Amadou Gallo Fall était de passage à Paris début avril. Le vice-président de la prestigieuse ligue nord-américaine de basket-ball (NBA) et patron de la NBA Afrique est venu à RFI et France 24 pour évoquer notamment le développement du basket sur le continent africain. Entretien.
RFI : Amadou Gallo Fall, la NBA va organiser un match de saison régulière à Paris, le 24 janvier 2020, entre les Hornets de Charlotte et les Bucks de Milwaukee. Pourquoi cette rencontre à Paris et pas dans une autre grande ville européenne ?
Amadou Gallo Fall : On a une longue histoire avec Paris. La NBA y a déjà organisé plusieurs matches de présaison. Si on regarde les effectifs des équipes, plus de 30% de nos joueurs viennent d’en-dehors de l’Amérique. Or, la France, ces dernières années, fait partie des pays qui a eu le plus de représentants dans notre ligue. Il y a de très grands joueurs, des All Stars, comme Tony Parker notamment. Il y a aussi tous ceux qui sont venus ces dernières années, comme Rudy Gobert, Nicolas Batum, Boris Diaw… Ce sont des joueurs légendaires, qui ont marqué la NBA.
Et puis Paris est une des meilleures villes au monde. […] Ce match va permettre à la NBA d’offrir cette expérience authentique aux nombreux fans de basket ici en France.
La NBA organise chaque année un match de gala en Afrique, le NBA Africa Game. Est-ce qu’on peut également imaginer un match de saison régulière en Afrique, d’ici quelques années ?
Absolument ! Nous sommes en train de travailler là-dessus. Nous avons déjà eu trois éditions du NBA Africa Game, ces quatre dernières années. Et la prochaine étape, dans un futur très proche, c’est d’avoir des équipes NBA. Surtout avec le développement d’infrastructures que nous commençons à avoir sur le continent.
La NBA a noué un partenariat avec Youtube pour diffuser en direct en Afrique certains matches. Pourquoi ce choix ?
L’une de nos priorités reste de nous assurer que nos fans aient l’opportunité de voir le produit, à savoir nos matches. Il est logique d’exposer notre produit. Le basket et la NBA gagnent en popularité sur le continent africain, avec une très forte présence de joueurs africains en NBA. Des joueurs nés en Afrique ou dont les parents sont Africains. Il y a de l’intérêt partout sur le continent. Les supporters ont envie de voir leurs joueurs favoris sur les parquets de la NBA.
Donc, cette opportunité avec Youtube nous permet de continuer à laisser notre empreinte sur le continent. Nous diffusons deux matches par semaine. On est très emballé par le fait de diffuser les play-offs ainsi que les finales. Ces rencontres seront accessibles à tous nos fans d’Afrique sub-saharienne.
La NBA a ouvert son bureau en Afrique en 2010. Neuf ans plus tard, est-ce que le basket est devenu aussi populaire et pratiqué en Afrique que vous le souhaitiez ?
Le basket est le sport numéro 2 au monde et en Afrique. Nous n’avions aucun doute lorsque nous nous sommes assigné ce travail, bien avant 2010. Déjà, en 2003, lorsque nous avions lancé « basketball without borders » [un programme de détection, Ndlr], nous avions vu le potentiel. Il y a une histoire entre la NBA et l’Afrique qui date de très longtemps. On pourrait parler d’Hakeem Olajuwon qui a été drafté [recruté, Ndlr] en NBA en 1984. Mais, avant cela, il y eu des visites effectuées sur le continent, comme celles de Kareem Abdul-Jabbar ou d’Oscar Robertson, durant les années 1970.
Cette histoire a contribué dans une grande mesure à l’établissement du bureau NBA en 2010, puis à tous ces événements que nous avons organisés ces dernières années. Des événements qui participent à la popularisation de la NBA et du basket-ball en Afrique.
On voit l’émergence de joueurs comme les Camerounais Joël Embiid ou Pascal Siakam, le Sénégalais Gorgui Dieng. Certains sont arrivés en NBA via Basketball Without Borders. […]
Evidemment, il reste énormément de travail à faire, mais les étapes déjà franchies nous encouragent à persévérer.
Aujourd’hui, il y a une douzaine de joueurs NBA qui sont nés en Afrique et qui y ont découvert le basket. Ce total n’est pas énorme sachant qu’il y a environ 450-500 joueurs NBA…
Ce n’est pas forcément énorme mais ça reste tout de même considérable. Il faut se rappeler du fait que jouer en NBA est réservé à un club très fermé. Environ 30% des joueurs viennent du reste du monde. Ça représente une centaine de joueurs, toutes nationalités confondues, en dehors des Etats-Unis.
La place de l’Afrique est donc très respectable. Et je ne doute pas du fait que le nombre d’Africains en NBA va croître. Surtout avec l’avènement de la NBA Academy Africa, que nous avons lancée en 2016.
Des joueurs comme Hakeem Olajuwon, Dikembe Miutombo ou Manute Bol, qui ont été des pionniers, n’ont pas profité d’un système focalisé sur la détection et la formation des jeunes joueurs. Ils sont arrivés un peu comme ça. Dikembe s’est rendu en Amérique non pas pour jouer au basket, mais parce qu’il avait une bourse pour les études. Olajuwon s’est rendu tard aux Etats-Unis. Pareil pour Manute.
Désormais, nous avons décidé de véritablement mettre l’accent sur le travail de détection, avec la construction de la salle à Saly, au Sénégal, qui est aux standards mondiaux, avec des entraîneurs de niveau NBA et de jeunes joueurs auxquels on donne l’opportunité de se former. Ils apprennent les fondamentaux du jeu tout en allant à l’école. […]
Il y a donc du progrès. Et ces jeunes commencent à comprendre qu’ils peuvent se développer sur le continent. L’idée est d’ailleurs là. L’Afrique ne peut pas continuer à être un continent où le seul espoir de se développer, pour un joueur, c’est de s’expatrier. […]
Les meilleurs iront peut-être toujours dans les plus grosses ligues. Mais, avec la création de la Basketball Africa League, il y a un maillage qui est vraiment en train de se compléter.