« Le Parti démocratique sénégalais (PDS) informe l’opinion nationale et internationale qu’il ne participera pas à la réunion de démarrage des concertations sur les termes de référence du dialogue politique du chef de l’État du jeudi 09 mai sous la présidence du ministre de l’Intérieur Aly Ngouille Ndiaye.
Ce dernier est surtout totalement disqualifié pour présider une telle rencontre car il a été le maître d’œuvre de la fraude électorale pour faire gagner son patron Macky Sall. Le PDS rappelle également que sa participation au dialogue politique est conditionnée par la libération immédiate de Khalifa Sall et par la révision du procès de Karim Wade. » Voilà en substance, le communiqué sorti par Abdoulaye Wade, secrétaire général national du PDS. En termes clairs, le PDS n’assistera pas aux concertations politiques lancées par le pouvoir les modalités du dialogue national prévu le 28 mai prochain.
Pourtant quand l’idée était lancée par le Président Macky Sall, le PDS était disposé à y participer. Abdoulaye Wade avait même désigné Oumar Sarr pour représenter le parti libéral à la rencontre. Mais coup de théâtre, le PDS sort le jour même du démarrage des concertations un communiqué signé Abdoulaye et non le comité directeur de son parti pour décliner l’invitation du pouvoir et poser concomitamment ses conditions de participation. D’ailleurs le journal Libération rapporte dans sa livraison du 9 mai que Karim Wade, qui se trouve à Doha, a sommé père de ne pas participer à ce conclave. Cette décision radicale de Wade dictée par son fils Karim Wade depuis Doha n’a pas manqué de créer un malaise au sein du Pds et de l’opposition d’autant que l’apparent secrétaire général national adjoint du Pds, Oumar Sarr, a pris part à la réunion du Front national de résistance tenue au siège de Pape Diop où il était convenu que Moctar Sourang porte la voix de l’opposition lors de la rencontre avec le ministre de l’Intérieur pour exiger la mise en place d’une commission cellulaire dirigée par une personnalité neutre. Finalement, l’on se demande ce que veut réellement Abdoulaye Wade avec son oppositionnisme et son négativisme tous azimuts. Une telle interrogation trouve profondément sa réponse dans la stratégie successorale aveugle mise en place depuis l’incarcération de son fils en 2013.
Cette attitude de Wade, qui vise ad hominem Ali Ngouille Ndiaye, a fait réagir ce dernier qui n’a pas manqué à réagir en ces termes goguenards : « Le Pds a fait une déclaration pour dire qu’ils ne participeront pas, tant je suis là, eh bien, ils ne participeront pas à ce dialogue, puisque je suis encore là. Je pense que, pour l’intérêt du Sénégal, tous les acteurs devraient participer à ces travaux ». Et le ministre de l’Intérieur d’ajouter : « Ils peuvent récuser le ministre de l’Intérieur, tout en participant à ce dialogue. Je ne compte diriger le débat, alors que, je ne vois pas où est le problème. Dans les termes de référence, il y a un point sur la proposition d’un organe pour l’organisation des élections cela veut dire que nous ne sommes pas fermés sur le point ».
Cette décision de Wade à la hussarde n’est pas largement partagée chez beaucoup de libéraux même s’ils ne l’ont pas extériorisée. Invité le 7 avril à l’émission Objection de Sud Fm, Doudou Wade avait souligné que le dialogue est un élément consubstantiel à la démocratie, non sans affirmer que le Pds est dans l’attente des précisions sur la tenue de ces concertations avant de se prononcer.
Ce qui veut dire que les instances du PDS devaient se prononcer sur la position à adopter mais finalement c’est la Constante- fils qui a décidé de la conduite à tenir. Cette attitude est d’autant plus surprenante que quelques jours auparavant, lors du vote des réformes supprimant le poste de Premier ministre, Abdoulaye avait en- joint ses députés à ne pas barrer le projet réformiste de Macky. Ce qui a conduit contre toute attente les députés libéraux à s’abstenir. Pourtant tous les parlementaires libéraux, qui ont pris part aux débats de la plénière sur ledit projet de réforme, ont montré leur désaccord quant à la suppression du poste primo-ministériel.
Cette attitude contrevenante du Pds prouve une fois de plus que le PDS est une entreprise familiale dont les Wade uniques actionnaires doivent décider à tout moment du rythme à imprimer à la marche du PDS.
Lors de la présidentielle, Abdoulaye Wade était décidé à empêcher la tenue des élections avant de se raviser après un deal concocté avec le pouvoir de Macky Sall dans le palais Sékoutouréya sous la supervision du Président Alpha Condé. C’est ainsi que lors de cette élection présidentielle cruciale et déterminante, Abdoulaye Wade a demandé à ses militants de s’abstenir d’aller voter. Même si Abdoulaye Wade soutenait à tort ou à raison que Macky avait déjà ficelé un plan de fraudes qui le donnerait vainqueur au premier tour et que y participer était un coup d’épée dans l’eau, politiquement c’était une erreur de ne pas donner une consigne de vote favorable à l’opposition puisqu’il est apparemment de l’opposition. En pareilles occurrences, s’abstenir, c’est soutenir le pouvoir. Ainsi une telle décision portait plus préjudice à l’opposition qu’à Macky Sall. Car en de pareilles circonstances l’abstention augmente les vois de Macky Sall. Ce soutien implicite était un des points d’accord du protocole de Sékoutouréya. Certainement que la monnaie de la pièce tarde à être rendue par Macky Sall.
Le triomphe du wado-centrisme
Il est clair qu’après les élections de 2007, Abdoulaye Wade n’avait qu’une seule ambition : mettre en orbite le fils pour la succession du père. La contrainte à la démission-exclusion de Macky Sall du PDS en 2008 était le premier jalon pour baliser le terrain de la succession à Karim Wade. Ensuite, le deuxième fut l’imposition en mars 2009 de la candidature de Karim Wade à la mairie de Dakar au détriment de Pape Diop était le primum movens pour adouber Karim Wade comme futur remplaçant de son père à la tête du Pds et du pays. Nonobstant l’échec à la mairie de Dakar, le troisième jalon fut posé : ses responsabilités ministérielles hypertrophiques dans le gouvernement de mai 2009. Le 4e et dernier jalon a été la réforme du 23 juin 2011 relative à « la possibilité que le président et son vice-président soient élus au premier tour avec seulement 25 % des voix ». Depuis 2012, des départs et pas des moindres sont enregistrés au sein du Pds. Et tout cela parce qu’Abdoulaye refuse de faire triompher les règles de la démocratie au sein de son parti, pardon de son entreprise familiale. Malgré toutes ces ratées, Karim Wade, dans les liens de la détention, été désigné candidat du Pds à la présidentielle de 2009. Et malgré l’obstination du pouvoir à éliminer la candidature de Karim, son père et non les instances du Pds n’a jamais songer à un plan B pour suppléer à la candidature de Karim si, in fine, sa candida- ture était définitivement rejetée par le Conseil constitutionnel.
Si ce n’est pas le fils, ce n’est personne. Un tel entêtement à faire de son fils vaille que vaille l’unique candidat du Pds a été perçu comme un manque de considération, une sous-estimation des autres responsables politiques du Pds qui ont un cursus honorum, une expérience et une légitimité politique plus avérés que Wade fils et qui peuvent bien porter le projet présidentiel des libéraux. Une telle situation a fini par provoquer des départs du Pds dont le plus illustre est celui de Madické Niang, compagnon légendaire d’Abdoulaye Wade. Et le point d’orgue de cette marotte « ou Karim ou rien » a été l’abstention à la présidentielle de 2019. Finalement les militants sont réduits par Wade à des bons à rien sans capacités de réflexion et d’action, des moins que rien, des ectoplasmes dénués de toute matière grise, du bétail qui doit suivre aveuglément Panurge au risque même de se noyer ensemble. C’est le triomphe du wadocentrisme au grand dam du Pds.
Aujourd’hui, nonagénaire Abdoulaye Wade refuse de céder son fauteuil de Secrétaire général national en l’absence de son fils exilé par le pouvoir de Macky Sall.
Il est avéré que Wade préfère la mort politique de tous ses militants à la survie politique unique de son fils. Les libéraux sont libres de ne pas participer à toute concertation politique initiée par le pouvoir, ils sont libres de prendre des positions politiques conformes à leurs convictions et options. Mais il faut que tout cela s’instancie dans les structures légales du Pds. Ce qui n’est malheureuse- ment jamais le cas puisque Abdoulaye et Karim ont l’alpha et l’oméga du parti libéral.