Pape Malick Ndour : « Le dialogue politique est à mes yeux existant, mais informel »

Dans un terrain politique comme le nôtre où les tensions ne sont que virtuelles, où la difficulté à s’écouter et à se parler n’est vive que sous les feux des projecteurs ; le dialogue politique est à mes yeux existant mais informel. Chez nous, c’était depuis longtemps que nous savions que tout le monde a quelque chose à gagner à la discussion. Ça faisait très longtemps que nous savions que tout le monde a quelque chose à apprendre de celui qui est en train de réussir, celui qui a échoué ou celui qui a juste de bonnes intentions et sans être sûr que leur mise en œuvre serait possible.
Maintenant, Il fallait formaliser cette forme de négociation collective, la sortir de l’informel, ne plus la cantonner dans des discussions à bâtons rompus entre camps opposés, mais réconciliés dans la paix des braves lors de nos rencontres furtives dans les cérémonies heureuses ou malheureuses.

Il fallait, il était urgent de réfléchir sur d’autres manières de travailler ensemble comme cela se faisait jadis quand Jean Monnet et le Général De Gaulle mettaient en avant l’ardente obligation du Plan dans la reconstruction de l’après-guerre.

On ne nous le rappelle pas souvent mais ici chez nous, dans le cadre d’un dialogue constructif, en février 1957, le Bloc démocratique sénégalais a fusionné avec le l’Union démocratique sénégalaise, le Mouvement autonome casamançais et une fraction du Mouvement populaire sénégalais mené par Abdoulaye Thiaw pour donner naissance au Bloc populaire sénégalais. Celà nous a permis d’amorcer le processus d’indépendance avec aucune velléité de sécession régionaliste, ce qui était important et inédit à l’époque dans le contexte africain.
On ne nous l’apprend pas assez mais il suffit d’une petite recherche pour comprendre que la grande fusion historique entre le BPS de Senghor et le Parti socialiste d’action sénégalaise de Lamine Gueye pour donner naissance à l’Union progressiste sénégalaise, en 1958 n’avait d’autres motivations que de rassembler tous les fils et filles de notre nation autour d’un même idéal qui était l’indépendance.

Rappelant les péripéties de la vie politique sénégalaise à un ami congolais, au cours d’une discussion générale que je tenais récemment avec lui, son opinion fût sans appel, « le Congo d’aujourd’hui ne serait jamais ce qu’il est devenu si Moise Tchombé, Patrice Lumumba et Kasa-vubu avaient réussi ce que les pères de l’indépendance sénégalaise avaient réussi ».
Aujourd’hui, les enjeux ne sont plus à l’indépendance déjà acquise mais l’heure est devenue grave car nous parlons de pétrole, de gaz, de développement et d’émergence au moment où d’autres nous parlent eux de terrorisme avec son lot de désolation et de risque sécuritaire qui ébranlent et désarticulent des nations toutes proches de nous : il nous faut alors créer un climat d’apaisement pour jouir de nos avantages comparatifs. Et par là, il nous faut un modèle politique où toutes les forces vives de la nation doivent être mobilisées et où, à défaut d’avoir un parti unique (le Parti du Sénégal), l’acceptation de dialoguer avec les gouvernants ne soient plus simplement vu comme une impuissance face aux sempiternelles sirènes du pouvoir.

N’oublions pas que dans un passé récent Abdoulaye Wade, Bathily et Dansokho ont plusieurs fois répondu favorablement à l’invite du Président Diouf à partager la table du conseil des ministres. Il est aussi important de rappeler que ces intempestives entrées et sorties n’ont jamais entaché leur crédibilité devant l’opinion. Ceci n’est plus possible maintenant face à la montée en puissance du populisme médiatique et des katiouchas (Orge de Staline) permanemment alignés par des donneurs de leçons très prompts à voir partout de l’herbe, de la prairie, des troupeaux et donc de la transhumance. Le dialogue peut bien porter ses fruits mais que les « régiments des mortiers de la garde » arrêtent d’avance de jeter le discrédit sur l’opposition républicaine qui y prendra part, allusion faite aux appréciations déjà négatives sur la décision de Omar Sarr de participer au dialogue contre la décision de son parti. Notre pays doit être soudé, uni et se ressembler car on n’a qu’un seul destin et c’est celui de notre nation