Ce samedi 25 avril marque la Journée internationale de lutte contre le paludisme. La maladie a frappé 228 millions de personnes en 2018 et en a tué 405 000. Des chiffres élevés, qui pourraient l’être encore plus en 2020 à cause de la pandémie de Covid-19.
Plus de 700 000 morts du paludisme en 2020. C’est le sombre pronostic de l’OMS si jamais les programmes de prévention de la maladie venaient à pâtir de la pandémie de Covid-19. Avec 93% des cas et 94% des décès, le continent africain est particulièrement vulnérable. « L’Afrique a fait des progrès significatifs au cours des vingt dernières années », explique le Dr Moeti, directrice régionale pour l’OMS pour l’Afrique. « Bien que le Covid-19 représente une menace majeure pour la santé, il est essentiel de maintenir les programmes de prévention et de traitement du paludisme. Nous ne devons pas revenir en arrière ».
De surcroît, ces programmes ont encore du mal à être mis sur pied sur le terrain. « Nous n’en sommes pas au niveau souhaité », explique le Dr Spès Ntabangana, chargée des stratégies, du suivi et de l’évaluation pour l’Afrique centrale à l’OMS. « En 2018, seulement 50% de la population dormait sous moustiquaire. Les femmes enceintes qui doivent recevoir trois doses de sulfadoxine pyriméthamine durant leur grossesse n’étaient que 31% à en avoir. Une forte proportion d’enfants qui présentent des signes suspects du paludisme n’ont bénéficié d’aucune prise en charge médicale. Ils étaient plus d’un tiers en 2018. »
Les enfants paient pourtant le plus lourd tribut au parasite : 272 000 enfants de moins de 5 ans sont morts du paludisme en 2018, près des deux-tiers du total.
Comme souvent, le manque de financement est l’une des principales causes de ce phénomène. « La plupart des financements viennent de pays étrangers. Les pays locaux financent peu la lutte contre le paludisme », explique Spès Ntabangana. « Il y a encore beaucoup d’efforts à faire de ce côté. »
D’autant plus que les pays qui investissent le moins dans cette lutte sont également ceux les plus touchés. On trouve ainsi six États africains qui représentent à eux seuls plus de la moitié des cas dans le monde. Le Nigeria (25%), la République démocratique du Congo (12%), l’Ouganda (5%), et enfin la Côte d’Ivoire, le Mozambique et le Niger (4% chacun) se trouvent ainsi en première ligne face à cette maladie.
■ Au Gabon, le paludisme est une maladie endémique
C’est la première source de consultation et d’hospitalisation. Depuis le déclenchement de la pandémie du Covid-19, deux CHU sur quatre à Libreville ont été réquisitionnés pour le coronavirus. La très forte médiatisation du Covid-19 dont certains symptômes sont proches du paludisme fait peur. Du coup, le programme national de lutte contre le paludisme a constaté que les malades du paludisme ne vont plus à l’hôpital.
Dans les rues comme dans les marchés, les populations ne cachent plus leur peur d’y aller en cas de fièvre ou de toux. « Quand tu te présentes à l’hôpital, ils vont te dire que tu as le corona, alors que tu ne l’as pas. Voilà pourquoi nous fuyons les hôpitaux », explique cette jeune femme.
Depuis son bureau à l’hôpital de Nkembo dans le 2ème arrondissement, le docteur Safio Abdou Razack, directeur national du programme de lutte contre le paludisme, constate que le Covid-19 a monopolisé toutes les ressources du système sanitaire : « Le Covid-19 vient compliquer les choses : saturation du système de santé, détournement des infrastructures de santé et du personnel alors que le paludisme est toujours là… »
Le médecin, qui rappelle que le paludisme reste une maladie très dangereuse, invite les populations à refaire confiance aux hôpitaux. « Nous sommes déjà en concurrence avec le Covid-19 au niveau des places en réanimation. il vaut mieux que nous fassions tout pour que le maximum de cas soient traités en paludisme simple pour ne pas avoir à solliciter des places en réanimation. »
Au Gabon, le paludisme est la première cause de mortalité, d’hospitalisation et d’absentéisme à l’école ou au travail. 15% des enfants de -5 ans meurent de paludisme.
RFI