Quel Brexit après le triomphe de Boris Johnson aux législatives ?

Le conservateur Boris Johnson a promis, vendredi, de réaliser le Brexit « à temps » le 31 janvier, après sa victoire sans appel aux législatives. Fort d’une solide majorité parlementaire, il dispose désormais de coudées franches pour définir quel type de relation il souhaite nouer avec l’Union européenne.
Le Brexit aura bien lieu d’ici fin janvier. Les électeurs britanniques ont nettement tranché en faveur du Premier ministre conservateur Boris Johnson, qui a décroché, jeudi 12 décembre, une éclatante victoire aux législatives, après plus de trois ans de divisions autour de la sortie de l’Union Européenne (UE).

Les conservateurs, emmenés par le bouillonnant Boris Johnson, ont en effet décroché, jeudi, une très confortable majorité au Parlement, gagnant plusieurs dizaines de sièges supplémentaires par rapport au précédent scrutin en 2017 (362 sièges à la Chambre des communes contre 317, après dépouillement dans 647 circonscriptions sur 650).

Jusqu’à présent, Boris Johnson n’avait pas réussi à faire adopter par le Parlement l’accord de divorce qu’il avait négocié avec Bruxelles, faute de majorité à la Chambre des communes. Après trois ans de désaccords sur le Brexit, « je vais mettre fin à ces absurdités et nous allons le réaliser à temps d’ici au 31 janvier », a-t-il déclaré, vendredi, devant ses partisans.
De difficiles et complexes négociations

Durant la campagne électorale, le dirigeant de 55 ans, arrivé au pouvoir en juillet en se posant comme le sauveur du Brexit, a promis de soumettre cet accord aux députés avant Noël avec l’objectif de mettre le processus en œuvre fin janvier. Prévu au départ le 29 mars dernier, il a été reporté trois fois.

Ce triomphe électoral, qui montre selon lui la « décision irréfutable, irrésistible et indiscutable » des Britanniques de sortir de l’Union européenne, lui laisse surtout les coudées franches pour définir quel type de Brexit il compte mettre en œuvre, en restant plus ou moins proche de l’UE.

Boris Johnson a mis toute sa fougue au service d’une campagne durant laquelle il aura répété à l’envi « Get brexit done! » (Réalisons le Brexit). Mais il s’est bien garder de préciser ses intentions : un divorce qui maintient des relations serrées avec l’UE, partenaire économique majeur du pays, ou bien un décrochage avec une divergence des normes communes jusqu’ici, en matière sociale et environnementale notamment ?

Dès le Royaume-Uni sorti de l’UE s’ouvriront en effet de difficiles et complexes négociations sur la future relation commerciale entre Londres et les Européens, censées être conclues d’ici à la fin 2020. Ces discussions sont censées déboucher sur un accord commercial, quand expire la période de transition prévue par l’accord de sortie que Londres a conclu avec Bruxelles, et qui peut être prolongée jusqu’à deux années de plus.

Vers un Brexit plus doux ?

« Avec une large majorité, Boris Johnson peut ignorer le Groupe de recherche européen (ERG) », l’aile la plus radicalement europhobe de son Parti conservateur, « et choisir un Brexit plus doux s’il le souhaite », souligne Charles Grant directeur du groupe de réflexion Centre for European Reform (CER), sur Twitter.

Par ailleurs, le scrutin a vu les conservateurs ravir aux travaillistes, qui enregistrent des pertes historiques selon ce sondage, des sièges dans son « mur rouge », un arc allant du nord du Pays de Galles au nord de l’Angleterre, une vraie révolution.

« Le fait que le Parti conservateur détienne à présent des sièges dans le nord de l’Angleterre et les Midlands, – qui comptent encore bon nombre d’industries manufacturières, un peu d’agriculture, tous domaines qui seraient durement frappés s’il y avait un Brexit dur, ou pas d’accord de divorce, – rend à présent plus difficile pour Boris Johson de mettre en œuvre autre chose qu’un Brexit doux », analyse pour l’AFP Tony Travers, professeur à la London School of Economics.

Toutefois, le danger d’une sorte de Singapour sur la Tamise, paradis fiscal au secteur financier ultra-déréglementé, et concurrent de l’UE à ses portes, a déjà été relevé par plusieurs dirigeants européens, comme la chancelière allemande Angela Merkel. Ils comptent bien l’étouffer dans l’œuf lors des négociations sur leur future relation.

Le Premier ministre a donné quelques indications sur ses intentions cette semaine pendant la campagne électorale, assurant que « l’accord conclu avec Bruxelles signifie que nous quittons l’UE avec notre relation intacte, sans taxes et sans quotas ».

« L’accord protège notre chaîne de fournisseurs […] il garantit que nous avons les équivalences complètes en matière de normes et des besoins de l’industrie », a-t-il souligné, semblant favoriser un alignement sur l’UE.