nos rapports avec les autres. C’est ainsi que nous pouvons éduquer notre âme ’’At tarbya Ar ruhânya’’ [1] et Cheikh Mouhammad Bouchairi nous donne un parallélisme très pertinent en ce qui concerne l’éducation de l’âme en disant dans le chapitre 2 du livre ’’Al bourda’’ que : « L’âme est semblable à un bébé. Abandonné à lui-même, il voudrait téter jusqu’à l’adolescence. Mais si on l’en empêche en le sevrant, il renonce à l’allaitement ». L’éducation de l’âme commence par la connaissance de soi qui est une base indispensable permettant à l’être de pouvoir combattre son égo continuellement afin d’atteindre par étapes le plus haut niveau de la vie spirituelle qui est le niveau d’excellence en matière d’adoration ou la perfection spirituelle, ce qu’on appelle ’’Al ihsân’’.
En résumé, rappelons que cette notion de degré d’adoration nous provient du célèbre Hadith de Djibril (hs) qui englobe toutes les composantes de la religion musulmane. Il relate que Djibril (hs) est venu, sous forme humaine, rendre visite au prophète Mouhammad (saw) pour nous enseigner notre religion. Il lui posa plusieurs questions dont principalement trois qui sont reliées aux degrés de la spiritualité musulmane. Ce qui est étonnant, c’est qu’à chacune des réponses du prophète Mouhammad (saw), Djibril (HS) confirma, ce qui étonna bien sûr les compagnons présents ce jour-là dont Omar Ibn Khattab (rta). En somme, le premier degré de la spiritualité correspond à la pratique extérieure donc physique de la religion, incluant les œuvres d’adoration (Al Ibâdât) et les relations humaines (Al mu’âmalât). Ce premier degré n’est autre que l’Islam qui consiste à témoigner qu’il n’est de divinité si ce n’est Allah (swt) et que Mouhammad (saw) est son envoyé; qu’on accomplisse la prière, verse l’aumône, jeûne le mois de ramadan et effectue le pèlerinage vers la maison sacrée si on en a la possibilité. Le deuxième degré de la spiritualité est l’îmân ou la foi dont l’essence est puisée dans le dogme ’’Al Aqîda’’ et elle consiste à croire en Allah (swt), en ses anges, en ses livres, en ses prophètes, au jour dernier et de croire au destin, qu’il soit bon ou mauvais. Et enfin, le degré le plus élevé de la spiritualité musulmane n’est autre qu’Al-Ihsân ou l’excellence ou même la bienfaisance qui exige d’adorer Allah (swt) comme si tu le voyais car si tu ne le vois pas, sache que lui, Il te voit. Malheureusement, une petite analyse de ce degré ultime de la spiritualité qui est, de passage, une des bases les plus solides du soufisme, nous montre que le voyez moi l’emporte haut la main sur la sincérité que l’on se doit avoir envers soi-même, envers Allah et également envers les autres. Par ignorance, nous avons tendance à embellir notre extérieur à travers de belles paroles, de beaux habits et de gestes en apparence nobles alors que tout ceci n’est que tromperie. Une chose est sûre, nous pouvons tromper les autres, nous pouvons même tromper notre propre personne, mais il est impossible de tromper Dieu (swt).
Si l’on se remet dans le contexte du Covid_19, certaines théories ont essayé de l’assimiler à une punition ou à une vengeance de Dieu (swt) qui serait en colère envers l’humanité. Alors, dans ce cas, qu’en est-il de la personne juste, pieuse, sage, érudit qui est décédée à cause de ce virus ? Est-ce que Dieu (swt) s’est vengé de cette personne ? Évidemment, nous répondons non à cette dernière question car même si c’était le cas, sachez que nous sommes infiniment faibles pour contenir Sa vengeance. Cependant, une chose est sûre, pour remettre notre spiritualité à la place qu’elle doit occuper, il faut absolument se préoccuper de la place qu’occupe Allah (swt) dans nos cœurs. Notre inquiétude vient du fait que nous avons remarqué que dans nos sociétés actuelles, nous craignons par ignorance plus les interdits de nos semblables que les interdits d’Allah (swt). Et pourtant Il a spécifié clairement dans le verset 11 de la sourate 42 du Coran que : « Il n’y a rien qui Lui ressemble et c’est lui l’Audient (swt), le Clairvoyant (swt) ». Ce qui vient renforcer finalement son unicité car si quelque chose est unique et encore on ne peut pas dire qu’Allah (swt) est une chose, la logique voudrait que cette chose n’ait point de ressemblance. L’imam Ghazzalî l’explique très bien dans son célèbre ouvrage intitulé ’’ revivification des sciences de la religion ’’ dans la partie des règles de la croyance en disant que : « Allah (swt) n’est pas un corps doté d’une image, Il n’est pas non plus une substance élémentaire, Il ne ressemble pas aux corps, dans le sens où Il n’est pas limité, ou divisé. Il n’est pas une substance et Il n’est pas composé de substances, Il n’est pas un attribut des substances et n’existe pas dans un attribut des substances. Non, Il ne ressemble pas aux choses qui existent, rien de semblable à Lui n’existe. Ce qui veut dire que rien n’est tel que Lui. Il n’est pas limité ni circonscrit. Il n’est pas entouré par des directions, et Il n’est pas contenu par les terres et les cieux. »
Encore une fois, le révélateur qu’est le Coronavirus a permis de mettre en évidence le peu de place que nous accordons à Allah et à ses messagers dans nos paroles et dans nos actes impactant de passage la spiritualité des masses. Place désormais à l’embellissement de la vérité, à la recherche du buzz et à la recherche de profits personnels au détriment de l’intérêt général. Les masses ont perdu les notions de base ou n’ont jamais été initiées comme il faut aux sciences religieuses menant au degré le plus élevé de la spiritualité. Par ceci, nous voulons dire que de plus en plus de croyants s’attèlent aux actes d’adoration sans savoir le pourquoi du comment. La nescience est à un niveau extrême en ce qui concerne les livres saints ainsi que les traditions issues des prophètes. Bref, tout cet enseignement qui est censé nous apporter une base solide au niveau de notre spiritualité est relégué au second plan. C’est malheureusement grâce à ce genre de manquement que le débat sur l’ouverture ou non des lieux de cultes n’avait pas lieu d’être. D’ailleurs, nous vous conseillons l’excellent article du professeur Makhtar Diouf qui fait une analyse très lucide à ce sujet dans son article intitulé : ’’ Le Coran, la Sunna et le Coronavirus ’’ [2].
Nous savons tous que le prophète Mouhammad (saw) n’a été envoyé que par miséricorde pour l’univers comme nous le relate le verset 107 de la sourate 21 du Coran. Le hadith 419 du célèbre livre ’’ Riyâdus Sâlihîn ou le jardin des vertueux ’’ nous permet de situer l’importance de la miséricorde d’Allah (swt) par rapport à sa colère. En effet, ce hadith nous dit que « Lorsque Dieu (swt) eut terminé l’œuvre de la création, iI écrivit sur son livre, qui se trouve par-devers lui, au-dessus du trône : « Certes, ma miséricorde l’emporte sur ma colère ! ». Ceci nous pousse à regarder l’effet de cette pandémie sur un autre angle. Au lieu d’une vengeance ou d’une punition, nous savons tous que le Seigneur (swt) nous a créé pour nous éprouver tout au long de notre vie afin de nous pousser à réfléchir, à nous remettre en cause et bien sûr à discerner le bien du mal. Tout ceci nous pousse à nous rappeler de Dieu (swt), à nous laver de nos péchés ici-bas et donc à tester notre foi. L’objectif ultime est de nous permettre d’atteindre le stade d’Al Ihsân qui est le degré le plus élevé de la spiritualité. En effet, Allah (swt) nous dit dans la sourate 67 du coran, verset 2 : « Celui qui a créé la mort et la vie afin de vous éprouver (et de savoir) qui de vous est le meilleur en œuvre, et c’est lui le Puissant (swt), le Pardonneur (swt) ». Par symétrie, ceci nous permet de dire que le Coronavirus peut être considéré comme une épreuve révélatrice de notre degré de foi. Pour s’en rendre compte, il suffit juste de faire une remarque sur le nombre de fois que le mot épreuve est évoqué dans les médias. Même les non-croyants avouent qu’il y a une épreuve à traverser et qu’il y a des comportements et des manières de penser et de faire qui vont changer. Nous rappelons, de passage, qu’à la base, l’homme possède forcément une croyance à cause de la ’’ Fitra ’’ qui est notre nature pure originelle ou notre lumière spirituelle d’origine. Donc quelle que soit notre croyance, notre culture, notre idéologie, que l’on fasse partie de l’Islam, du Christianisme, du Jainisme, du Taoïsme, du Judaïsme, de l’Hindouisme, du Bouddhisme, du Bahaïsme, du Confucianisme, du Sabéisme, etc., une chose est sûre, l’heure est à la réflexion par rapport à cette épreuve.
Imaginez, nous sommes à la limite incapables de faire face à un petit virus qui est capable de tuer des centaines de milliers de personnes, de paralyser à travers le monde les différents systèmes économiques, sanitaires, éducatifs, commerciaux etc. Tout est affecté en ce moment et admettons que des choses qui étaient minimisées jusque-là sont redevenues importantes. Nous pouvons parler par exemple d’entraide, de respect, d’intérêt général, de l’acceptation de l’autre, de l’importance de la famille, des proches, etc., qui sont tous reliés à la spiritualité. De ce fait, une épreuve, ça permet finalement de remettre les choses à l’endroit. Juste le fait de prendre du recul, de réfléchir par rapport à l’épreuve actuelle que nous impose le Covid_19, constitue un impact positif sur notre spiritualité qui ne doit en aucun être affectée négativement par la situation actuelle. Au contraire, elle doit augmenter à la sortie de cette épreuve.
Alors, comme solution, profitons du peu de temps libre que nous avons durant cette pandémie pour approfondir notre connaissance de soi, pour nous rapprocher d’Allah (swt), bref, pour aller aux choses essentielles. Réfléchissons sur le sens de notre vie d’ici-bas et d’au-delà, c’est le moment d’évaluer notre degré de spiritualité et de corriger le tir éventuellement. Qu’importe la source, une chose est indispensable si nous souhaitons aller chercher le stade suprême de la spiritualité, nous devons absolument connaître parfaitement les enseignements de base qui sont issus du Coran et de la tradition du prophète Mouhammad (saw) dont la naissance sera célébrée ce jeudi 29 octobre 2020 à Thiès dans le respect strict des gestes barrières contre la Covid_19.
GRIN