Le Premier ministre jordanien fait les frais de la grogne populaire. Hani Mulki a démissionné ce lundi 4 juin après avoir été pendant plusieurs jours dans la ligne de mire de milliers de protestataires. La population manifeste contre la politique sociale de son gouvernement et en particulier contre un texte de loi qui prévoit la hausse des prix et des impôts.
Tôt ce lundi matin, le roi Abdallah II de Jordanie a convoqué son Premier ministre. Suite à cet entretien, Hani Mulki, à la tête du gouvernement depuis mai 2016, a finalement posé sa démission.
« Non » au matraquage fiscal
Depuis plusieurs jours, le royaume vit au rythme de la contestation. Chaque soir en ce mois de ramadan, les Jordaniens se mobilisent. Des rassemblements dans la rue pour dire « non » à la hausse des prix et au matraquage fiscal. Ce sont les manifestations les plus importantes depuis 2011.
Il faut dire que la Jordanie est sous pression du Fonds monétaire internationale. Le FMI presse ce pays, sans ressource particulière et dépendant de l’aide américaine, à mener des réformes.
Appel au dialogue
Dans un premier temps et face à la grogne populaire, le roi a d’abord appelé les différentes parties au dialogue. Mais le lien entre le gouvernement, les élus, les syndicats et les principaux acteurs socioéconomiques est comme rompu.
Selon le bâtonnier de Jordanie, Mazen Rashidaate, interrogé par MCD, le roi « aurait d’abord dû exiger le retrait de la loi avant d’entamer la moindre discussion ». « Tenter de négocier alors que le texte de loi est déjà arrivé à l’Assemblée, me parait compliqué voire impossible, poursuit l’avocat. Il aurait mieux valu retirer cette loi. »
« Nous avons des experts qui ont proposé des stratégies économiques et fiscales qui permettraient au Trésor jordanien de boucler le budget de cette année sans avoir recours à des emprunts, estime Mazen Rashidaate. Il y a des alternatives mais le gouvernement ne veut pas en entendre parler. »
Grève nationale
Les syndicats, appuyés par une population en colère, ont lancé une grève nationale réclamant le retrait pur et simple d’un projet de loi fiscale avant d’entamer la moindre discussion.
Parallèlement à la démission du Premier ministre, le souverain jordanien a désigné le ministre de l’Education, Omar al-Razzaz, pour former un nouveau gouvernement, selon une source gouvernementale citée par l’Agence France Presse. La démission de Hani Mulki ne règle pas tout. Hier encore, une manifestante dans la foule criait « Nous voulons un autre système » et pas seulement de nouvelles tête, rapport notre correspondant sur place, Jérôme Boruszewski.
Sur les réseaux sociaux, la nomination du nouveau Premier ministre suscite déjà des témoignages amers. Omar Razzaz, qui fait partie de l’équipe sortante, a travaillé à la Banque mondiale. Or, ces derniers jours, les manifestants s’opposaient aux réformes fiscales négociées avec les institutions financières internationales.