Le président João Lourenço sera reçu ce lundi à 13h l’Elysée, première visite depuis son élection. Après un déjeuner en tête-à-tête, le président français Emmanuel Macron et son homologue angolais signeront plusieurs accords avant de tenir une conférence de presse. A l’ordre du jour, les relations bilatérales entre les deux pays, notamment sur le plan économique, alors que le pays considéré comme l’un des plus riches d’Afrique traverse une crise sans précédent depuis 2014.
Total, la compagnie pétrolière française, reste l’une des chevilles de la relation entre la France et l’Angola, deuxième producteur africain de pétrole. Même si aujourd’hui, après quatre années de crise, et malgré la hausse des prix du pétrole, le manque de devises en Angola continue de peser sur la balance commerciale entre Paris et Luanda.
Au moment de l’élection de João Lourenço en septembre, les importations françaises, toutes catégories confondues, avaient déjà été divisées par deux, l’Etat angolais n’étant plus en mesure de payer ses factures. Aujourd’hui, le nouveau président promet d’ouvrir le pays et a commencé à réformer différents secteurs. Malgré cela, la situation économique ne devrait pas s’améliorer d’ici aux prochaines élections en 2020, ce qui pourrait rebuter les investisseurs français. Reste que l’Angola est un pays riche en ressources – pétrole, diamants, terres – et son gouvernement se dit prêt à diversifier son économie pour réduire sa dépendance aux revenus du pétrole.
Comment ? En misant notamment sur le secteur agro-industriel et la pêche. Lors de cette visite en France, le président angolais devrait d’ailleurs se rendre dans le Sud-Ouest, pour visiter une exploitation agricole à Castelnaudary et une école d’agriculture. Il existe déjà un partenariat franco-angolais dans ce domaine dans la province de Malanje dans le centre-nord de l’Angola.
En outre, afin de réussir à relancer une croissance durable, l’une des priorités de son mandat, João Lourenço veut attirer les investisseurs étrangers. Parmi les mesures déjà prises à Luanda, figure une loi adoptée par le Parlement angolais il y a une dizaine de jours, qui allège les contraintes pour les partenariats entre investisseurs étrangers et locaux. La nouvelle loi s’appliquera à tous les secteurs de l’économie à l’exception du pétrole, des mines et de la finance… Le pétrole représente encore aujourd’hui près de la moitié du PIB du pays, 50% des recettes budgétaires et 95% des exportations angolaises.
L’Angola vote une loi pour redevenir économiquement attractive
Les attentes des entrepreneurs français
Du point de vue de Paris, il s’agit de se prépositionner comme le partenaire économique incontournable de cette diversification, notamment agricole. Les entrepreneurs français espèrent des changements significatifs et concrets : facilitation des procédures de visa, équivalence du permis de conduire français et angolais… Mais surtout l’amélioration du climat des affaires et la libéralisation du marché angolais.
C’est ce que Avraham Benhaïm, le président de l’Union des Français de l’étranger en Angola, espère qu’Emmanuel Macron va recommander à son homologue. « Ce qui est important, pour les sociétés françaises qui souhaitent investir en Angola, c’est la suppression du partenaire local, qui détenait la majorité du capital de l’entreprise, et avec un capital d’un million de dollars de déposit. C’était ça le premier frein à l’investissement, explique M. Benhaïm. Le deuxième, c’est que depuis 2014, il y a une crise et un manque de devises. Les entreprises françaises n’arrivaient plus à payer soit leurs fournisseurs, soit les prestataires, soit les salaires de leurs employés. »
Aujourd’hui, on souffre, poursuit le conseiller, qui attend des « réformes de fond », de « libéraliser et de permettre aux investisseurs français, avec des mesures bien concrètes, de rentrer en Angola ». « Je ne suis pas désespéré, conclut-il cependant, parce que je pense qu’il y a une telle potentialité, les intentions sont bonnes. Il y a quelque chose, il faut le réaliser. »
Les enjeux diplomatiques
Mais l’intérêt de la France pour l’Angola, c’est aussi le rôle que João Lourenço pourrait jouer pour résoudre certaines crises, comme en République démocratique du Congo. La France est le rédacteur des résolutions de l’ONU pour les Grands Lacs. Elle veut aussi conserver son poids diplomatique et donc son influence sur le continent, en se présentant comme un partenaire qui ne donnera aucune leçon sur le plan politique.
Le matin, João Lourenço devrait se rendre à l’Unesco. Pour l’instant, le système d’éducation angolais ne répond pas aux critères de l’organisation. Mardi, il sera à Toulouse pour visiter notamment Airbus.