“Le Protocole de l’Elysée” : “L’heure est grave…”, selon Abdoul Mbaye

“Le Protocole de l’Elysée” : “L’heure est grave…”, selon Abdoul Mbaye
“Le Protocole de l’Elysée” : “L’heure est grave…”, selon Abdoul Mbaye

Abdoul Mbaye était à la cérémonie de dédicace du livre de Thierno Alassane Sall intitulé “Le Protocole de l’Elysée”. C’était ce samedi 07 novembre 2020. Le leader du parti ACT a tenu, lors de cette rencontre, à témoigner de l’homme, de la “Naissance” et de la “trajectoire d’un homme politique“.

In extenso, le témoignage d’Abdoul Mbaye sur T.A.S:

D’une estrade que je partage avec lui et un ami et compagnon de combat politique qu’est le Professeur Bouba Diop, Thierno m’a fait l’honneur et l’amitié de me gratifier du grade de modérateur de cette séance de dédicace qui revêt pour lui une particulière importance.

Il m’a demandé de ne pas être que cela, m’invitant à aussi prendre la parole pour livrer mes impressions de lecture de son livre avant le débat et sa modération.

Il m’avait déjà fait le privilège de m’en faire remettre un exemplaire parmi les tout premiers réceptionnés. Il devint immédiatement mon livre de chevet. Agréable à lire, instructif sur les pratiques des politiciens qui dirigent notre pays – que je connaissais déjà -, il m’a toutefois fait découvrir d’autres facettes de la personnalité de Thierno. C’est pourquoi, laissant à d’autres et à lui-même le soin de vous parler du contenu de son livre, je fais le choix d’évoquer la naissance et la trajectoire d’un homme politique que je vois devenir référence dans notre cher Sénégal.

Se mettre au service de l’intérêt général par activité citoyenne ou par engagement politique est sacerdoce reposant sur trajectoire. Celle de Thierno commence avec sa naissance.

Il est fils d’Imam docte en islam, érudit du coran, guide respecté.

La naissance est importante. Elle ne suffit pas. L’essentiel se trouve dans la part d’éducation venue de ses parents, de leur enseignement, aussi bien que du modèle qu’ils vous projettent.

L’enfant, élevé au sein de familles pauvres ou riches, d’en haut ou d’en bas, mais où les valeurs comptent, apprend à les vivre, les adopte et forge sa propre personnalité avec pour solide ossature celles d’un croyant, et pour la circonstance celles fondamentales de l’Islam.

Citons-en quelques-unes :

• Le respect de son prochain quel qu’il puisse être, riche ou pauvre, puissant ou faible, savant ou ignorant ;
• Le respect du bien d’autrui, privé ou collectif ;
• Le rejet de l’accumulation obstinée et de l’accaparement ;
• Le souci de pouvoir donner à son prochain jusqu’à une part de soi, par son temps, ses conseils ;
• La révolte face à l’injustice ;
• L’humilité plutôt que l’arrogance ;
• La sincérité et la vérité de la conviction plutôt que l’hypocrisie et le mensonge de l’imposture.

Vous l’aurez remarqué ; ce sont là des valeurs et des qualités qui font l’homme politique authentique plutôt que le petit politicien arriviste, opportuniste, intrigant.

Dans cet environnement familial, la trajectoire de Thierno se poursuit. Né musulman, il le devient, aidé par sa naissance et son entourage.

Le musulman ne l’est pas par cinq prières quotidiennes auxquelles s’ajoute le pèlerinage pour se faire pardonner péchés que l’on renouvelle.

Par l’enseignement sincère, et qui ne peut que l’être lorsque venu d’un père, le bon musulman sait qu’il l’est par ses qualités morales.

Notre bienaimé Prophète (PBSL) a enseigné aux musulmans rites, droit et pratiques. Mais il a d’abord et avant tout été le meilleur des hommes poussant Lamartine à l’interrogation suivante : « A toutes les échelles où l’on mesure la grandeur humaine, quel homme fut plus grand ? » ; tout comme la sainte Mariama, mère de Jésus (Insa), est la meilleure des femmes de l’humanité bien qu’ayant vécu avant l’arrivée de l’islam (Coran S-3 ; V-42).

Meilleurs ils l’ont été parce que par leur piété, leurs qualités, vertus et attitudes.

Thierno choisit donc d’être homme et de réaliser une carrière et une vie mesurées non à l’aune de l’argent gagné et accumulé, mais par des attitudes de bon professionnel au service de missions d’intérêt général. Il choisit une route difficile en Afrique, au Sénégal, mais avec une obstination qui lui fera perdre ou délaisser des fonctions et autres conforts. Un homme de vertus et de qualités s’obstine toujours à les conserver.

Tout chemin de carrière est parcours d’obstacles. S’y frayer un passage n’est jamais une sinécure ; Thierno les traverse sans les évoquer. Par contre son ouvrage est occasion de se plaindre de ses premières vraies souffrances professionnelles. Elles naissent d’un ministre, d’un régime, d’un État qui s’acharnent à remettre en cause la participation du Sénégal à une organisation régionale performante ayant permis le développement de l’aviation civile en Afrique.

Thierno décide de s’opposer à une tentative non dissimulée de faire main basse sur les milliards que génère l’activité de cette organisation au Sénégal.

Il quittera ses fonctions plutôt que d’être complice d’une telle forfaiture.

Cet épisode professionnel deviendra déterminant dans son engagement politique. Notons ensemble que chez Thierno, l’engagement professionnel au service de l’intérêt général a précédé l’engagement politique. Son engagement politique est d’abord révolte face aux pratiques d’un État prédateur, capable d’organiser du recul de progrès général pour des milliards à voler. Il n’est pas réaction à une injustice subie. Cette dernière aurait été légitime, mais chez Thierno elle n’est pas la priorité.

Cet épisode de la trajectoire de Thierno ne doit pas être négligé. Présent dans la vie de tout homme politique, il rassure sur sa conception de la politique et met son électeur en confiance.
Thierno a résisté. D’autres ont laissé faire. Toutes les structures dont le chiffre d’affaires se compte en plusieurs dizaines de milliards seront prises d’assaut ; tout y passe : les ICS, la SONACOS, la SAR, le foncier, la SENELEC, l’ARTP, etc…

La crème, la partie essentielle du patrimoine national, sont détruites par le pillage en règle ou par le bradage suspect.

La décision de s’engager en politique oriente Thierno vers le porteur d’un discours de rupture avec les pratiques d’une gouvernance publique orientée vers la satisfaction d’intérêts particuliers, familiaux, partisans, claniques. Cette mal gouvernance a résolument retenu de détruire parfois lentement mais toujours assurément le tissu économique et social du Sénégal, également l’équilibre de ses finances publiques.

Le nouveau leader qu’il se donne est un transfuge du régime dit « libéral », champion par sa capacité à adapter sa parole politique à la demande de l’électeur sénégalais. Comme chez d’autres, sa ruse fait mouche et Thierno la subira.

Thierno sera de l’équipe qui gagne en 2012 pour placer « la Patrie avant le parti » et mettre en œuvre une « gouvernance sobre et vertueuse » au service des citoyens. Le projet est également de donner le Sénégal en exemple mondial de démocratie : le premier mandat de 7 ans sera réduit à 5 années, le troisième sera banni. L’exception est de nouveau sénégalaise. Notre dignité nationale et individuelle est flattée. Des Chefs d’Etats étrangers nous font entrer dans l’histoire. C’est l’euphorie…

Tôt engagé dans l’aventure courageuse de l’APR, car elle le fut, c’est justice lorsqu’il hérite d’une des agences les plus convoitées : l’ARTP.

Alors devenu Premier ministre je fais sa connaissance.

Il sera le seul à réclamer la baisse de ses émoluments. D’autres avant lui les trouvaient pourtant insuffisants et les arrondissaient par d’innombrables magouilles.

Il sera l’un des rares responsables de structure à engager de vraies enquêtes sur les pratiques de ses prédécesseurs. La CREI est annoncée devant reprendre du service. Il ne s’agit en fait que d’un leurre de plus, et le très proche futur montrera que l’ère des magouilles est loin de s’achever.

A la tête de l’ARTP, Thierno, écœuré par l’affaire du siège de l’ARTP parmi d’autres, décide de s’en prendre au dénommé Cheikh Amar. Sans doute parce que ce dernier doit rester utile au nouveau Prince, Thierno quitte l’ARTP et devient Ministre.

Premier ministre, j’apprécie :

• Ses méthodes de travail dans la clarté et la transparence,
• Son refus d’abdiquer ce qui est intérêt de la Nation.

Cette intransigeance lui fera quitter une première fois le Gouvernement.

Après mon départ de la Primature, alors que nous avions cessé de nous voir et même de converser, on lui reprochera plusieurs fois une complicité avec quelqu’un qui ne fut coupable de rien, sinon de mettre comme lui l’intérêt général et de la Patrie avant tout, et de faire avancer le Sénégal par le travail et la méthode plutôt que de l’enfoncer par vols et mensonges. Les ennemis des bonnes pratiques en matière de gouvernance nous ont fait cousins ou frères parce que partageant les mêmes valeurs.

Thierno reviendra aux affaires en qualité de Ministre en charge de l’énergie.

Mais qui ne se ressemblent ne s’assemblent. « Le Protocole de l’Elysée » explique son refus de couvrir la main basse cette fois sur le futur du Sénégal, c’est à dire son pétrole et son gaz. D’autres l’ont fait, bradant et compromettant l’avenir des générations futures, sans sourciller et s’en glorifiant parfois.

Le remaniement du 2 novembre dernier par contre ne fait pas mentir l’adage.

Thierno, lui, a choisi son camp : une nouvelle fois il sera celui du refus de la magouille et du non-droit au détriment du peuple sénégalais ; celui de l’honneur quel qu’en soit le prix.

Mesdames, messieurs,

L’heure est grave.

Elle est grave car l’histoire politique du Sénégal se répète, en 2012 puis de nouveau dimanche dernier. Elle s’obstine au sur-place, accumulant de lourdes menaces pour notre avenir à court terme et celui de nos enfants, qu’ils choisissent de fuir leur pays dans des pirogues de fortune ou d’y rester.

Car la politique porte la conception et la méthode de gouvernance publique.

Au-delà de leur capacité à organiser des élections truquées par parrainage innovant d’application impossible et autres vieilles méthodes, les politiciens professionnels continuent de tromper le peuple avec paroles mensongères suivies de « wax waxeet » et reniements ; ils achètent les consciences en violation de la loi ; ils entretiennent à dessein une pauvreté généralisée pour corrompre le vote de celui qui la vit grâce à l’argent public qu’ils ont auparavant détourné.

Les slogans d’« émergence », de « fast track » ou de « zéro déchet » et les taux de croissance factices, ne résisteront pas longtemps au chômage qui progresse, à la pauvreté qui s’accroît, au désespoir qui gonfle, à la colère qui gronde.

L’heure est grave.

A l’électeur sénégalais de se réveiller. Une démocratie se bâtit certes dans la durée. Mais fort des leçons tirées de son expérience par simple observation, qu’il retienne au moins la nécessité de construire son choix dans l’isoloir sur la base de valeurs qui appartiennent à sa culture :

• Nit ca jikko ja ;
• Baadoolo melo la,
• Baadolo kuko denk reew reccu;
• Wax doyut; seytu dembu ki wax moo am solo;
• Ku mesul jiite mboolom juroomi nit, dooko denk ministre ba denk ko am rew

Thierno, je suis très heureux de t’avoir retrouvé au sein du Congrès de la Renaissance Démocratique (CRD), pour de nouveau partager avec toi les valeurs phares choisies en regroupement avec d’autres partis et mouvements, à savoir la citoyenneté et l’éthique.

Les habitudes sont pénibles à changer. Mais en politique comme dans la vie professionnelle, il nous faut éviter les chemins les plus courts faits de compromissions et de précipitation. Retenons la route la plus difficile faite de sincérité et vérités dites à nos concitoyens, avec pour objectif l’éveil de leurs consciences.

Et en réponse à ceux qui souhaitent poursuivre leurs rapines aux dépends du peuple en accusant de traîtrise ceux qui les dénoncent, qu’ils sachent que dire la vérité ne saurait être trahison lorsque l’on a refusé d’être complice de leurs forfaitures. Il s’agit plutôt de panache et d’honneur, autant de stades de dignité qui leur seront à jamais inaccessibles.