En France, quelque 2 000 personnes, selon la CGT et une source policière, ont manifesté mardi soir 1er octobre dans la ville de Rouen. Elles dénoncent le groupe chimique et l’attitude des pouvoirs publics soupçonnés de « cacher la vérité » sur les conséquences de l’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen.
Les autorités ont annoncé que 5 253 tonnes de produits chimiques avaient été détruites dans l’accident et ont publié des documents pour rassurer la population.
« Tous les produits ne sont pas dangereux », assure la préfecture de Seine-Maritime sur son site. La liste des produits incendiés publiée ce mardi est accompagnée de documents qui précisent que « la dangerosité dépend de la quantité présente, du devenir des molécules après avoir brûlé et de la manière dont on est exposé (contact cutané, inhalation, ingestion) ».
Surveillance sanitaire adaptée
479 fiches de sécurité qui « précisent les caractéristiques des produits et les risques associés, notamment en cas de combustion », figurent aussi parmi les documents publiés.
Une campagne de prélèvements de l’air, de l’eau, des sols et des aliments a débuté aussitôt après le déclenchement de l’incendie, affirment les autorités. Elle se poursuivra le temps nécessaire et permettra une évaluation des risques sanitaires. Une surveillance sanitaire adaptée sera mise en place, promet encore la préfecture.
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« Lubrizol coupable, l’État complice »,
Entre-temps quelque 2 000 personnes ont manifesté dans la soirée à Rouen pour réclamer la vérité. « Lubrizol coupable, l’État complice », scandaient les manifestants partis du palais de justice en fin d’après-midi avant de rejoindre la préfecture de Normandie. « Qu’est-ce qu’on respire depuis jeudi ? On respire de la merde ! », s’emportait une jeune femme.
Au centre des revendications de la population : savoir quels sont les produits qui ont brûlé dans l’usine Lubrizol et quelle est leur dangerosité.
« On continue à nous affirmer qu’il n’y a rien, que l’air est aussi pur qu’avant et que l’on n’a pas à s’inquiéter et ça, c’est très inquiétant. On demande au préfet, à l’État, de nous donner réellement un diagnostic clair sur ce qui s’est passé, sur les particules qui ont été brûlées, sur les réels dangers pour la santé », a expliqué une manifestante.
Le désarroi des Rouennais
Beaucoup de jeunes aussi parmi sont venus exprimer leur désarroi, comme cet étudiant de 20 ans qui dénonce des arrangements avec la réalité : « Par exemple quand le préfet dit que la pollution est comme d’habitude à Rouen, ça ne dit pas quelle molécule il y a dans l’air. La pollution peut être la même, mais les molécules peuvent être différentes, c’est extrêmement vague », a-t-il souligné.
Enfin, l’autre revendication, c’est que Lubrizol prenne en charge les coûts de nettoyage de la pollution. « En quoi ça serait au contribuable de payer quelque chose d’un accident dont il n’est pas responsable, a demandé cet homme. Bien sûr, c’est à Lubrizol de payer. »
Et puis, signe de la défiance de la population envers l’État, c’est devant la préfecture de Seine-Maritime que s’est terminée la manifestation.
Que contenait vraiment l’usine ?
Par ailleurs, les rapports officiels consultés mardi par Mediapart évoquaient en 2016 la présence dans l’usine Lubrizol de produits « très dangereux pour l’environnement » et « nocifs », et estimaient qu’un incendie pourrait donner lieu à la « formation de substances toxiques ». Mme Borne a indiqué mardi qu’une partie des produits avait pu être évacuée jeudi lors de l’incendie par les services de secours.
Le média en ligne écrit également qu’un mur couvre-feu demandé en 2010 à Lubrizol par arrêté préfectoral n’avait pas été construit en 2016. Enfin, une augmentation, début 2019, de l’autorisation de stockage de produits inflammables dans l’usine n’aurait pas, selon Mediapart, fait l’objet d’une procédure spécifique et obligatoire d’autorisation.
Près d’une centaine de personnes se sont également rassemblées dans la soirée devant la préfecture de Lille (Nord) pour réclamer « toute la vérité ». Depuis l’accident, le gouvernement multiplie les propos rassurants et promet la « transparence », mais sans convaincre. Des habitants de Rouen, inquiets, se plaignent toujours de nausées et de vomissements cinq jours après l’accident.
(avec AFP)