Moussa Diaw, enseignant-chercheur en sciences politiques: « Il sera difficile pour la coalition Yewwi Askan Wi, de tenir tête à la majorité au pouvoir »

Moussa Diaw, enseignant-chercheur en sciences politiques: « Il sera difficile pour la coalition Yewwi Askan Wi, de tenir tête à la majorité au pouvoir »

Selon Moussa Diaw, il sera très difficile pour la nouvelle coalition de l’opposition «Yeewi Askan Wii», lancée hier, jeudi 2 septembre 2021, par une vingtaine de partis politiques dont le Pastef, Taxawu Sénégal et le Grand Parti, en perspective des élections municipales et départementales du 23 janvier 2022 prochain, de tenir tête à la majorité au pouvoir lors de ce scrutin. Interpellé par “Sud Quotidien”, l’enseignant-chercheur en sciences politiques à l’université Gaston Berger de Saint-Louis, est également revenu sur des raisons de la défection du Pds de ce nouveau bloc de l’opposition.

«L’annonce de cette grande coalition de l’opposition a été saluée par une grande partie de l’opinion. Car, l’opposition devrait montrer sa capacité de s’unir et de taire les divergences et les ambitions personnelles en son sein, si elle veut constituer vraiment une force importante pouvant faire face à la majorité actuelle au pouvoir. Seulement, avec cette défection de certains membres fondateurs notamment le Parti démocratique sénégalais (Pds), la Convergence Bokk Gis Gis de Pape Diop et d’autres leaders de l’opposition comme Mamadou Diop Decroix, pour ne citer que ceux-là, il sera très difficile pour cette nouvelle coalition de l’opposition de tenir tête à la majorité au pouvoir lors des prochaines élections locales.

Car, ces défections pourraient même être considérées comme un échec de la démarche de l’opposition, qui voulait mettre sur pied cette grande coalition rassemblant tous ses leaders contre la majorité. Il y aura, avec ces retraits, 2 à 3 d’autres coalitions de l’opposition qui vont se former et cela va fragiliser leur élan de lutte, dans la mesure où cela va renvoyer une image d’une opposition incapable, fragmentaire, désunie, qui n’a pas la capacité de s’unir autour de l’essentiel et de parler d’une seule voix. Donc, aujourd’hui, l’enjeu de cette coalition est de montrer qu’elle a une réelle implantation nationale, qu’elle peut constituer une force politique capable de faire face à cette grande majorité, qui est unie malgré les divergences. La seule alternative qui revient à l’opposition, c’est l’union, se rassembler si elle veut vraiment obtenir un résultat»

«LA DEFECTION DU PDS OBEIT A UNE LOGIQUE DE CALCUL POLITIQUE SUR LE CAS DE KARIM WADE»

«A mon avis, les raisons évoquées par les responsables du Pds qui pointent du doigt la démarche des initiateurs de cette coalition pour justifier leur retrait, ne sont pas suffisantes. Je pense plutôt que la formation libérale est dans les calculs politiques. D’ailleurs, si vous vous rappelez, lors des précédentes élections, notamment les législatives de 2017 puis la présidentielle de 2019, le Pds avait adopté la même démarche. Alors que les observateurs prévoyaient une cohabitation au sommet de l’Etat, parce que convaincus de la victoire de l’opposition à l’issue de ces législatives de 2017, le Pds contre tout attente, a préféré déserter la coalition de l’opposition, à cause des calculs politiques basés sur la défense de ses propres intérêts, qui ne sont rien d’autre que la révision du procès de Karim Wade ou l’adoption d’une loi d’amnistie en sa faveur.

C’est également ce qui s’est passé lors de la dernière présidentielle, au moment où tout le monde attendait du président Abdoulaye Wade, un alignement avec l’un des candidats de l’opposition, il a encore préféré se lancer dans des négociations secrètes avec le régime, dans le but d’obtenir une loi d’amnistie pour son fils Karim Wade. C’est donc le même scénario qui se joue actuellement et c’est dommage aussi bien pour l’opposition que pour le Pds, qui risque gros dans la mesure où une bonne partie de l’opinion peut lui tourner le dos, alors que les négociations sur le cas de Karim Wade avec le pouvoir n’ont rien donné jusque-là à cause des blocages».

Sud Quotidien