M23 – Abdoulaye Fall : « Que ces vieux ne nous poussent pas à dire tout ce que nous savons »

Abdoulaye Fall, ex Coordonnateur des jeunes du Mouvement du 23 juin de Dakar, aujourd’hui passé du côté du M23 version patriotique, met en garde Alioune Tine et Cie. Interrogé par Le Pays au quotidien sur la scission intervenue au sein du Mouvement, il se désole de ce fait, non sans menacer de dire toute la vérité sur le M23 et ses leaders, aujourd’hui au pouvoir.

L’Assemblée générale du M23 s’est terminée en queue de poisson, ce weekend. Une véritable cacophonie au sein de ce mouvement. Comment  avez-vous vécu cela, en tant qu’ex coordonnateur des jeunes ?

Aujourd’hui, je suis révolté par l’attitude des responsables du Mouvement du 23 juin (M23). Les jeunes ne se sont pas sacrifiés, n’ont pas versé leur sang, …  pour qu’au final les politiciens considèrent le pays comme un gâteau à se partager. Forcément, on ne peut que s’offusquer de cette posture des leaders du M23, qui ont pressé  les jeunes tels du citron, pour ensuite les jeter comme des malpropres. Pourtant, dans un passé récent, on leur était d’une grande utilité. Ce sont eux qui finançaient toutes nos activités. Nous étions en permanence en contact avec la plupart de ces leaders. Donc, ce qui se passe actuellement, ce n’est rien d’autre que de la trahison. Mais qu’ils sachent que nous sommes toujours là, plus déterminés que jamais à continuer le combat. C’est pourquoi je regrette la scission intervenue au sein des jeunes, car nous devons rester unis afin de pouvoir continuer le combat. Je sais pertinemment que tout cela a été orchestré par les leaders au sommet pour tenter de fragiliser le mouvement. Mais c’est peine perdue, car les jeunes seront toujours la. Nous n’avons pas quitté le pays. On est là, prêt à redonner de notre sang, pour la sauvegarde des intérêts du peuple sénégalais. Nous avons été déçus par nos dirigeants et, franchement, il aurait été dix mille fois mieux de laisser Abdoulaye Wade à la tête de ce pays.

Vous regrettez déjà d’avoir combattu Abdoulaye Wade ?

Sur des aspects, nous regrettons, bien sûr. Figurez-vous que nous croyons tellement aux valeurs, que ces leaders disaient défendre, que nous n’avons pas hésité une seconde pour nous sacrifier à faire partir Wade. Nous avons été littéralement manipulés par nos leaders qui nous demandaient toujours de mettre le pays à feu et à sang, de ne pas donner une minute à Wade. Nous l’avons fait, car nous croyions à l’idéal du combat qu’on a mené pour le départ de Wade. S’ils se permettent de bastonner les jeunes, cela veut dire que ces gens là, ce sont des ingrats. De vrais politiciens qui ne méritent pas de nous diriger, franchement. Hier, des gardes du corps de Alioune Tine ont tabassé un jeune. Cela est inadmissible et nous ne l’accepterons pas. D’ailleurs, nous mettons en garde Alioune Tine, Penda Mbow, Abdoul Aziz Diop, Katy Cissé Wone, entre autres. Qu’ils ne nous poussent pas à dire tout ce que nous savons. Aujourd’hui, je pense que tout ce qu’il faut faire à notre niveau, c’est de nous réorganiser très vite et de voir comment poursuivre le combat contre des prédateurs, des gens qui n’étaient intéressés que par le pouvoir en réalité. D’ailleurs, ce n’est pas à eux de décider de la dissolution ou non du M23. Le Mouvement n’appartient pas à Alioune Tine, ni à Abdou Latif Coulibaly, à qui que ce soit. Je rappelle simplement que lorsqu’on partait devant les grilles de l’Assemblée nationale, ce sont les jeunes qu’ils bastonnent aujourd’hui, qui étaient devant. Ces vieux étaient tous derrière, ils n’ont jamais osé prendre des initiatives allant dans le sens d’affronter les forces de l’ordre. Mieux, au premier coup de gaz lacrymogène, ils détalaient comme des lapins. Ces gens ne vivent que de tension, alors qu’ils n’ont pas le courage. Ce qui est révoltant avec ce nouveau régime, c’est de voir tous ces vieux fermer la bouche et les yeux sur les dérives du régime de Macky Sall.


De quelles dérives insinuez-vous ? Pouvez-vous être plus explicite ?

Ce sont les mêmes pratiques que nous avons combattues sous Wade qui sont reproduites et même pires encore. Nous ne pouvons pas comprendre que Barthelemy Dias soit investi député, alors que lui-même a déclaré publiquement avoir tiré et tué, alors que des gens qui bénéficient encore de la présomption d’innocence perdent leur immunité sur aucun fondement juridique légal. Encore que ce n’est pas seulement à l’opposition aujourd’hui de rendre compte ou de justifier l’origine de sa fortune. Du côté du pouvoir également, ils sont nombreux à devoir justifier l’origine de leur fortune, à commencer par le Chef de l’Etat. Donc, pour vous dire simplement que l’exécutif doit rester là où il est. Pour le cas de Lamine Faye, nous interpelons Macky Sall à nous éclairer sur ce que la presse à écrit, comme quoi que c’est lui qui a autorisé ce dernier à voyager. Ce qui reviendrait à dire que la justice n’est pas si libre qu’on le proclame. Vous vous rappelez l’affaire Me El Hadji Amadou Sall, il a fallu que Macky se prononce pour que ce dernier soit cueilli manu militari chez lui.  Si ces pratiques ne cessent pas, il y aura encore des Cheikh Mbaye devant le palais, prêts à donner la vie pour sauver la République. Le Chef de l’Etat doit respecter ses engagements pris pendant la campagne électorale : résoudre la question de l’électricité, la question de l’emploi, entre autres. Sinon, nous n’hésiterons pas à investir de nouveau la rue.