Les nouvelles révélations ce jeudi matin 15 décembre dans l’affaire du « Qatargate » font du bruit au sein des institutions européennes. L’eurodéputée grecque Eva Kaili reste écrouée et clame son innocence. Pourtant, son compagnon reconnaît l’existence d’un réseau de corruption au sein du Parlement européen et admet avoir fait partie d’une organisation utilisée à la fois par le Maroc et le Qatar dans le but d’ingérer dans les affaires européennes.
L’agenda du dernier sommet européen de l’année, mercredi et jeudi, était déjà bien chargé, avec évidemment l’Ukraine avec les prix du gaz, mais il sera désormais aussi question de ce scandale de corruption et de ses conséquences pour l’Europe, rapporte notre envoyé spécial à Bruxelles, Daniel Vallot.
Les dirigeants des 27 pays de l’UE vont en parler même si le sujet n’est pas officiellement à l’agenda, et tout aussi fatalement ils ont dû évoquer le sujet à leur arrivée à Bruxelles. « Il faut que la justice fasse son travail. Il faut se baser sur des faits qui sont identifiés. Le Parlement européen mène aussi son travail. C’est une très bonne chose qu’il y ait de la transparence et de l’exemplarité », a déclaré par exemple le président français. Une déclaration prudente pour Emmanuel Macron qui se trouvait hier soir au Qatar justement, pour la demi-finale entre la France et le Maroc. « J’assume totalement ce voyage », a-t-il dit en dépit de toutes ces controverses. Emmanuel Macron retournera d’ailleurs dimanche 18 décembre au Qatar pour la finale.
Sur le fond du dossier, le président français renvoie à la procédure judiciaire en cours et, comme les autres dirigeants européens, apporte son soutien à la volonté de réforme du Parlement et au besoin de transparence.
La présidente de l’Europarlement, Roberta Metsola, est présente à l’ouverture de ce sommet ; elle promet des réformes en profondeur, contre un scandale de corruption qui est, selon ses termes, « un coup porté à la démocratie ». « Mon message, c’est qu’il n’y aura pas d’impunité, que rien ne sera mis sous le tapis », a notamment déclaré la présidente du Parlement européen qui a mentionné notamment le renforcement de la protection des lanceurs d’alerte et l’interdiction des groupes d’amitié officieux avec des pays tiers. « Il y a des lacunes qui doivent être comblées, a-t-elle ajouté, en ce qui concerne par exemple les activités d’anciens membres du Parlement européen, les inscriptions sur le registre de transparence, et les personnes autorisées à entrer au Parlement européen. »
Et ce jeudi matin, le Parlement a demandé de fermer temporairement la porte à tout représentant des intérêts du Qatar et a décidé de suspendre tout travail législatif en lien avec l’émirat.
Une autre question se pose : l’étendue de l’affaire au sein des institutions européennes. Pour l’instant, elle ne concerne que le Parlement. Mais quelques députés ont souligné que le besoin de transparence s’appliquait aussi au Conseil européen et à la Commission. D’ailleurs dès le premier jour au Parlement européen à Strasbourg, le nom du Grec Margaritis Schinas circulait en raison de ses liens avec Doha et de ses prises de position favorables au Qatar. Le commissaire européen -et vice-président de la Commission en charge du « mode de vie européen »- dément être influencé de quelque façon que ce soit.
À Bruxelles, le « Qatargate » va très certainement monopoliser beaucoup d’attention et d’énergie au cours d’un sommet où les sujets cruciaux ne manquent pourtant pas.