Après des années de blocage et de paralysie, la normalisation de la vie politique et institutionnelle au Liban semble aller vite. Après les premières élections législatives depuis neuf ans, le 6 mai dernier, les députés ont élu, le 23 mai, le président du Parlement. Deux jours plus tard, le président de la République, Michel Aoun, a nommé le Premier ministre, qui sera chargé de former le nouveau gouvernement.
De notre correspondant à Beyrouth,
Les dirigeants libanais ont rapidement reconstitué les pouvoirs législatif et exécutif, et le président Michel Aoun semble déterminé à donner une nouvelle impulsion à son mandat. Mais c’est avec les mêmes figures qu’il est appelé à travailler.
Nabih Berry est depuis 26 ans à la tête du Parlement, une institution-clé du système politique libanais. Il vient d’être réélu pour un nouveau mandat de quatre ans, par 98 députés sur 128. Quant à Saad Hariri, le Premier ministre sortant, il a été reconduit pour former le nouveau gouvernement.
Michel Aoun n’a pas vraiment le choix : Nabih Berry a été pratiquement plébiscité par les chiites lors des élections du 6 mai. De ce fait, il est un peu le candidat naturel pour occuper le poste de président du Parlement, qui revient à cette communauté dans le système confessionnel libanais, basé sur une répartition des hautes fonctions de l’Etat entre les différentes communautés religieuses du pays.
L’Etat du Liban menacé de faillite
Même chose pour Saad Hariri ; malgré le recul de sa popularité, il reste à la tête du plus grand bloc parlementaire sunnite. Normal qu’il soit donc choisi pour se succéder à la tête du gouvernement, un poste réservé à cette communauté. En quelque sorte, on prend donc les mêmes et on recommence.
Pourtant, les trois dirigeants assurent, à grands renforts de discours et de promesses, que les choses vont changer au Liban. Là aussi, Michel Aoun, Nabih Berry et Saad Hariri n’ont plus vraiment le choix : soit des efforts sérieux de gouvernance, de lutte contre la corruption et d’assainissement des finances publiques sont faits, soit l’Etat libanais va vers la faillite.
La dette publique libanaise atteint 80 milliards de dollars, ce qui représente 150% du produit intérieur brut (PIB). Et le service de la dette engloutit près de 40% du budget de l’Etat. L’économie subit de plein fouet les retombées de la guerre syrienne, avec un désinvestissement, une hausse du chômage et un recul de la croissance.
Les difficultés de la guerre en Syrie
Le Liban a obtenu sous forme de prêts et de dons 11 milliards de dollars lors de la conférence CEDRE, réunie à Paris le 6 avril à l’initiative de la France. Mais sans réformes structurelles et sectorielles, les bailleurs de fonds internationaux seront réticents à concrétiser leurs promesses.
Le Liban a donc un gigantesque chantier pour lutter contre la corruption endémique qui mine l’administration et pour moderniser son cadre juridique afin d’encourager les investissements. Mais au-delà des défis économiques, il est confronté à des difficultés liées directement à la guerre en Syrie.
La présence d’un million de réfugiés syriens dans le pays n’est pas la moindre de ces difficultés. Sur ce plan, Michel Aoun est déterminé à organiser le retour du plus grand nombre de déplacés sans attendre l’aval des Nations unies, qui sont réticentes à soutenir ce processus avant la solution politique en Syrie. Et cela risque de créer des tensions entre Beyrouth et la communauté internationale.
rfi