Niger: l’attaque meurtrière près de Tillabéry rappelle celle d’octobre 2017

Une embuscade meurtrière a coûté la vie à au moins 28 soldats nigériens dans le nord de la région de Tillabéry, non loin de la frontière malienne. Une colonne militaire de Forces armées nigériennes a sauté sur des mines placées sur leur chemin. Puis s’en est suivi un assaut de terroristes lourdement armés. Le gouvernement nigérien a décrété un deuil national de trois jours à compter de ce jeudi.
Ce sont des hommes de la 112e compagnie spéciale d’intervention, basée à Ouallam, et leur colonne d’au moins huit véhicules, qui sont tombés dans une embuscade tendue par des terroristes à 45 kilomètres au nord-ouest du village de Mangaïzé, non loin de Tongo Tongo et de la frontière malienne.

Les 52 soldats partis à la poursuite de jihadistes qui ont tenté d’attaquer la prison de Koutoukalé patrouillaient près du village de Baley Béri quand un de leurs véhicules a sauté sur une mine. La violente explosion et les tirs nourris de l’ennemi n‘ont laissé aucune chance aux soldats.

Trois avions de reconnaissance, un Français, un Nigérien et un Américain, ont survolé à plusieurs reprises la zone de combat puis sont rentrés à leur base à Niamey sans avoir vu de mouvement jihadiste au sol.

Selon plusieurs sources, les jihadistes n’ont pas eu le temps de franchir la frontière malienne. Des complicités locales les auraient cachés après l’attaque. Malgré le risque de tomber dans de nouvelles embuscades, les premiers renforts terrestres sont arrivés sur le site à la tombée de la nuit. Les recherches engagées ont permis de retrouver trois véhicules appartenant à l’armée nigérienne. Un seul véhicule manque à l’appel, celui de l’officier chef de la mission.

Quelle est encore la capacité de nuisance de l’«Etat islamique dans le Grand Sahara»

Cette embuscade s’est déroulée dans une région où avait eu lieu en octobre 2017, une attaque similaire lors de laquelle 5 militaires nigériens et 4 soldats états-uniens avaient été tués par des jihadistes venus à bord d’une dizaine de véhicules et d’une vingtaine de motos à hauteur de Tongo Tongo encore (situé une centaine de km de Niamey et à une vingtaine de km de la frontière avec le Mali).

Cette attaque avait été revendiquée par l’ « Etat islamique dans le Grand Sahara ». C’est « depuis plusieurs années la zone d’action de l’Etat islamique au Grand Sahara, dirigé par Abou Walid Al-Sahraoui, nous explique Nicolas Desgrais, doctorant à l’université du Kent qui travaille notamment sur la coopération militaire au Sahel. On pensait que ce groupe avait perdu en capacité opérationnelle au cours des derniers mois, suite à l’intervention d’une coalition armée composée de Barkhane, quelques milices maliennes (Gatia et MSA) et les forces armées nigériennes et on se rend compte qu’aujourd’hui on a peut-être une résurgence des capacités opérationnelles de ce groupe ».

Le groupe EIGS maîtrise parfaitement ce terrain très vaste, souvent boisé… Une végétation qui permet de facilement se cacher et de mener des embuscades.

Mais il n’y a pas que les hommes d’Abou Walid Al-Sahraoui qui sont actifs dans cette zone. Ceux du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, très présent au Mali, y mènent aussi des opérations. Il arrive d’ailleurs à ces deux entités jihadistes de collaborer: ils se prêtent des hommes et du matériel pour mener des attaques d’envergure. Est-ce que cela a été le cas cette fois-ci ? Difficile à dire pour l’instant.

rfi